1. Briquet

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Je m'étais levée TROP tôt ce matin là. Mon père n'avait même pas levé le pied de son lit, mais ma mère était déjà prête quand je descendais mes valises, très bruyamment. "Fais moins de bruit, l'éléphanteau !" chuchota ma mère. J'avais essayé de bien préparer mes bagages pendant la semaine mais étant la pire catastrophe bordélique vivante sur Terre, j'avais juste tout pris de ma commode et mon armoire et jeté le tas dans mes valises, demandant à ma petite sœur de sauter dessus pour l'aplatir. Sans compter les livres, le maquillage et toutes les chaussures qui donnaient une allure cabossée à mes valises. Douchée, habillée, coiffée et maquillée, je descendis pour manger une banane, ce qui fut mon seul encas. Maman mis mes valises dans le coffre et je la suivis. Une fois en route, je commençais vraiment à stresser.
-"1h30 d'avion ce n'est rien arrête tes conneries" m'avait dit ma mère, qui me voyait stresser sur mon siège. J'en tremblais, j'étais vraiment très nerveuse à l'idée de me débrouiller seule dans une ville où je n'avais personne sur qui compter. J'arrivais à peine à faire du café décent et à allumer une cigarette sans manquer de me brûler le pouce (ou de m'étouffer). Une fois à l'aéroport, j'allai à un Relay pour m'acheter un magazine parce que (évidemment) j'étais en avance. Une fois cela fait, j'allai m'enregistrer et leur posai mes deux lourdes valises sur le tapis roulant. Le vol avait lieu dans trois heures. Il me restait 54% de batterie, n'ayant pas de batterie portable et ne voulant pas me déplacer pour le charger sur un des spots de l'aéroport, je n'écoutais pas de musique. Les gens couraient, marchaient, s'embrassaient, stressaient, regardaient leurs montres, d'autres souriaient mais d'autres pleuraient. Ils étaient seuls, accompagnés. Ma mère me regardait, de ses petits yeux noisette. Elle était toute apprêtée car elle devait aller travailler plus tard. Elle me fit la conversation, palpant mon ennui et mon stress.
-"Alors, tu es prête?"
-"Prête? Pour le vol ou Londres?"
-"Le vol est rapide mon bébé ! Tu me reviendras dans quelques temps, saine sauve et anglaise."
-"Oui mais je stresse un peu pour mon job."
-"Stresser pour ÇA? Tu peux bien garder ce petit, mon amour, c'est la même chose qu'avec ta sœur."
-"Oui mais..."
-"Non sh. Tout est prévu, ne t'en fais pas ma poupée.  Tu resteras comme prévu à l'hôtel pendant deux semaines, afin de t'acclimater et ensuite tu iras vivre chez cette femme qui te demande juste de prendre soin de son bébé pendant quelques temps. Et pendant ton temps libre, tu écriras. Après, si tu restes plus que ça, on envisagera de te trouver un studio, on a déjà épargné pour ça."
Elle me pris dans ses bras et caressa mes cheveux.
-"Je t'aime.", dis-je.
-"Je t'aime aussi ma grande."
Mon téléphone vibra.
al: t'as déjà décollé? tu vas me manquer, jviendrai te voir pendant le week-end, très souvent.
moi: non, le vol est dans au moins 3 heures, il a du retard. ok si t'y tiens mais je pourrai pas te rembourser le coût des billets de train :)
al: tu me rembourseras en nature. 3h tu dis? j'arrive tout de suite bouge pas
Mon cœur battait à toute allure. On s'était déjà dit au revoir, on avait déjà mis les choses au clair sur ce qui allait nous arriver et ça me faisait mal. Je l'aimais de tout mon cœur et m'en séparer était cruel, même si c'était la plus simple des solutions. Il finissait ses études de médecine sur Paris et moi qui avais déjà ma licence en lettres, je devais m'évader. J'avais choisi Londres car cette ville m'inspirait énormément. J'adorais l'anglais et si je finissais mon roman assez tôt, je pouvais envisager de trouver un ou une traductrice afin de le présenter en anglais à une maison d'édition londonienne. J'avais des rêves plein la tête et même si je tenais à ma petite vie tranquille d'ex étudiante avec ses parents fonctionnaires garnie d'un petit ami parfait, je devais m'égarer, pour but de me trouver. Je soupirai et verrouillai mon téléphone.
-"Ma chérie? Je dois y aller, je dois être au bureau dans 40 minutes." dit-elle en se levant et en me prenant très fort dans ses bras. Elle avait les larmes aux yeux. Elle allait tellement me manquer. Même si je n'étais plus petite, j'avais besoin d'elle dans un certain sens.
-"Ok Maman. Je t'aime fort, je t'appelle dès que j'arrive à l'hôtel."
-"Je décrocherai. Je t'aime, prends soin de toi."
Elle me fit un bisou sur le front, serra ma main et s'en alla.
