L'Enfance : IV

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Lord Hartfield rentra avec nous à Arclif, et cela ne parut, ni à Colin ni à moi, étrange. Il devint même mon professeur de piano, il était bien meilleur que le précédent. Sa présence à la maison nous était naturelle, il faisait partie de la famille, il était d'ailleurs plus légitime de cette place que la tante de papa.

Tante Alexandra était très vieille, elle n'avait jamais été mariée, certains disaient que c'était cela qui l'avait rendue aigrie. Un jour, après la messe, elle était venue manger à la maison. Je n'étais pas censée entendre cela, mais elle avait fait des insinuations sur notre naissance, comme quoi nous ressemblions trop à papa pour que ce soit le fruit du hasard. Quelques années plus tard, en y repensant, j'ai compris qu'elle avait insinué que Colin et moi étions des bâtards. Elle n'est plus revenue après cela. Parfois, lorsque papa nous racontait qu'il l'avait croisé au village, il ne se privait pas pour l'insulter.

Cette année 3261 fut marquée par une suite de découvertes, de rencontres et de premières fois.

Le 25 janvier, j'avais fêté mon anniversaire pour la première fois, la date n'était pas sûre, mais c'était celle inscrite sur mes papiers. Mr. Brew m'avait envoyé une lettre à laquelle je répondis. Mais le plus incroyable fut d'avoir un cadeau, et quel cadeau : un poney. Je ne leur dis pas, mais au début, je fus déçue que ce ne soit pas un cheval. Finalement, cela s'oublia vite, lorsque papa me laissa monter le dos de l'animal. Et comme je l'avais demandé, on me laissa monter comme un homme et pas en amazone.

En février, une gare fut inaugurée à Swanfield. Papa et maman avaient donc invité des amis, mais aussi les parents de maman, Lord et Lady Hoover. Au début, j'avais peur de les rencontrer, mais finalement, tout se passa bien, ils nous offrirent même des présents. Non, ce que j'aurais dû redouter, c'était le fils du marquis et de la marquise de Valenson, George Beal. Il avait le même âge que moi, lui et sa sœur étaient arrivés dans la salle de jeu et je les avais immédiatement détestés.

― Bonjour.

Dans son bonjour, il y avait un tel dédain. A l'évidence, il savait que nous avions été adoptés et il trouvait cela affreux.

― Bonjour, répondis-je en gardant la tête haute.

― A quoi jouez-vous ?

Je désignai du regard les petits soldats de plomb qui jonchaient le sol. En voyant cela, sa sœur soupira, à l'évidence, elle ne considérait pas qu'il était convenable pour de jeunes ladies de jouer à ce genre de jeu. George, ne dit rien et il vint même jouer avec nous. Seulement, il s'avéra que cela se transforma plus en une bataille de qui aurait raison. Il se croyait supérieur, il ne voulait pas entendre ce que je disais. Toutes les propositions que je pouvais faire lui paraissaient stupides et il ne se retenait pas de le dire. Lorsque nous avons joué au ballon, il s'est moqué de Colin qui n'arrivait pas à attraper la balle, mais le futur marquis faisait en réalité exprès de l'envoyer trop haut pour qu'un enfant de quatre ans puisse l'attraper.

L'après-midi, papa nous emmena tous voir les travaux de la chapelle du parc d'Arclif, qu'il avait entrepris de restaurer pour Colin. Mon petit frère de quatre ans s'était mystérieusement épris de l'art des vitraux. Une fois la visite finie, les adultes ressortirent, et je restais seule. Je sortis de sous mon corsage mon médaillon de baptême et le serais très fort. Je ne savais pas encore pourquoi je priais, mais j'en ressentais le besoin. C'est alors de George Beal revint à l'intérieur. Il voulut me faire peur en arrivant dans mon dos, mais je l'avais entendu venir, on peut dire qu'il était tout sauf discret.

― Bou ! cria-t-il.

Je me retournai et le fusillai du regard.

― Vous vous trouvez drôle ?

Violet SkyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant