Chapitre 12 : L'hiver frappe

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L'hiver frappait sur la ville. Le froid engourdissait les plus téméraires et avait rendu presque impossible la circulation en début de journée. Ce n'est qu'en fin de matinée que les rues se dégagèrent, chassant la couche de neige et la glace recouvrant les allées d'asphalte de Bâton-Rouge. Malgré les intempéries, Emy ne lâchait pas sa moto. C'est le téléphone vissé à l'oreille qu'elle pénétra dans la salle de pause le corps secoué par la fraîcheur hivernale. Elle fit un signe de la main à tout le petit monde présent dans la pièce. Inès et Debby lui firent de grands sourires tandis que Pablo levait faiblement le bout de ses doigts, complètement avachi sur la table, terminant visiblement sa nuit. Andréa était à l'extrémité de la table et observait sa binôme en souriant discrètement.

— C'est ça, reprit Emy toujours au téléphone. Je suis du matin samedi donc on pourra passer un bout d'après-midi ensemble si tu le veux.

Elle ouvrit sa veste et posa son casque pour se délester de son poids.

— Parfait, on fait comme ça. À samedi... Moi aussi je t'aime.

Inès et Debby imitèrent le loup en cœur à l'entente de cette déclaration quasi inédite de la bouche de leur supérieure. Emy leva les yeux au ciel en raccrochant.

— Ce que vous pouvez être bête alors !

— Mais nous aussi on t'aime Don Juan, s'amusa Debby.

Andréa se leva sans bruit et passa dans les vestiaires sans un regard pour sa collègue. Emy l'observa en fronçant les sourcils puis interrogea ses vendeurs dès que la porte fut fermée.

— Comment ça s'est passé ce matin ? Elle a l'air... contrariée.

— Plutôt dur, répondit Inès. Le camion a été franchement retardé et la livraison n'a pas du tout pu être traitée. Sam était... chonchon !

— Très chonchon, corrigea Pablo en décollant difficilement son corps de la table.

— Merde, jura Emy. Bon, on ne doit pas être les seuls dans cette panade, on va arranger ça.

Elle s'engouffra sans attendre dans les vestiaires pour rassurer sa précieuse alliée. Elle s'approcha et frôla l'épaule d'Andréa afin de déposer son casque au-dessus de son casier. La jeune femme s'écarta subitement en soufflant. Emy leva les mains, surprise par sa réaction sanguine.

— Tout doux, Clochette. Je n'y suis pour rien si la neige s'est invitée à la fête ce matin.

— Je sais ça, répliqua-t-elle sèchement. J'aimerais juste... Est-ce que je peux me changer s'il te plaît, je me suis tâchée et...

— Je ne t'en empêche pas, la coupa Emy en plantant son regard dans le sien.

Elle y sonda de l'amertume, pire encore, de la colère. Elle se demanda ce qu'elle avait pu lui faire pour qu'elle l'observe de cette façon. Andréa leva les yeux au ciel.

— Ta petite copine ne serait pas du même avis si tu regardais tes collègues se changer dans les vestiaires.

— Ma quoi ? questionna Emy interloquée.

Andréa se retourna et ôta son t-shirt d'un mouvement vif. Le dos nu de la jeune femme mit le feu aux joues d'Emy qui se détourna aussitôt pour reprendre contenance.

— Je ne comprends pas ce que tu racontes, Clochette.

— Don Juan en carton, pesta-t-elle en murmurant dans son dos.

— Attends, c'est quoi le problème là ? s'emporta Emy.

Elle se retourna pour faire face à sa binôme en colère.

Elle est faite de la même matière que les rêvesNơi câu chuyện tồn tại. Hãy khám phá bây giờ