Alex arriva 20 minutes après. Dès qu'il me vit, il me prit dans ses bras. Il avait l'air tout triste, mais tout heureux de me voir. Je l'étais aussi.
-"Comment tu fais pour être aussi belle dès le matin, toi ?"
-"J'en sais rien, ça doit être le stress qui a des effets mélioratifs sur mon visage."
Il m'embrassa comme s'il n'avait pas fait ça depuis des siècles, et me prenant au jeu, j'oubliais tout ce qui me tracassait et commençais à fondre dans son étreinte.
-"Tu vas me manquer bébé." déclara-t-il en séparant nos lèvres.
-"Toi aussi Al."
-"Il y a une question qu'il faut que je te pose."
-"Je t'écoute."
-"Est-ce que tu comptes tourner la page une fois à Londres? Je veux dire est-ce que tu pourrais t'accorder une autre rencontre amoureuse?" demanda-t-il avec de l'inquiétude dans ses beaux yeux caramel.
-"Alex...On en a déjà parlé. On est tous les deux libres de faire ce qu'on veut."
-"J'aimerais bien t'épouser."
-"Tu regretterais de m'avoir choisie, crois-moi. Je sais même pas faire un œuf."
Je ris. Je m'avançai et l'embrassais encore. On s'était assis, lui sur le siège et moi sur ses genoux. Il m'avait encerclé la taille avec son bras et jouait avec mes cheveux, son autre main sur ma cuisse. Il commença à la caresser. Il m'embrassait partout, sur les joues, le nez, le front la bouche, les paupières, le cou des fois.
-"Tu veux pas qu'on aille quelque part où les gens ne nous regardent pas comme si on menait un assaut à la pudeur?" proposa-t-il en m'embrassant le cou.
Je ris très fort.
-"Ok, je te suis."
Il me pris la main et je pris mes bagages à main. Nous nous dirigeâmes vers l'ascenseur qui nous amena au parking. Nous marchâmes et je vis sa voiture, son immense 4x4 qu'il avait dû prendre à son père. Je savais ce qu'il avait derrière la tête.
-"Monte à l'arrière, les sièges avant son trop éloignés." dit-il en ouvrant la portière.
-"Ok don Juan."
Il me suivit, il referma la portière. Il s'avança vers moi et recommença à m'embrasser, cette fois avec plus d'ardeur. Il me mit sur ses cuisses et il approfondit le baiser. Prise d'une vague de passion, je pris son visage entre mes mains et l'embrassais d'avantage pendant qu'il bougeait ses mains de mes hanches jusqu'au milieu de mon dos où il dégrafa mon soutien-gorge à travers mon haut. Il l'enleva et passa ses mains en dessous de mon t-shirt et commença à toucher ma poitrine. J'arrêtais de l'embrasser sur les lèvres et le regardais dans les yeux.
-"Qu'est ce que je t'aime." dis-je.
J'embrassais son cou et commençais à le mordiller. Sa gorge avait des tâches violettes et des traces de morsures. J'ébouriffais ses cheveux bruns et l'embrassais de plus belle.
-"Je pense que...c'est le bon moment." annonça-t-il, à bout de souffle.
Je souriais et m'abaissais pour déboutonner son pantalon. Il rit légèrement et releva mon menton avec son index.
-"Je parlais pas de ça bébé."
-"De quoi alors?" dis-je en riant et en me remettant sur lui.
Je titillais le col de son t-shirt et l'embrassais. Il essaya d'en placer une mais il dû me repousser, ce qui avait l'air d'être dur.
-"Ok je me lance. Il m'écarta délicatement et je l'entendais ouvrir la boîte à gants derrière moi. J'en profitais pour remettre mon soutien-gorge. Une fois devant moi, il cachait quelque chose derrière son dos.
-"Qu'est-ce que c'est?" demandais-je, excitée mais effrayée.
-"Flippe pas, c'est rien d'officiel, vu la situation mais je voulais qu'on se promette quelque chose."
-"Attends...Quoi?"
Il me montra l'écrin qu'il avait caché. Un écrin bleu nuit, en velours qui venait de Pandora. Je commençais vraiment à paniquer.
-"Alex??? C'est quoi ça???"
-"Je te demande pas en mariage. Je veux juste qu'avec cette bague, tu me promettes de rester mienne."
Il l'ouvrit et je découvris la bague. Elle était en argent, et portait une énorme tourmaline. Je pris la boîte dans mes mains. Elle était parfaite, je l'aimais vraiment beaucoup. La pierre était une de mes favorites.
-"Merci, je l'aime beaucoup. Mais...Alex...Tu sais très bien que je ne peux pas te promettre ça. Je pars pendant des mois, et toi tu restes ici finir tes études. Même si tu pourras venir me voir, je préfères que tu te consacres à toi même et je sais que tu veux la même chose pour moi. C'est tout bien réfléchi, je ne peux pas. Je ne peux pas nous faire attendre, alors qu'on sait qu'entre nous c'est...impossible pour l'instant. On va se tuer Alex. J'ai beau t'aimer de tout mon cœur, je peux pas nous faire ça. Laisse-moi partir, et libre. S'il te plait. Désolée."
