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Les grilles, séparant la petite rue devant l'entrée de la cathédrale et le jardin, se font violemment exploser par le pare-chocs d'une épave envoyée à toute vitesse.

Le véhicule s'envole en direction des portes qui se font éventrer avec force. Puis les pneus accusent le coup en atterrissant lourdement sur le sol. Ils crissent, des bancs sont renversés avant que, finalement, la petite voiture ne rende l'âme.

À l'intérieur du lieu de culte, au milieu d'une mare de sang, Vahere récite une litanie morbide en brandissant un poignard au-dessus d'une fillette attachée à l'autel. Une aura verdâtre entoure la sorcière et la victime qui semble plongée dans la torpeur.

Le plafond de l'édifice est obstrué par une brume épaisse et tournoyante. On pouvait y voir, comme au travers d'une surface liquide, un monde. Un monde miroir, où il faisait nuit, où des fantômes et esprits s'agglutinent, tous impatient d'apercevoir une brèche s'ouvrir.

Le sang de Suu ne fait qu'un tour, et la masse de fidèles entre elle et sa proie se montre menaçante.

— Des zombis ! Ils n'aiment pas la lumière ! Cri Lufu pris d'un éclair de génie.

La petite lampe est brandie allumée. Alors que le groupe s'attend à voir la foule s'aveugler, tous elle se fige.

— Vous pouvez arrêter le temps ?! La dague tombe des nues, les autres aussi.

— Je savais pas ! s'exclame Max.

Suu comprend que l'effet ne fonctionne que pour les cibles prises dans le faisceau. Elle pose la lampe sur le toit de la voiture pour éclairer au maximum la salle. Mais le rayon ne semble pas atteindre Vahere qui peste et se tourne vers la petite fille pour achever son rituel avant qu'il ne soit trop tard. Mais elle n'a pas le temps de réciter deux phrases que la mère déterminée est déjà à quelques pas.

La sorcière s'interrompt pour tendre le bras et lance son sort de mort quand celui-ci est dispersé dans un nuage de feu fantomatique. Le ricanement lointain du Baron Samedi ricoche dans toute la salle.

Vahere écarquille les yeux, et voit la fureur d'un poing la frapper au visage.

Une lutte commence entre une mère enragée et une sorcière résolue. Surement aidée de quelques sortilèges, la jeune femme en face de Suu se défend avec une hargne.

— Tu ne sais pas à qui tu as affaire ! vocifère la magicienne.

— Rien à foutre ! T'as touché à ma fille pétasse ! répond Suu en cherchant à la maitriser en vain.

— Il ne t'a jamais parlé de moi pas vrai ? Ce père indigne qui m'a abandonné !

Chacune une dague à la main, les blessures ne font qu'alimenter le sang déjà répandu sur le sol. Suu comprend qui est cette jeune femme, mais n'a aucune compassion pour celle qui a tué son amour. Dans leur pugilat la dialogue de sourdes continue :

— Je te pardonnerai jamais, répond Suu en un souffle, mais je n'suis pas une meurtrière comme toi ! Rends-toi !

— Je n'ai pas d'ordre à recevoir !

— Putain arrête tes conneries !

Prise d'un éclair de lucidité, Suu retire son collier d'un geste, passe derrière la sorcière dans un mouvement fluide et lui enfile le bijou autour du cou.

— LUFU ! Hurle Suu.

Sans attendre, l'esprit active son pouvoir et le corps de Vahere s'écroule. Seule son âme est debout, face au tourbillon brumeux. Son propre sang fait partie du rituel, versé par la dague de Suu : les nuages s'écartent pour former un œil de cyclone en leur centre.

Yenka ! [Aventure - Fantastique]Where stories live. Discover now