Chapitre 9

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Flashback 14 ans plus tôt... Priam - 6 ans

Le réveil sonne m'interrompant dans mon sommeil agité. J'ai encore fait le même cauchemar. J'ai encore rêvé qu'Akhan mourait et que j'étais incapable de le sauver. Nous étions à la patinoire et nous faisions une course. Je l'ai laissé me dépasser pour qu'il soit content de gagner mauvais perdant comme il est. J'ai fait attention à ne pas aller trop vite pour ne pas l'épuiser. Je le surveillais et je n'ai constaté aucun signe urgent provenant de sa part. Je me suis retourné pour regarder ma mère qui nous observait attentive.

Le temps que je lui tourne le dos, mon frangin s'est écroulé sur la glace d'un seul coup sans que je m'y attende. Entendant le fracas de son corps sur le sol gelé, je me suis précipité à son chevet et je l'ai tiré de toutes mes forces pour le sortir de la piste. Notre mère a prévenu les secours et nous nous rendions à l'hôpital en vitesse. Je me revoyais quelques années plus tôt, dans la même situation avec l'inquiétude que mon jumeau nous quitte pour de bon. Nous attendions des heures à l'hôpital pour comprendre son état et le médecin qui l'a pris en charge est venu nous présenter ses condoléances, il n'avait pas réussi à le réveiller. Je me suis effondré sur le sol et j'ai crié jusqu'à ce que ma gorge me brûle et qu'une extinction de voix fasse son apparition. Puis je me suis réveillé en sursaut, j'ai jeté un coup d'œil à mon frère qui dormait paisiblement dans le lit à côté.

Chaque soir, je refaisais le même cauchemar, chaque soir j'avais des sueurs froides, j'avais chaud et mon cœur battait à la chamade. Chaque soir dans la nuit, je me réveillais en priant pour que cette situation trop réelle ne s'était pas produit. Chaque soir, j'attendais qu' Akhan s'endorme pour commencer à fermer les yeux. Chaque soir, je m'assurais qu'il allait bien, qu'il respirait normalement avant de m'autoriser à sombrer dans le sommeil. Mon frère ne savait pas que chaque soir j'angoissais à l'idée de dormir, à l'idée de ne pas pouvoir garder un œil sur lui.

Personne pas même mes parents ne savaient à quel point l'idée de dormir me terrifiait. J'avais peur de découvrir le matin à mon réveil qu'Akhan s'était éteint sans que je m'en rende compte.
Cette angoisse de le perdre par manque de vigilance me pétrifiait sur place. La voix de mon frère parvenant à mes oreilles apaise mon esprit tourmenté, et je le rejoins pour prendre le petit déjeuner dans la cuisine. Comme chaque matin, nos parents nous accueillent le sourire aux lèvres et nous préparent nos tartines au Nutella que nous chérissons tant. Une fois le ventre plein, nous nous habillons puis maman nous emmène à l'école en voiture. Nous passons le portail de l'établissement scolaire puis nous nous dirigeons dans notre classe.

Nos camarades se ruent sur mon jumeau pour lui parler. Heureux du monde autour de lui, Akhan discute avec ses amis en m'intégrant dès qu'il peut dans la conversation. Grâce à lui, les personnes de ma classe s'intéressent à moi, à cet instant je suis content de ne pas être invisible. La sonnerie retentit et nous nous installons à nos bureaux. La maîtresse débarque et nous commençons la leçon du jour. Akhan participe dès qu'il connaît la réponse, l'enseignante ravie de son enthousiaste le félicite. Je me demande parfois comment le garçon à mes côtés peut-être mon frère jumeau.

Nous sommes tellement différents que des fois j'ai des doutes concernant notre lien de parenté. Akhan comprend et assimile vite, il est vif tout le contraire de moi. Je mets toujours beaucoup plus de temps que les autres à comprendre une notion et à la rappliquer. C'est comme si mon cerveau était à deux à l'heure. Comme si quelque chose clochait chez moi. Il y a des points dans les leçons qui sont évidents pour mes camarades alors que moi je ne pige rien. J'ai vraiment l'impression d'être un débile dans ces cas là. J'ai le sentiment de ne pas vivre dans le même monde qu'eux tellement il y a un décalage entre nous. Et c'est dur d'être le garçon « bête » comparé à son jumeau qui est « intelligent ». Sans cesse on nous compare tous les deux. Les gens portent toujours des jugements sur nous. On me rappelle souvent qu'Akhan est meilleur que moi dans la plupart des domaines.

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