chapitre douze

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LA SICILE ET L'ITALIE NE seraient rien sans les pâtes à la carbonara. Ne souhaitant aucunement détruire ce plat si prestigieux à ses yeux, Matteo s'affaire en cuisine pour ne pas laisser à Pierre la possibilité de ruiner le plat qu'ils comptent dévorer pour le déjeuner.

Cela ne dérange pas plus que cela le châtain, de toute manière, il n'a jamais été friand de l'art gastronomique. Loin de lui cette faculté. Ses plats se résument à une diète sur mesure, cuisinés par des professionnels lors des semaines de course, ou par lui-même lorsque réellement, il n'a pas le choix. Tout comme Charles, finalement.

Même si, lui, possède l'immense chance d'avoir un cuisinier italien à domicile qui s'occupe de lui avec tant de douceur qu'il se sentirait au paradis à n'importe quel instant, n'importe quel endroit sur terre. Aucun problème spatio-temporel, le brun se sent comme à la maison dès lors que son blond est à ses côtés.

Le normand se demande quelle sensation c'est, de trouver son âme sœur. La personne qui fait vibrer ton cœur si fort que l'on a l'impression qu'il va sortir de notre cage thoracique. Pour qui on décrocherait la lune. Celle qui nous donne envie de nous lever le matin pour partager une nouvelle journée. Ou celle qui ne nous fait pas voir les heures défiler, nous faisant nous endormir si tard que les étoiles quittent leur place dans la voie lactée pour laisser place au soleil.

Pierre envie Charles.

Ils sont tous les deux dans la piscine, profitant de cet instant entre meilleurs amis pour discuter de tout et de rien. Pourtant, le français sait que cette discussion téléphonique ne s'est pas réellement achevée. Toujours en suspend, il semble attendre sa sentence à chaque seconde lorsque le monégasque souhaite prendre la parole. 

- Il va falloir que l'on parle calamar.

- Je sais.

- Dis-moi ce qui te tracasse, je te connais quand tu ne te sens pas bien.

Le rouennais cherche d'abord à fuir la discussion. Il quitte la piscine pour s'installer sur un transat, suivi rapidement par le brun qui s'assoit en face de lui, sur une autre chaise longue. Les mains liées sous son menton et les coudes posés sur ses genoux, il patiente pour les premières paroles de son ami, préférant qu'il débute un petit monologue pour ne pas le brusquer plus qu'il ne l'a déjà été.

- Tu te souviens quand je t'ai dit que Katerina avait rompu parce que je n'étais pas assez présent pour elle ?

Le monégasque hoche doucement la tête, l'invitant à poursuivre.

- En réalité, elle m'a trompée. Pour la même raison : mon absence répétée. J'avais tellement honte de ne pas avoir pu... être assez, pour elle, que j'ai tairé l'histoire pour que personne ne le découvre. Elle seule est au courant, évidemment. Elle est partie du jour au lendemain. J'avais l'impression d'avoir été délaissé comme une... une sombre merde, chiffonné comme une boule de papier que l'on jette à la poubelle. Sauf que c'est ma confiance qui est partie aux ordures.

Charles, abasourdi, ne sait que dire face à cette annonce. Bien évidemment qu'il a rencontré Katerina, et plus d'une fois, mais jamais il n'aurait songé une seule seconde qu'elle puisse le tromper puisque Pierre voyage de "trop".

Il ne peut que se contenter de lancer un regard compatissant au châtain, qui ne demandait que cela. D'être écouté sans être jugé. D'être compris dans la difficulté de ne pas se sentir assez présent pour ses proches.

- C'est difficile d'être en déplacement trois-cent jours par an, mais une personne qui t'aime réellement comprendra que sans cette passion, tu n'es plus toi-même. Quand on se lance dans une relation, certes, on se met en couple avec Charles, Pierre... mais aussi avec la formule un, parce que c'est une partie de nous. Ceux ou celles qui ne sont pas en mesure de comprendre ne peuvent pas nous offrir ce que l'on veut.

𝐀𝐔𝐆𝐔𝐒𝐓Where stories live. Discover now