02. Juste une fleur

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Un pas après l'autre. Un battement de cœur, puis un autre.

J'étais en vie.

Mais pas mon grand-père. Il était la personne que j'aimais le plus car c'était la seule personne de ma famille à s'intéresser à moi. Je l'aimais comme un père. Et je me trouvais maintenant devant sa tombe.

La vie est injuste.

Tout le village a été présent aux funérailles. Lors du cortège, je marchais derrière le cercueil. Ma tante et ma cousine me suivaient, puis les gens marchaient derrière nous. J'étais la petite fille endeuillée qui n'avait pas prononcé un mot depuis qu'elle avait retrouvé son grand-père mort.

Je me sentais observée, jugée. Même cachée sous mes lunettes de soleil, ma peine se voyait. Personne n'osait venir me parler. Ils s'adressaient tous à ma tante ou à ma cousine.

Une heure après l'enterrement, je suis toujours devant la tombe. Bianca est restée pour me tenir compagnie, mais je sens qu'elle en a marre.

- Liv, il faut partir.

Je lui fais signe de partir sans moi. Elle râle et s'éclipse en me laissant seule. De toute manière, je préfère être seule.

Mon grand-père est mort d'une cause naturelle, un simple arrêt cardiaque. Au début, je ne voulais pas le croire. Je pensais que les gens qui avaient débarqué en pleine nuit étaient revenus pour le tuer, mais j'avais tort.

Je ne saurais donc pas ce qu'il s'est passé cette nuit-là.

Soudain, une voiture se gare à l'entrée du cimetière. Le soleil a disparu et à laisser place à un temps grisâtre. Trois hommes sont descendus de la voiture, ils sont tous habillé en noir.

Le tonnerre gronde dans le ciel. Cela ne m'effraie pas. Il n'y a qu'un seul homme qui entre dans le cimetière. Il marche avec un charisme qui semble impressionnant.

Mes yeux se captivent de son image. Dans ma tête se joue une musique : Edith's Theme de Fernando Velazquez. Je l'ai entendue dans un film.

Peut-être que je romance un peu tout parce que cela me permet de ne pas sombrer, alors j'embellis chaque moment pour avoir envie de vivre.

Je l'observe approcher. Ces cheveux sont d'un brun intense et court. Il est mince et grand. Ce gars est flippant, aucune expression n'est sur son visage quand il s'approche de moi. Il n'a rien de spécial. Il porte un pull et un jean.

Je remarque ses mains qui sont tatouées. Il tient une fleur.

Le gars s'arrête à ma gauche, il regarde la tombe. Nous sommes silencieux. Je ne sais pas qui est cette personne, je ne l'ai jamais vu.

Il brise le silence au bout de deux minutes. Sa voix grave me fait sursauter, je m'étais habituée à son silence.

Je tourne la tête pour le regarder comme il le fait.

- Toutes mes condoléances.

Sa voix résonne en moi.

Il ne le sait pas mais c'est la première personne à me parler en dehors de ma famille. Le fait qu'on s'adresse à moi me perturbe.

J'ouvre la bouche pour répondre mais je sens un sanglot venir et je ne sais pas quoi répondre. Il me regarde intensément.

- Je sais que tu ne parles pas, dit-il, ne t'en fais pas. Je n'attends pas de réponse.

Ce gars ne sourit pas, il a l'air vide. Je suppose qu'il doit venir du village puisqu'il est au courant que je ne parle pas. Mais cet aveu me donne envie de parler pour la première fois. Je retire mes lunettes de soleil, nos yeux se rencontrent pour de vrai.

LUCCIANI (sur Amazon)Where stories live. Discover now