Chapitre 9

80 8 0
                                    

Ce matin, François se réveilla avec une sensation de picotements au bout des doigts. 

L'excitation le gagnait et le força bientôt à se lever.
Il se redressa sur son lit, et porta la main à sa tête pour gratter le nœud de boucles rousses qui lui servait de chevelure.
Les rayons de lumière orange avaient déjà pénétré dans sa chambre par le trou de la fenêtre, et une légère brise venait effleurer les rideaux tissés.

La pièce était modeste mais bien personnalisée.
Des guirlandes de plumes et de fleurs séchées parcourraient le plafond, donnant des allures de dehors et un parfum rassurant. Des bâtons torturés s'alignaient sur les murs d'argile terreux, souvenirs des meilleures trouvailles avec le troupeau là-bas dans la forêt, à des dizaines de ponts de la maison.
Mais ce qui était le plus remarquable, c'était les parchemins étalés sur les cloisons, gribouillées de dessins oubliés et de mots perdus, en mémoire d'un monde innomé: la surface.

François avait toujours eu une passion pour l'extérieur.
Oh, il n'irait jamais bien sûr, il en avait trop peur.
Mais une fascination s'en dégageait, il s'était sentie inexplicablement attiré lorsque Nana lui en avait parlé quand il était petit.
Elle lui racontait l'histoire de Kimchi, ce mage puissant qui il y a très longtemps avait séparé son âme en Gardiens pour protéger leurs ancêtres.
Il était reconnaissant de son sacrifice bien sûr, sans quoi il ne serait pas ici, à réfléchir au lieu de se mettre debout pour débuter la journée.
Son œuf n'aurait tout simplement jamais existé.
Cependant, il pensait souvent au début du récit, et se demandait à voix basse comment c'était là-haut.
Même si la toute première génération avait eut quelques réminiscences de la vie d'avant à travers les Parts de Kimchi, la transmission s'était amaigrie avec le temps et aujourd'hui peu de gens s'en souciaient encore.

François enfila rapidement une chemise de lin et saisit d'un geste habitué la sacoche de cuir pendue à la porte.
En bas, il apercevait déjà Nana assise à la table en train de préparer le déjeuner.
Ses deux longues nattes blanches descendaient dans son dos pour effleurer sa jupe. Plus elle vieillissait et plus il la trouvait magnifique, cette femme qui l'avait prit sous son aile dès qu'elle l'avait aperçut. Elle qui avait été si patiente avec lui, lui apprenant à marcher debout et à parler avec des mots malgré son retard de l'époque.

Il posa une bise sur sa tempe, et adressa un sourire de ses yeux verts.

" Bon matin, Nana. "

La vieille dame sursauta comme si elle n'était pas habitué à ce qu'il la salue ainsi depuis les dix-sept dernières années.

" François ? Bon sang tu m'as fais peur, je ne t'ai pas entendu arriver. Comment était ta nuit? " demanda t'elle avec un soupçon d'inquiétude.

Le jeune homme s'assit à table, près de la lucarne qui donnait sur le pré. Il essaya de glisser sa main dans le plat pour s'emparer d'un petit pain au fruit et se prit une maigre tape de la doyenne de Contre-Jour.

" Tu sais bien que c'est pour partager avec tout le village. Sois patient. "

Après avoir déduit de son regard qu'il ne parviendrait pas à esquiver la question, François répondit vaguement pour ne pas l'inquiéter.

" Plutôt normale. Ne t'en fais pas, je n'ai pas refait de cauchemar comme la dernière fois.

- Bien."  répondit t'elle simplement, l'air à moitié convaincue.

François lui adressa un sourire approbateur, et se dirigea vers l'entrée pour sortir profiter de son existence.

" J'emmène l'Âme à Plume pâturer avec le reste du groupe. Nous revenons tout à l'heure, je rapporterais de quoi remplir les pots de ta cuisine avec ce que je trouve sur mon chemin. " rajouta le garçon avant de s'éclipser retrouver le lama familial.

Elle l'attendait d'ailleurs impatiemment près du cours d'eau, secouant son plumage colorés de joie.
Quelques unes s'envolèrent dans le pré, et il irait plus tard les récupérer pour fabriquer des attrapes-rêves. Les Âmes à Plumes étaient des créatures réputées pour leurs positivités, et leurs duvets repoussaient brillamment le malheur.
François ne savait pas encore pourquoi mais il le sentait profondément en lui, il allait bientôt en avoir besoin plus que jamais.

L'éveil des IlluminésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant