12.

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Io traînait derrière. Elle avait récupéré le sac à dos pour la journée à cause des complaintes de son camarade qui duraient depuis des jours. Le poids commençait à lui peser sur les épaules, elle fit des mouvements amples avec ses bras pour détendre ses muscles dorsaux.

- Plus vite ! lui cria le jeune homme plusieurs mètres devant. Je t'entends plus soupirer, ça veut dire que tu t'es arrêtée.

Elle leva les yeux au ciel avant de faire une grimace dans le dos du garçon pour exprimer son mécontentement. Il se retourna au même moment et la remarqua. Io tenta la manière douce : elle battit des cils avec le sourire le plus charmeur possible.

- Cléo, on peut faire une pause ? demanda-t-elle d'une voix suave.

Dès la première nuit, le jeune homme avait posé les règles : elle devait l'appeler par son véritable prénom. Étant donné qu'elle ne le connaissait pas depuis très longtemps, le changement s'était fait rapidement. Elle devait même avouer que Cléo lui allait mieux que Teyler. Ce dernier prénom avait une connotation beaucoup trop gentille pour la personne qui l'avait porté.

L'adolescent acquiesça avant de rebrousser chemin. Io poussa un soupir de soulagement et laissa glisser le sac à dos de ses épaules, l'objet fit craquer quelques feuilles mortes dans sa chute. La jeune femme s'assit et fit la moue sous la douleur des courbatures.

Cela faisait précisément une semaine qu'ils erraient dans cette forêt sans fin, ils n'avaient rencontré ni cours d'eau, ni route, ni même aucun signe de vie animale. Peut-être quelques hurlements de loups pendant la nuit, mais lointains. Ils n'étaient pas partis optimistes, mais le peu d'espoir qu'ils avaient accumulé dans les premiers jours flétrissait petit à petit.

Cléo se laissa tomber sur le sol à son tour. Aussitôt, pour s'occuper les mains, il gratta le sol afin de trouver des brindilles, il les craqua une à une. Probablement que cela lui libérait l'esprit. Son visage était maculé d'un mélange de terre, de poussière et de sueur. Ses cheveux auparavant flamboyants avaient perdu de leur éclat, virant sur le brun. Io imagina que son état n'était pas mieux.

- J'ai réfléchi, déclara Cléo.

- Ça t'arrive ? lui lança-t-elle en tant que pique.

Il lui accorda un regard noir avant de détourner les yeux et continuer.

- Vu l'infinité de ce truc, je dirais qu'on est dans la Grande Forêt du Nord, peut-être à la limite du Canada. Tu sais, celle qui a été entièrement replantée dans les années quarante.

- Tu es un fin observateur, ironisa-t-elle.

Ce n'était pas dans ses habitudes d'être si cynique, elle présuma que c'était avant tout la fatigue et le ras-de-bol qui la poussaient à réagir de cette manière.

Cléo secoua la tête, mais ne répondit pas. Il n'avait peut-être pas la force de se disputer avec la seule personne qu'il côtoyait. Les deux participants restèrent près de cinq minutes dans un silence morbide, Io avait enfoui sa tête dans ses genoux et était à la limite de s'endormir. Le jeune homme se leva et la sortit de son demi-sommeil.

- On reprend la route. Cette foutue forêt doit bien s'arrêter quelque part.

Io gémit pour montrer son manque d'envie. Elle concéda tout de même, attrapa le sac qu'elle passa de nouveau à ses épaules et marcha dans les pas de son compagnon de fuite.

Jusque là, elle avait avancé machinalement, regardant ses pieds, fixant les empreintes de Cléo. Pour une fois, elle leva la tête, un détail la gêna et elle s'arrêta de nouveau au bout de trois mètres.

ELITWhere stories live. Discover now