47. Gabrielle.

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La peur est une émotion que je côtoie tous les jours, ces derniers temps. Mais celle-là est plus grande encore. Je dévale l'escalier en courant, comme si j'avais la mort aux trousses. Si on réfléchit bien, c'est tout comme.

— Gabrielle !

On m'appelle, mais je ne réponds pas. Non, je ne m'explique pas ce que je ressens. Une terreur sans nom et de la culpabilité en pagaille. Deux sentiments que j'ai depuis longtemps remisé de côté, mais qui finalement ne m'ont jamais quitté. Je sors en trombe de la maison et m'éloigne vers la droite à la recherche d'un endroit calme et loin de quiconque.

Quand je pense être allée assez loin, je ralentis et prends une énorme goulée d'air pour apaiser cette douleur dans ma gorge. Elle m'étreint avec force et me fait monter les larmes aux yeux. Je passe la main sur mon visage et essaie de me calmer.

Merde, je pleurs ! Fait chier !

La colère vient accompagner la terreur et la culpabilité. Il n'y a rien de mieux que cette émotion, que je maîtrise, pour me sentir enfin moi et pouvoir me débarrasser des deux autres qui me perturbent. Mais je n'y arrive pas ! Ça me ronge de l'intérieur, ça me brûle dans les poumons et je ne comprends pas pourquoi tout à coup, c'est si dur de respirer.

— Putain ! je jure les dents serrées en faisant les cent pas.

J'essuie mes yeux du talon de ma main et renifle devant si peu de retenue de ma part. J'ai l'air d'un être faible, sans combativité, qui se laisse bercer par son humanité dégoulinante de sentiments perturbateurs. Les sentiments, c'est de la merde ! Ils me pourrissent la vie.

— Gabrielle ?

La voix inquiète de Joseph me surprend. Je me retourne vers lui et son visage est grave et son inquiétude plus grande. C'est sûr que me voir pleurer peut étonner, même mon mentor.

— Qu'est-ce qu'il se passe ? Qu'est-il arrivé à Téha ?

Je ne réponds pas tout de suite et préfère fuir son regard interrogateur quelques instants, le temps de me reprendre.

— Gaby ?

Fait chier ! Pourquoi faut-il toujours qu'il insiste ?

— Je... On m'a envoyé ici pour savoir où en était l'état de Téha. Il fallait que je vous prévienne que les Indécis sont aussi sur votre territoire et que le danger est imminent. Mais Aïko persiste à dire qu'il n'y a aucun danger. Bon sang, vous n'avez pas idée du nombre d'ennemis que nous avons éliminé le temps que vous vous prélassez ici !

Mon mentor, habillé tout de lin, tel un propriétaire terrien fier de lui, penche la tête sur le côté pour asseoir sa supériorité.

— Nous avons pris nos dispositions à ce sujet.

— Vraiment ? Parce que tu ne te rends pas compte du danger ! Ils sont des milliers dispersés dans tout l'État ! Ils forment des centaines de petites cellules pour attaquer vos différents points stratégiques.

— Je suis au courant. Pourquoi crois-tu que nous faisons une fête ?

Je le regarde incrédule.

— J'ai fait venir quelques alliés de tout le pays, qui me doivent un service. Ils sont déjà ici depuis deux jours. Arrivés au compte goutte pour plus de discrétion.

— Comment as-tu pu tout prévoir en si peu de temps ?

— Queen a eu le bon sens de me prévenir dès leur départ de la Floride. Mes ressources sont infinies, tu le sais. Et certains de mes alliés vivent la nuit.

Le puma est intelligent. C'est un gros con, mais intelligent.

— Queen savait déjà qu'ils échoueraient ici ?

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