Il sourit, déçu mais compréhensif. Il n'eut pas de réaction immédiate, il glissa tout de même la bague à mon majeur, sûrement pour ne pas me faire ressembler à une future mariée sans doute. Je pris mes bagages à main et l'embrassai pour la dernière fois.
-"Je t'aime.", dit-il quand j'enlevais mes lèvres des siennes.
-"Je t'aime aussi, Alex."
Et je m'enfuis. C'était beaucoup plus simple. Il n'avait pas le choix. Même s'il resterait mon premier petit ami, toute notre histoire était du passé maintenant. Je ne pouvais rien lui promettre et je savais ce que je pensais quand je disais cela, cela aurait fait cinq ans de relation. Et même si je pleurais, je me sentais libre. Légère. J'allai dans les toilettes qui étaient près des douanes pour me rafraîchir. Mon vol était dans moins d'une heure. L'embarquement allait bientôt se dérouler. En me lavant les mains, la porte s'ouvrit. Avec des bruits de talons. Je tournais la tête et vis une femme, de mon âge à peu près, avec des escarpins, habillée tout en noir, très classe. Elle avait les cheveux noirs, un peu ondulés et des yeux verts maquillés, qui me scrutaient. Elle avait l'air surnaturelle, magnifique. Et moi, j'avais l'air ridicule, décoiffée parce que j'avais presque couché avec mon ex, et mes yeux étaient humides. Elle s'avança vers moi.
-"Vous auriez du feu? J'ai perdu mon briquet."
-"Oui bien sûr, patientez deux secondes."
Sans me sécher les mains, je fouillais dans mon sac et trouvais ce qu'elle désirait. Elle me remercia poliment et alluma sa cigarette, même si c'était interdit de fumer dans les toilettes. Je ne dis rien. Elle me le rendit et fuma la première latte, expira la fumée tout en essayant de ne pas me viser.
-"Vous attendez le vol pour Londres?" demanda-t-elle
-"Oui, j'imagine que vous aussi."
-"En effet, j'y vais pour exposer mes toiles."
Elle souriait, fumait, et me toisait.
-"Sérieux? Wow. Quel genre ?"
-"Art moderne. Vous vous y connaissez?"
-"Un petit peu, mais je suis écrivaine."
-"Voyez vous cela? Une écrivaine. Quels sont vos artistes préférés?"
-"En peinture ou en littérature ?"
-"Allez pour les deux, c'est toujours intéressant d'en apprendre sur des femmes comme vous."
Elle s'était assise sur le plan de travail encadrant le lavabo et balançais ses pieds.
-"Comme moi ?"
-"Répondez d'abord à ma question."
-"Guillaume Musso et Monet."
-"Deux grands chefs."
-"Sans doute. Répondez à ma question, maintenant."
-"Une femme comme vous ? 1m70, cheveux noirs et yeux ébène, qui vient de pleurer pour je ne sais quelle raison, habillée sobrement mais assez classe pour un vol d'une heure et demi, vous portez une bague à votre majeur, ce qui prouve que vous avez été plus ou moins demandée en mariage? Pourquoi est ce qu'elle est sur ce doigt là? Vous êtes une jeune femme qui prête un briquet à une femme qui fume dans les toilettes alors que c'est interdit, et elle ne dit rien. Vous avez aussi des suçons dans le cou, ce qui..."
-"QUOI?!"
Je me tournais encore vers le miroir et inclinais mon cou, en effet il y avait quelques marques. Je pris mon correcteur qui se trouvait dans mon sac à main et en appliquais sur les tâches. Elle me regarda faire.
-"Vous permettez?" demanda-t-elle. Sans attendre ma réponse, elle approcha sa main de ma peau et frotta avec son auriculaire. Elle avait des manières très douces et sentait extrêmement bon.
-"Vous aviez des traces."
-"Merci, au moins celles-là sont parties."
Elle pouffa.
-"Vous êtes aussi bien décoiffée, j'imagine que vous avez sans doute dit adieu à quelqu'un qui vous aime." continua-t-elle, en riant. Je riais, gênée.
-"Vous êtes peintre ou psychologue?"
-"On me demande ça souvent. Très bien, j'arrête ici. J'ai un dernier coup de fil à passer, j'imagine qu'on se verra dans l'avion."
Elle me fit un clin d'œil, jeta son mégot dans une des poubelles et sortit. Elle laissa derrière elle son odeur succulente, son charme et l'odeur de tabac qui lui allait parfaitement.

// note de l'auteur: c'est le premier écrit que je publie et certaines parties pourront changer, ainsi que la couverture. deuxième chapitre en cours :)
-@laurensdeluxe (twi) \\

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