14.

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En entrant dans sa chambre, Dante cogitait encore sur le comportement de Séra. Il avait cherché comment lui en parler toute la journée mais n'avait pas réussi à aborder le sujet loin des oreilles indiscrètes, jusqu'au tout dernier moment où il avait finalement renoncé devant son air exténué.

Pour essayer de se libérer l'esprit, il avait profité de sa salle de bain privée ridiculement luxueuse pour prendre une douche sous une cascade d'eau chaude, allumant la télévision en sortant et choisissant un programme au hasard avant de s'asseoir sur son lit. Une serviette autour du cou pour recueillir l'eau perlant de ses cheveux, il avait ensuite étalé un peu de pommade pour les coups trouvée dans l'armoire à pharmacie sur ses ecchymoses, qui hésitaient maintenant entre bleu soutenu et verdâtre.

Mais il cogitait toujours, et le train de ses pensées n'avait pas cessé quelques heures plus tard alors qu'il se tournait et se retournait dans son lit, cherchant en vain une position qui pourrait l'aider à trouver le sommeil. Il ne songeait qu'à Séra, essayant de comprendre pourquoi elle lui soufflait le chaud et le froid.

Car ces derniers jours, ça ne loupait jamais. À chaque fois qu'il avait l'impression que sa méfiance s'estompait et qu'elle le laissait entrer un peu plus dans sa bulle, elle redevenait aussitôt distante, profitant du dédale de la villa pour l'éviter et surtout ne jamais se retrouver seule avec lui. Un moment ils échangeaient des regards complices, et l'instant d'après elle l'esquivait de toutes ses forces. Il en venait même à envier Astrid. La barmaid semblait être la seule avec qui Séra se détendait visiblement depuis leur arrivée.

Et puis il avait encore en tête ce rêve étrange qu'il avait fait la veille, où des visions de la jeune fille, de son sourire et de ses grands yeux sérieux, se télescopaient devant lui alors qu'il essayait désespérément de l'atteindre sans réussir à la toucher. Même maintenant, il pouvait presque sentir sa chaleur évanescente effleurant sa main tendue. Renonçant à dormir il repoussa sa couette pour s'asseoir, imaginant un instant en regardant la porte que celle-ci était sur le point de s'ouvrir et de révéler l'objet de ses pensées, avec ses boucles en désordre et un de ses t-shirts oversize qui ne suffirait plus à camoufler sa silhouette à ses yeux, maintenant qu'il l'avait vue en maillot de bain.

Secouant la tête, il se frotta le visage pour empêcher son esprit de divaguer plus, grimaçant en rappellant ses contusions à son bon souvenir, et il s'apprêtait à se lever pour se chercher un peu d'eau du robinet lorsqu'un bruit de casse lui parvint depuis l'autre côté du couloir.

Il était déjà sorti de sa chambre quand la tête ébouriffée d'Astrid pointa par l'entrebâillement de la porte d'à côté, rapidement suivie par celle de Virgile au demi-palier du dessus, les trois se concertant rapidement du regard avant que le chuchotement du hacker ne parvienne jusqu'à lui.

— Qu'est-ce que t'attends, va voir !

— Ouai, et appelle nous si y'a besoin.

Pressé par les deux autres, le grand brun s'avança et frappa à la porte de Séra, puis entra quand il obtint ce qui ressemblait fortement à un gémissement de douleur en guise de réponse.

À l'intérieur, il remarqua tout de suite que sur les deux appliques de chevet une seule était encore allumée. L'autre était brisée en deux, l'abat jour en opaline blanche gisant au sol en miettes et le reste de son support en bois réduit en un moignon déchiqueté dépassant du mur. Quand à Séra, elle était assise sur le bord du lit, la respiration encore brouillée, un filet de sang s'écoulant doucement de sa main qu'elle serrait contre sa poitrine.

— Séra, ça va ?! S'alarma-t-il, en se précipitant vers la jeune fille pour constater l'étendue de sa blessure.

Cette dernière recula brutalement à son approche, à la manière d'un animal sauvage.

Nano.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant