Sangs Eternels Forever - Tome 1: Le poids de l'héritage

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Quand je me réveille, je suis nue, blottie dans les bras de mon loup. Enfin, il n'est plus le mien désormais. Je dois m'habituer à cette nouvelle situation. Je me serre un peu plus contre lui, profitant des derniers instants. Je me nourris de ce «Nous» qui dure depuis si longtemps. L'amertume me saisit et me ronge à l'idée que notre fusion doit cesser. Nos parents sont bien cruels. Mais je ne dis rien. Les mots restent coincés dans ma gorge. Je les garde pour moi. J'ai peur de faire culpabiliser mon loup si prévenant.Adam commence à caresser mes cheveux avec tendresse. Nous avons roulé à côté de la Dalle puisqu'il n'était pas question de la profaner et que notre couple ce ne sera jamais légitime.— Nous aurons l'occasion de passer du temps ensemble... je n'ai pas encore choisi ma compagne...Son annonce me fait l'effet d'un électrochoc. Je me redresse pour l'interroger du regard. Est-ce une bonne chose de repousser l'inévitable ?Puis, je comprends qu'il n'est pas prêt, lui non plus, pour notre séparation. Quelque part, j'ai l'impression de devoir perdre une partie de moi. Je dois être raisonnable. Je dois l'aider dans son devoir.Alors je me couche à nouveau contre mon loup, dans le cocon de ses bras.— C'est pour quand ?Mon ton est timide, je n'ai pas envie de connaître la réponse. Et pourtant, j'ai besoin de savoir si notre semblant de couple peut survivre encore un moment. Combien de jours nous a-t-on octroyés ?— La semaine prochaine. À l'occasion de la passation de pouvoir du Grand Conseil de la meute Warous, je rencontrerai des louves, pendant que mon père prendra les commandes pour les deux années à venir.La semaine prochaine ?!Si tôt...Et on me prévient si tard...Je ferme les yeux pour ne plus rien voir, capturant les quelques larmes afin qu'elles ne puissent s'échapper. Je me dois de rester forte, pour Adam, pour mon clan. Je déglutis. Il est temps que de me concentrer sur ce futur si proche si je ne veux pas tomber. Mais comment ne pas vaciller ?Je me reconnecte à la réalité. Les garous sont bien mieux organisés que les vampires, ou même les sorcières d'ailleurs. Ils ont su, de par l'existence des couples Alpha, accroître les pouvoirs des meutes. Des règles ancestrales régissent leur population. La présidence du Grand Conseil change tous les deux ans par un des Alphas en titre. C'est l'occasion de contrôler que tout est en ordre dans les autres hordes, que chaque transformation d'humain en lupin ou naissance naturelle a bien été déclarée. Attention, les loups ne sont pas naïfs, tous savent qu'ils sont proches de la réalité sans jamais la connaître véritablement. Ils sont conscients que des meutes ne jouent pas franc jeu. Ces deux années sont l'opportunité de faire certaines vérifications...... ou de nouer certaines alliances.Une semaine, c'est tout ce qu'il reste à l'existence de ce «Nous».Je soupire de lassitude.Adam embrasse mes cheveux noirs, caresse ma peau pâle comme la mort.Soudain, je le sens. Il est là. Je reconnaîtrais ce champ électromagnétique au milieu de milliers d'autres. C'est mon père, ce majestueux samouraï, Sensei de son état, chef du clan Duroy, un des plus prestigieux côté vampire.Je regarde le ciel et souris. Il ne fait pas tout à fait nuit. La magie du sang de ma mère est incroyable. Je me redresse. Adam m'imite et nous remettons nos habits sans rien dire. Quand nous en avons terminé. Mon loup lève la main en direction du sous-bois. Une silhouette toute de noir vêtue s'approche silencieusement. Aucune parcelle de peau n'est visible. Kimono, gants, cagoule, chapeau à large bord, lunettes de soleil, chaussettes et chaussures souples lui garantissent de ne pas frire sous la lueur du jour qui décline. Pourtant, il n'est pas l'heure pour les créatures aux dents longues de se réveiller.Mon loup part à l'opposé après que mon père ait répondu à son salut. Alors je vais rejoindre mon clan. Ai-je encore une place dans la meute ?— Rentrons Teruki !Mais il n'a pas le temps de se détourner pour me montrer le chemin que je me jette dans ces bras. Nos deux carrures sont similaires. Je suis grande et bien bâtie comme lui. Mes courbes très féminines me donnent une drôle d'allure. L'ensemble rend toute infiltration dans le milieu des humains impossible. C'est ainsi. De ce côté, j'ai hérité du patrimoine vampirique de mon père, mais de la poitrine généreuse de ma mère. Mon apparence est saisissante.J'ai eu beaucoup de mal à accepter ce corps en grandissant. J'ai été toute dégingandée pendant longtemps. Heureusement la danse classique m'a beaucoup apporté pour gagner en port de tête et en élégance.Pour l'heure, j'ai besoin de retrouver la force paternelle. Je me blottis dans ses bras et frotte ma joue contre le haut de son épaule. En réponse, il me caresse la tête. Ce rituel que nous gardons depuis mon enfance, nous apaise tous les deux. Son don s'étend et je sais qu'il va m'influencer pour reprendre plus de recul sur la situation, plus de détachement. Je le laisse faire et je me sens soudain plus légère.Puis, sans que l'on ait besoin de dire le moindre mot, nous nous écartons et rentrons au château, chez moi, mon refuge puisque je n'aurai bientôt plus que celui-là. Nous humons la plus insignifiante fragrance sur notre passage. Nos sens vampiriques s'éveillent. Les mulots détalent pour se cacher dans leur terrier. Les oiseaux se taisent instantanément. J'en souris. Nous sommes en haut de la chaîne alimentaire. Les feuilles d'automne tournent et virevoltent quand la brise s'engouffre sous les arbres. La nature est si belle et je m'abreuve de tous ces parfums.— Tu savais que ce serait bientôt fini ?Ma question ne le surprend pas. Je parle, mais nous pourrions nous entretenir mentalement.— C'était inévitable... nous vous avons laissé longtemps pour voir si le miracle se produirait... malheureusement, le temps des loups est compté.C'est la triste réalité. Je hoche la tête.— L'Alpha doit avoir une compagne pour gouverner, dis-je pour compléter l'accablante vérité.— Exactement Teruki, il ne peut en être autrement. Un Alpha sans compagne sera vite exécuté, tout comme un Alpha sans descendance. Adam doit maintenant rencontrer son alter ego, celle avec laquelle il pourra se lier, assurer sa lignée et reprendre la suite de Luc quand le moment sera venu...Je me rembrunis devant ces règles que je trouve soudain désuètes, inadaptées.— Ne sois pas triste, ma fille. N'entretiens pas une sourde colère. Nous devons respecter les usages de chacun. Nous nous serions battus avec Luc si une progéniture était née de votre union. Nous l'avions déjà organisé, car d'autres clans de vampires ou de garous ne voient pas forcément d'un bon œil le havre de paix que nous avons construit ici. L'émergence d'un nouvel être hybride aurait été source de conflits.J'acquiesce, c'est tellement vrai. Et si j'étais enceinte, après cette dernière effusion de passion qui nous a transportés ? Est-ce que cela changerait quelque chose au rendez-vous d'Adam avec ces louves qui ne cherchent qu'à s'unir. Je soupire autant de tristesse que d'exaspération.Mon loup est magnifique. Il n'aura que l'embarras du choix.Je ne sais plus que penser. Dois-je espérer une grossesse qui pourrait mener à la guerre alors que l'héritier des Warous doit prendre une femme de son espèce ?Il fait maintenant nuit noire. Nous arrivons sur la route et je souris à mon père quand je découvre qui est là pour nous accueillir. Je ne vois pas son visage, mais l'amour déborde de mon père en admirant ce petit bout de sorcière-vampire avec sa cape rouge sang. C'est la gardienne de notre joie.Tantôt une cape courte, tantôt longue et son éternel leggins noir, elle attend patiemment que je rentre au bercail. Pourtant la patience n'est pas sa première qualité. Combien de fois a-t-elle sauté dans sa jeep pour essayer de me suivre quand je m'échappais ? J'en ricane intérieurement.Elle me redonne la joie de vivre instantanément et quand je tombe dans ses bras, c'est dans les miens qu'elle disparaît. Ismérie, ma mère, caresse mon dos avec affection.— Ça va aller, ma fille !Je pose ma tête sur la sienne.— Oui, maman !Mon père nous enlace et serre un peu trop fort sous le contrecoup de l'émotion. Notre samouraï serait-il ébranlé ?— Venez, nous invite-t-elle.