XI

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Deux semaines étaient passées depuis que j'avais parlé au maître de "Bam". Deux semaines étaient passées et je n'avais pas parlé à nouveau. Je notais cependant que, enfin, je me repérais dans le temps plutôt que de tenir un compte précis des jours.

Ce jour ci, comme depuis un moment maintenant, je regardais distraitement par la fenêtre.

Il faisait beau et le vert de la forêt ressortait. L'eau d'un petit lac dont j'avais oublié l'existence scintillait au loin. Le ciel avait repris une couleur bleue - ou peut-être était-ce moi qui, pour la première fois depuis un moment, remarquait cette couleur - et au coin de ma vision se trouvait le bouquet mourrant que le maître de "Bam" m'avait offert la dernière fois.

Nous devions être au printemps, peut-être même au début de l'été. L'air était chaud, les oiseaux chantaient et je pouvais sentir un vent très léger s'engouffrer à travers la fenêtre puis chatouiller mes cheveux courts.

Depuis combien de temps ces choses étaient-elles là ? Depuis combien de temps ne les avais-je pas senties ?

Ma gorge s'était alors soudainement serrée et respirer m'était devenu difficile. Une larme a coulé puis une deuxième, une troisième, une quatrième. Mes sanglots ne se sont pas arrêtés avant plusieurs heures ce jour-là.

J'ai ignoré ce chien qui ne ressemblait à rien avec son gros jouet plein de bave qui me donnait envie de vomir et son maître qui m'énervait à se mêler de ce qui ne le regardait pas, à sourire comme si sa vie était aussi parfaite que sa dentition.

J'ai continué à en vouloir au monde entier les jours qui ont suivi. J'ai dit à ma grand-mère d'aller se faire voir - et tels étaient les premiers mots que je lui ai adressé - ce qui l'a fait fondre en larmes, j'ai insulté chaque moucheron qui passait devant moi ou que j'entendais, je me suis énervée contre chaque bout de couette qui ne se mettait pas comme je le voulais.

Ce jour ci, comme les six derniers, j'ai claqué la fenêtre lorsque le maître de "Bam" est arrivé près de moi.

Ce jour ci, contrairement aux six derniers autres, il a eu le réflexe d'empêcher sa fermeture.

- Quoi ? je l'ai agressé. C'est quoi votre putain de problème ? Barrez vous et mêlez vous de vos affaires ou, au moins arrêtez de vous mêler des miennes.

- Olga. Vous pouvez m'agresser autant que vous voudrez, la seule chose qui changera, c'est que vous serez définitivement seule.

- Je suis déjà seule.

- Vous n'êtes pas seule, que vous le vouliez ou non. Je sais que c'est dur mais il va falloir vous faire violence.

Me faire violence ? Mais pour qui se prenait il ? La violence n'était pas ce qui manquait dans ma putain de vie.

- Je vous demande pardon ? Mais vous êtes qui pour me parler comme ça ? Pour me parler comme si vous saviez tout de moi ? Comme si vous aviez une quelconque légitimité à ouvrir votre grande gueule ? Vous n'êtes personne pour me parler de violence. Vous étiez là quand il s'agissait de panser les plaies de mon petit frère ?
Vous étiez là quand je l'ai giflé pour une raison stupide ? Vous étiez là quand j'ai découvert son corps froid et bleu dans un bain de sang ?

- Olga, je-   

- MAIS FERMEZ LA PUTAIN ! FERMEZ LA ! VOUS NE SAVEZ RIEN, VOUS N'AVEZ JAMAIS RIEN SU ET VOUS NE SAUREZ PLUS JAMAIS LA MOINDRE CHOSE ME CONCERNANT ! CETTE FAMILLE CRÈVERA ET VOUS NE POURREZ RIEN FAIRE ET VOUS DEVRIEZ MÊME PAS TENTER DE LA SAUVER ALORS QU'IL N'Y A PLUS RIEN À SAUVER !

Le chien du voisin [Jungkook]On viuen les histories. Descobreix ara