_ Pardon.
Je soupire en me levant du lit pour aller dans le salon. Je m'allonge dans le canapé en reprenant là où je m'étais arrêtée dans la lecture de mon livre d'amour. Aaron ne tarde pas à faire une énième apparition.
_ Pardon.
Encore une fois, je me lève en posant mon livre sur la table basse. Je me dirige dans la cuisine pour préparer le dîner. J'ouvre les placards et constate qu'il n'y a plus rien à manger. Juste des pâtes. Ça fera l'affaire.
_ Pardon.
J'ignore son excuse. Je laisse couler l'eau chaude dans la casserole puis la pose sur la plaque de cuisson. Je sens qu'il me scrute longuement. Il vient s'adosser sur le plan de travail à côté de moi.
_ Pardon.
Il m'énerve.
_ T'es lourd, Aaron.
_ Excuse-moi.
_ La pauvre fille, que je suis, s'en fout.
_ C'est faux.
_ C'est vrai.
_ Tu m'en veux ?
Je ne réponds pas.
Evidemment que je lui en veux. Sa crise de tout à l'heure m'a fait réaliser certaines choses. La plus importante, c'est l'avertissement que tout le monde me disait au début de notre rencontre. Même Isaac savait qu'il avait un sale caractère. Et je ne les ai pas écoutés. Parce que j'espérais qu'ils mentaient. Mais ils avaient raisons. Même lui. Il détruit tout. Il est comme la tempête qui réduit à néant un village. Ce village, c'est moi. Il veut me garder pour lui tout seul et ça ne me va pas. Je ne lui appartiens pas ! Pas entièrement du moins. J'ai le droit à un peu de liberté. Mais Monsieur ne comprend pas ça. Alors j'ai bien l'intention de lui faire comprendre moi-même.
_ Si tu ne m'en veux pas, je peux te faire un câlin alors ?
Il ouvre les bras et s'approche de moi. Je me décale juste à temps. Il est mi-amusé, mi-vexé par ma réaction.
_ Je savais que tu m'en voulais.
_ Pourquoi tu poses la question alors, grincé-je.
_ Pour que tu me répondes.
_ Et qu'est-ce que ça change ?
_ J'entends le son de ta voix.
Ces paroles me font légèrement sourire. Il sait y faire.
Lentement, il se place derrière moi alors que je cuisine puis il glisse ses bras autour de ma taille. Il m'attire contre lui. Mon dos touche son torse. Son menton repose sur mon épaule. Je sais que ça ne sert à rien de le repousser, il continuera jusqu'à ce que je craque. Il regarde ce que je fais silencieusement. Son souffle régulier s'abat contre mon omoplate dénudée.
_ Je suis désolé.
Il dépose doucement ses lèvres dans le creux de mon cou. J'incline la tête involontairement et ferme les yeux. Merde ! Comment lui tenir la tête dans ces conditions ?
_ Tu m'en veux encore ?
_ Oui, dis-je plus faiblement que je l'aurais souhaité.
_ Je t'aime.
_ Ce n'est pas en t'excusant ou en me disant que tu m'aimes que tu seras pardonné.
_ Comment alors ?
_ Laisse moi avoir des amis, Aaron, répliqué-je en me tournant pour être face à lui.
Il esquisse un sourire et resserrant son étreinte sur mes hanches.
_ À t'entendre, on dirait que tu n'as personne. Tu m'as moi. Et Cole. Et ton frère. C'est déjà bien assez.
_ Mais vous êtes plus vieux. Et même, ce n'est pas pareil. Je veux des amies filles. J'ai perdu mes deux meilleurs amis cette année. J'ai besoin de retrouver une bande de potes avec laquelle je pourrais sortir. Est-ce si dur à comprendre ?
Il réfléchit quelques instants en inclinant légèrement la tête et en fermant un œil à moitié. Il est tellement mignon comme ça.
_ Non ça ne l'est pas, finit-il par dire. Mais tes nouveaux potes, je ne les aime pas. Surtout l'indien.
_ Zachary.
_ Ouais, je m'en cale de son prénom de merde. C'est un connard. Il te regarde comme un chien regarde son os et ça me saoule. Je devais lui faire comprendre que tu n'es pas libre et qu'il n'a pas intérêt à tenter quoi que ce soit avec toi. Sinon, je le bute.
_ Après le frère des cavernes, c'est le copain maintenant, marmonné-je.
_ Quoi ?
_ Laisse tomber. Je sais me défendre toute seule, Aaron. Et puis même, ce con ne m'intéresse pas. Personne d'autres que toi ne m'intéresse. Tu es celui que j'aime et tu le sais. Mais tes crises me rendent folles. Tu es lourd quand tu t'y mets.
_ Je sais. Mais tu le savais avant de sortir avec moi.
_ C'est vrai.
_ Alors ne te plains pas.
Je me retourne pour reprendre là où je m'étais arrêtée. Aaron reste où il est jusqu'à ce que le repas soit prêt. Nous nous posons sur le comptoir qui sépare la cuisine du séjour.
Nos regards se croisent quelques fois. Je ne peux pas me retenir de rire quand il fait une tête très bizarre. Je dirais que c'est très proche d'un phoque. Il fait les yeux ronds et tire une tête épique. Je pleure de rire alors qu'il ricane. Ce garçon ne sait pas être sérieux.
Nous finissons de manger dans la bonne humeur. Je mets à laver nos assiettes alors qu'il s'occupe du reste.
Au soir, nous nous posons dans le canapé chacun de son côté. Mes jambes sont posées sur les siennes et il me fait des papouilles sur ma peau nue. Je traîne un peu sur les réseaux sociaux. Sur Facebook, je suis abonnée à beaucoup de pages et l'une d'entre elles publie souvent des conneries. Je souris en voyant l'une d'elle.
_ Qu'est-ce qui te fait rire ?, me demande Aaron.
_ Rien, souris-je. Un gars qui affirme que les meufs sont plus accros au sexe que les mecs.
_ Et ?
_ C'est faux tiens.
Il s'esclaffe. Je lui lance un regard noir. Il est sérieux là ?
_ Vous les meufs vous êtes des vraies nymphos, c'est ouf.
C'est à moi de rire maintenant.
_ T'es vraiment malade, mon pauvre Aaron. Tu es le premier à vouloir qu'on couche ensemble.
_ M-O-I ?! Qu'on baise ?! Putain tes pâtes devaient être avariées parce que tu débloques complètement.
Il ment. C'est évident. Et j'ai raison. Sur toute la ligne.
_ Ah ouais ? Alors prouve-moi que tu ne penses pas qu'à ça.
_ Comment ?, insiste t-il avec ce fameux air de défi.
_ Grève du sexe. Le premier qui craque a perdu.
Son visage se décompose un instant.
Ah ça le fait chier hein ! Tant mieux. J'ai raison et je le sais. Puis il se reprend et sourit.
_ Parfait.
_ Parfait.
On va bien rire.
VOUS LISEZ
Coloc avec mon meilleur ennemi
Teen FictionŒuvre sous copyright - Coloc avec mon meilleur ennemi © - 2016-2021 À présent, deux ans se sont écoulés depuis leur rencontre. Les voilà réunis une seconde fois, mais c'est à l'université que notre couple favori se trouvera. Ils vivent paisiblement...