Chapitre 2

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6 ans plus tôt

La sonnerie retentit signifiant que mon calvaire touchait enfin à sa fin. Je levai les yeux de ma tablette et cherchai du regard le professeur qui venait d'éteindre le tableau tactile. Je tournai la tête vers les autres élèves et remarquai qu'ils rangeaient leurs affaires. Il ne me fallut pas plus pour suivre le pas.

— N'oubliez pas de m'envoyer votre devoir sur « l'Âge de la peur » avant treize heures, demain. Passé ce délai, ce travail vous vaudra une note nulle...

Notre professeur d'histoire sonda la classe. Bien évidemment, son attention se bloqua sur moi, plus insistante. Il leva un sourcil et je lui offris un sourire innocent. Ça ne parut pas le convaincre, mais au moins il poursuivit son laïus.

— Il est inutile de vous rappeler que ce devoir compte pour trente pour cent de votre année...

Bon d'accord, il ne m'avait clairement pas oubliée.

Comme les autres élèves, j'enfilai ma veste et glissai mon sac sur mon dos après l'avoir clôturé.

Discrètement, je soulevai ma manche et jetai un œil à mon SyCeS. Une sollicitation brève du poignet activa l'écran et l'heure s'afficha en grand. Un nouveau mouvement bref du poignet me permit d'atteindre le deuxième écran : aucun message en attente.

J'ignorai pour quelle raison je m'évertuai toujours à vérifier mes messages. À part mes parents, personne ne me contactait. J'aurais pu avoir une notification de ma sœur, mais comme elle était encore trop jeune, nos parents refusaient qu'elle en ait un.

Craignant de me faire surprendre avec mon SyCeS dans son mode d'utilisation normale, je replaçais correctement ma manche.

Lorsque nous étions en cours, nous étions obligés de plonger le SyCeS en mode restreint. De cette façon, nous avions uniquement accès à l'heure. Ce que je ne faisais bien évidemment jamais... En mode restreint, je n'avais pas non plus accès à mes paramètres vitaux, et ça, je n'aimais pas du tout. Bizarrement, l'absence de ces courbes m'angoissait encore plus que de les avoir à ma portée.

J'avais installé cette option en vue de prévenir une nouvelle crise... J'en étais devenue tellement dépendante, que je ne pouvais plus m'en passer, pas même pour une courte période.

Je fis semblant de rien et d'un pas déterminé, je me dirigeai vers la sortie de la classe.

Tandis que je m'apprêtai à franchir la porte, je fus stoppée net dans mon élan.

— Mademoiselle Sand, j'aimerais vous parler une minute avant que vous ne partiez !

Je me crispais. Que me voulait-il encore ?

La main suspendue dans le vide, je la laissai aller contre mon corps. Je soupirai discrètement en visualisant la poignée. J'eus une envie folle de l'actionner pour sortir d'ici. Pourtant, je n'en fis rien.

D'un mouvement lent, je me retournai en direction du professeur et le sondai.

L'homme m'observait avec ses petits yeux perçants, les lèvres pincées. Ses lunettes de vue étaient légèrement de travers sur le bout de son nez. Un tapotement en rythme m'indiqua qu'il était visiblement très agacé.

Sans un mot, il me fit signe de m'asseoir sur le siège juste en face de son bureau. J'aurais bien aimé refuser, mais je n'étais pas réellement en position de négociation. Je pris sur moi et me dirigeai le pas lourd vers la chaise en métal. Je m'écroulai dessus et lançai un regard las vers le professeur.

— Mademoiselle Sand, reprit-il calmement, mais fermement en s'asseyant à son bureau. Il y a quelque chose dont je souhaiterais vous faire part.

Tout en parlant, je le vis sortir sa tablette. Il pianota quelques secondes sur l'écran avant de me la montrer de son siège. Je n'avais pas besoin de m'approcher pour comprendre de quoi il en découlait. Je reconnus facilement les couleurs vives et les symboles que j'avais employés pour mon dernier travail.

La Plume mécanique - tome 1Where stories live. Discover now