Mai (4)

192 17 0
                                    

Ce samedi matin, alors que j'émerge doucement de ma nuit, j'entends qu'on sonne à la porte de l'appartement. Puis ce sont des pas qui approchent de ma chambre.

– Mathieu, il y a quelqu'un pour toi.

Mon père laisse entrer Fabien. Je ne suis pas gêné du tout, d'être simplement en caleçon et d'avoir certainement une tête affreuse, puisque je viens de me réveiller. Je n'ai plus honte de mon corps, comme c'était le cas en début d'année, surtout parce que je l'ai bien refaçonné. Et puis c'est un véritable ami qui vient, il a le droit de me voir même quand je ne suis pas présentable, nous avons dépassé ce stade depuis longtemps.

– Tout va bien ?

– Je suis prêt, je veux y aller.

Cette phrase serait incompréhensible pour n'importe qui d'autre, mais avec moi il n'a pas besoin d'en dire plus.

– D'accord, juste un instant.

Je passe rapidement sous la douche avant de revenir dans ma chambre où désormais il y a aussi Sébastien. Bon, ils auraient pu me prévenir un peu avant mais j'imagine parfaitement que Fabien a pris sa décision d'un coup, sans lui-même savoir que c'était le jour où il allait porter plainte. Je m'habille tranquillement, sans aucune pudeur, je n'ai pas à en avoir devant mes potes.

– On y va.

Au fond, je suis content qu'il soit venu pour que je l'accompagne. C'est un moment aussi important que difficile et il a envie d'être entouré par ses potes les plus proches, dont je fais désormais partie, c'est ça qui me fait plaisir. Sur le chemin qui mène jusqu'au commissariat, nous ne parlons absolument pas. Difficile de savoir quoi dire, rien ne pourrait vraiment le rassurer.

– Bonjour, je viens pour porter plainte.

– Pièce d'identité s'il vous plaît.

Au passage, ce commissariat est un véritable petit paradis. On dirait que les policiers ont été choisis pour leur physique, de véritables top-modèles. Ou alors c'est juste que j'ai un gros faible pour les hommes en uniforme. Ce n'est évidemment pas le moment de fantasmer. Nous prenons place dans la salle d'attente, il y a pas mal de monde.

– Je ne sais même pas ce que je vais dire.

– Tu racontes les faits, c'est tout.

– Mais ça remonte à loin quand même, c'est sans doute inutile.

– Il n'y a pas encore prescription.

– Et tu te sentiras mieux après. Il faut porter plainte pour ce genre de chose, parce que ces mecs ne s'arrêteront pas.

– Et s'ils ne me croient pas ? S'ils me jugent ?

– Bah, les policiers sont censés être impartiaux.

– Tu sais bien que c'est dans la nature humaine de juger.

– C'est un moment difficile, mais garde en tête que tu le fais pour toi et aussi pour éviter qu'il y ait d'autres victimes.

Une policière sort du bureau et appelle Fabien. On se lève tous les trois.

– Seul celui qui porte plainte peut entrer.

Mince, je pensais qu'on pourrait le soutenir jusqu'au bout. Mais le ton employé par l'agent ne laisse aucune place à la négociation. Alors, avec Sébastien, nous allons juste devoir attendre.

– Tu crois vraiment que sa plainte sera prise au sérieux ?

– Je ne sais pas, Mathieu, mais c'est bien qu'il le fasse. Le traumatisme de ces événements le poursuit, il faut qu'il puisse tourner la page.

Mathieuحيث تعيش القصص. اكتشف الآن