Chap 70 : pdv Aaron (présent)

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   Je savais que je n'aurais pas dû faire ça. Je n'aurais jamais dû faire ce choix tout seul. C'était trop important. Mais il était trop tard. J'avais pris ma décision sans penser aux conséquences, sans vraiment savoir ce qu'il se passerait dans mon corps et dans mon esprit.

De plus, à ce stade, je ne voulais plus revenir en arrière.

En fait, j'avais arrêté de prendre mes médicaments.

Avant, ma mère allait les chercher pour moi à la pharmacie, mais vers mes quinze ans, elle décida de m'envoyer à vélo les acheter dans la ville voisine. J'avais toujours obéi sans trop me poser de questions, mais récemment, j'avais réalisé que ces médicaments me pourrissaient la vie. Je m'étais mis à les détester.

J'avais surtout eu le déclic quand Son Goku m'avait dit que je ne pourrais jamais partir en Alaska à cause de mes médocs, que je ne serais jamais libre de mes mouvements, que ce genre de voyages n'était pas fait pour des gens malades comme moi. Il se trompait, mais ces remarques m'avaient choqué. Fallait avoir une excellente santé pour partir en expédition au milieu de nulle part, m'avait-il dit avec aplomb. En fait, il avait peur pour moi, mais je ne l'avais pas compris à cet instant. Il cherchait simplement à me protéger parce que j'étais son meilleur ami.

-Tu crois franchement pouvoir partir en pleine forêt si tu dois prendre des médocs tous les jours ? Impossible. Faut être en bonne santé pour pouvoir bourlinguer pendant des mois.

-Comment tu le sais ?

-Tu dois sûrement être dépendant de tes médicaments donc si tu pars longtemps, tu seras en manque et ce sera horrible. Je te jure, j'ai vu un reportage sur un type qui était parti tout seul dans le désert. Un massacre ! Je ne te raconte même pas.

-Mais je ne suis pas malade ! Ma mère n'arrête pas de le dire.

-Alors pourquoi elle te file des ordonnances via sa copine médecin ?

-Je...

-Pourquoi tu vas les chercher incognito dans une autre ville ?

-Je ne sais pas trop. Elle n'en parle jamais.

-Si tu étais en pleine forme, elle ne se donnerait pas autant de mal.

Cette discussion m'avait frappé de plein fouet. Son Goku avait raison. J'avais vraiment un problème.

Mes parents essayaient de faire comme si cela n'existait pas, mais en fait, ces sales médicaments me gâchaient la vie. Je ne pourrais jamais être complètement libre à cause de ces pilules.

En regardant sur internet, j'avais compris que je n'étais plus moi-même avec ces trucs. Cela bridait mon esprit. Cela m'abrutissait. Je devenais un vrai zombie comme dans les films d'horreur. C'était flippant de devoir avaler des comprimés sans vraiment comprendre pourquoi. C'était aussi flippant de ne pas savoir qui j'étais réellement.

Quelle maladie me rongeait ? Je voulais comprendre, pas juste obéir comme un imbécile.

En rencontrant Auréa, j'avais été électrisé par elle. Spontanément, j'avais souhaité être moi-même avec elle. Je ne voulais plus faire semblant ni mentir. Elle, avec son handicap, elle assumait sa différence et le regard des autres. Cette fille était vraie, authentique. Et je voulais faire pareil.

Sans le savoir, Auréa me poussa à prendre une décision délicate. Je voulais assumer ma différence et me montrer tel que j'étais réellement. Marre de me cacher, marre d'aller dans une autre ville pour acheter des pilules que je haïssais. Marre de penser aller bien alors que c'était totalement faux.

Alors, un jour, j'avais pris la décision d'arrêter de prendre mes médocs.

J'avais soigneusement caché les ordonnances dans quelques livres de la bibliothèque de ma chambre.

Ma mère ne lisait jamais donc aucun risque qu'elle tombe dessus par hasard. Puis, ma bibliothèque ne l'intéressait pas du tout. Ce n'était que des encyclopédies, des livres d'école ou des grands classiques. Rien de tentant pour elle. Mon père, quant à lui, ne mettait jamais un pied dans ma chambre.

Chaque nouvelle ordonnance finissait planquée dans un Larousse, dans un dictionnaire des synonymes ou dans un exemplaire de « Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur ».

Malgré tout, j'avais des doutes quant à ma décision d'arrêter de me soigner :

Avais-je fait le bon choix ? 

Ou étais-je sur le point de perdre ce que j'avais de plus cher ?






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Merci beaucoup.

Plus jamais seuls (TOME 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant