Prologue

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PRÉSENT /2015

Harry connaissait la douleur.

Il connaissait la douleur de tomber de son vélo la première fois et s'écorcher le genou, il connaissait la douleur des parents qui se disputent jusqu'à annoncer leur divorce, il connaissait la douleur des révisions nocturnes entre stress et sueur. Il connaissait la douleur d'apprendre l'hypocrisie de ses amis les plus proches, il connaissait la douleur d'être rejeté par une jolie fille à l'école, il connaissait la douleur d'apprendre le décès d'une grand-mère bien que ce soit le juste ordre de la vie.

Il connaissait la douleur du monde du show-bizz, sa noirceur et sa profondeur souvent discutée mais jamais réellement comprise, il connaissait la douleur de combattre le tourment par des maux — il connaissait la douleur de se surpasser, pour toujours être plus, plus, plus, mais ne jamais être assez. Il connaissait la douleur d'aimer à en crever, de souffrir de ce sentiment à en avoir l'impression de mourir.

Il connaissait la douleur d'être jugé différent.

Mais même s'il connaissait la douleur sous des milliers de formes, même s'il rêvait souvent qu'un médicament supprimant cette émotion soit inventé, rien n'aurait pu le préparer à une telle peine.

Lorsqu'il avait aperçu le prénom de la mère de Niall sur son écran de téléphone, il avait d'abord arqué un sourcil, étonné par un tel appel. Puis comme un sixième sens, son ventre s'était tordu. Il avait décroché. Elle pleurait ; il comprit. Ainsi, une nouvelle forme de douleur s'était ajoutée à la liste d'Harry. La douleur infâme de perdre un de ses plus proches amis et ancien collègue, à seulement 29 ans.

En se réveillant le jour des funérailles, Harry se fit la réflexion que certaines douleurs allaient et venaient et que c'était parfois de se raccrocher à cela : « ce n'est que passager, le temps aidera. » Pour un deuil, il n'était pas sûr de pouvoir croire à cela. On dit souvent que les fantômes des morts peuvent nous hanter, mais Harry comprit que ce n'était pas leurs esprits qui venaient hanter, mais leur mort en elle-même.

— Tu es sûr que tu n'as besoin de rien ?

Harry se frotta les yeux, fraichement réveillé — bien que la nuit de sommeil n'avait pas été réparatrice. Brad était déjà réveillé et levé, en train de préparer son sac de sport qui l'accompagnait partout.

— Je n'ai besoin de rien, répondit Harry.

— Je peux toujours t'accompagner si tu en ressens le besoin.

— Non, non... On a dit que ce serait une cérémonie très privée. Il n'y aura que la famille proche et... nous quatre.

Le brun jaugea sa réponse et acquiesça lentement.

Brad était un bel homme, Harry n'avait jamais tenté de combattre cette pensée. Ce n'était pas la raison principale pour laquelle il l'avait embauché en tant que coach personnel, mais il y avait peut-être inconsciemment une partie de cela tout de même. C'est un bel homme, s'était-il dit lors de leur première séance de sport. C'est un bel homme, s'était-il dit la première fois qu'ils étaient sortis dans un bar sur une tournée. C'est un bel homme, s'était-il dit la première fois qu'ils s'étaient embrassés, bourrés, jusqu'à finir à l'hôtel, sa tête entre ses jambes.

Il n'y avait rien de sérieux entre eux, juste du bon temps et des bons souvenirs à traverser des pays ensemble. Au fond, Harry savait que cela voulait déjà dire beaucoup d'être tout le temps ensemble et créer de tels moments l'un avec l'autre, mais il ne pensait pas à tout cela. Encore moins depuis cette semaine.

Brad termina de remplir son sac de sport et vint s'asseoir à ses côtés dans le lit. Il resta silencieux, comme quelqu'un qui se retient de parler et Harry arqua un sourcil. Le coach soupira.

Cuts deep like paper wounds - Larry StylinsonWhere stories live. Discover now