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Je la regarde dormir depuis un long moment.
Quand est-ce que tout cette merde va finir ?
J'en ai marre. J'ai envie de vivre avec elle. Je veux la serrer dans mes bras. Pas pour la rassurer. Juste l'avoir contre moi.

Je n'ai jamais eu de petite copine. Jamais.
Oh Papa m'a présenté plein de jeunes femmes bien sous tous rapports.
Jolies mais sans excès. Polies, jamais un gros mot. Obéissante, j'en étais certain. Mais d'une bêtise crasse.
Rien à dire.
J'ai été un gentil garçon, je les ai rencontrées. J'ai supporté leurs discussions insipides. Pour ne pas le mettre en colère.
Quand il a voulu me marier avec Séraphine, je n'ai pas pu me retenir. Je m'en veux. Elle ne méritait pas cette réflexion. Dire que notre chien était plus intelligent qu'elle,  était méchant. Réaliste mais méchant. Elle a beaucoup pleuré. Et moi aussi. Dix coups de ceinture.
Après,  il a cessé de me présenter des filles. Et je n'ai pas cherché à en rencontrer. Elles ne lui auraient pas convenu de toute façon.
Quand il a accepté que je parte. J'en ai profité. Je suis plutôt beau gosse. Mes yeux noirs plaisent apparemment. Mon allure sombre aussi.
J'ai eu une éducation irréprochable. Politesse. Respect des autres. Maman a été exemplaire. Une très gentille femme paraît-il. Moi, je l'ai très peu connue. Après la naissance de Ben, elle vivait dans sa chambre. Préférant la compagnie de la bouteille que celle de ses fils. Papa m'a annoncé sa mort j'avais huit ans. Benjamin six ans.
Après Papa a pris notre éducation en mains. Aidé par des gouvernantes qui rajeunissaient au fil des années. 

Je ne me suis jamais attaché à une fille. Mais je sais me tenir. Une promenade, un restaurant. Et surtout ne pas mentir. Préciser qu'il n' y aura pas de suite. Je ne suis pas un goujat.

Et puis j'ai croisé Lisbeth. Et je ne l'ai plus lâchée.

- Qu'est-ce qui te fais sourire ?

- Rien de très important. Tu es magnifique, mon cœur.

- Ça fait longtemps que tu es là ?

- Je n'en sais trop rien. Je te regardais, et après mon esprit a dérivé.

- Vers quelles contrées ?

- Mon passe, soupiré-je.

- Oh ! Tu m'en parleras un jour ?

- Je te le promets. Tu as bien joué avec Nils ?

- Oui. Il t'a dit... Bien sûr. Ce n'était rien. Il m'est arrivé de faire ce genre de jeux avec Sastus. Cela m'a fait mal d'y penser. Est-ce que je vais réagir à chaque souvenir ?

- Tu ne veux pas les voir apparaître ?

- Bien sûr que si ! Mais pourquoi je ne me rappelais de rien ?

- Le cerveau est une machine extraordinaire. Tu n'étais pas en état d'accepter ces souvenirs. Tu as mis toute ton énergie dans ton évasion. Dans ta survie. Tout le reste, tu l'as occulté. Volontairement.

- Et maintenant ? Tu crois que j'ai la force ?

- Je ne sais pas. Laisse-les sortir. Je serai là. Il y aura toujours quelqu'un.

- As-tu trouvé Ben ?

- Oui. Notre père l'a appelé. Avec le téléphone d'une copine de Benjamin.

- Il lui a fait du mal ?

- Non, mon cœur, ne te tracasse pas. Juste un coup de pression.  Nils a pris des précautions depuis.

- Il lui a dit quoi ?

- Toujours la même chose. Il veut me récupérer.

- Tu savais que Nils était si puissant ?

- Oui. Il est à la tête d'un énorme consortium. Marvis society. Pourquoi cette question ?

- Tu connais tous ces gens. Pourtant, tu es différent d'eux. 

- Je ne me suis jamais senti à ma place dans ce milieu. Je pense que je n'aurai jamais eu cette relation avec Nils, si je ne le connaissais pas depuis si longtemps. Je lui fais entièrement confiance.

- Ce n'est pas cela. Il est juste impressionnant.

- Vraiment ? Il sera très heureux de cela. Il t'apprécie, tu sais !

- Je ne sais pas. J'ai parfois l'impression qu'il essaye de comprendre.

- Comprendre quoi ?

- Ce que tu me trouves !

- Ah non. Ça, c'est ce que tu penses, toi mon cœur !

- C'est exact ! Il va se passer quoi maintenant, Dylan ?

- Ton frère et mon père sont en contacts d'après les infos de Nils.

- Bien sûr. Ils se ressemblent. Ils ont le même genre de vie. Et si on leur donnait ce qu'ils veulent ?

- Tu veux me livrer à mon père ?

- Ce n'est pas drôle Dylan. Toi et moi.

- Vas y, je t'écoute.

- Ton père te veut et mon frère veut me récupérer. Ils ne nous lâcheront pas avant d'avoir réussi. J'en ai marre de fuir.

- Et tu comptes faire comment ?

- J'avais pensé à Sastus en premier lieu. Mais je ne suis pas assez sûre de lui.

- Pareil. Je ne veux pas avoir à le surveiller.

- Bob ?

- Mon père ne le croira pas.

- Al ? Il est fiable. Il est en contact avec mon frère. Et il est capable d'affronter ton père, tu crois ?

- Je sais pas. On va leur en parler ?

- Tu es conscient qu'ils ne vont pas aimer ?

- Je crois qu'ils vont nous étriper, oui !  Mais après tout, nous sommes les premiers concernés.

Nous avions raison. Ils n'ont pas du tout apprécié cette putain de connerie comme a dit Bob. Puis, après avoir discutés, l'idée a été décrétée pas si idiote que cela.
A une condition, pas question que nous allions chez eux. Al serait le seul à décider de l'endroit. Nils avait  pas mal de locaux disponibles. Il fallait en préparer deux. Micros, vidéos. Cette fois serait la dernière. Nous allions les donner à la police. Ils allaient enfin payer.
Nous étions tous du même avis.

Une question restait en suspend. Sastus. Avec nous. Contre nous.
Nous n'avions pas droit à l'erreur.

LibreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant