Chapitre 50

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                                                              Arlun


La peur au ventre, je fixe les navires ennemis qui se rapprochent à grande vitesse de nos drakkars et m'accroche au bastingage arrière pour ne pas tomber à l'eau alors qu'ils nous percutent violemment. Les francs se jettent bientôt sur les plateformes installées à l'avant de nos navires tandis que les guerriers vikings gueulent le nom de nos Dieux.

La bataille s'engage aussitôt, emplissant l'air de bruits assourdissants, entre les coups de fer échangés, les hurlements, les chocs des collisions entre navires et le bruit des flèches qui fusent. Je n'entends même pas ce que se met à hurler mon voisin, un homme immense et fort comme un ours qui s'avance vers les francs pour recevoir lui aussi sa part d'honneur. J'ai les mains moites de peur, le cœur qui bat fort et je cherche des yeux Björn pour me rassurer un peu.

Je le reconnais aisément, le voyant combattre vaillamment sur la plateforme aux côtés de ses parents. Il donne de grands coups de hache à droite et à gauche, dominant le monde de sa haute taille. A ses côtés, Lagertha ressemble vraiment à une Valkyrie avec son bouclier qui repousse l'ennemi et son épée qui taille dans les chairs par la suite. Quant à Ragnar, ses haches découpent sans relâche, coupant des bras, des jambes, des gorges. A les voir combattre ensemble, faire front devant l'ennemi toujours plus nombreux, on croirait que tout est possible, qu'ils sont invincibles...

Soudain, un géant brun vient se mêler à la bataille et je reconnais aussitôt Rollo malgré son ridicule habit franc. Le regard des deux frères se croise et ils se rapprochent rapidement l'un de l'autre pour commencer à se battre à la hache. Malgré la différence de taille et de masse, les deux rivaux sont de même force et durant de longues minutes, ils bataillent avec rage, cherchant une faille chez l'adversaire, une faiblesse inexistante. Vite désarmés, les deux frères se mettent à combattre à mains nues, s'envoyant des coups plus puissants les uns que les autres et qui me font frémir malgré la distance. Je comprends alors que c'est entre eux, une lutte à mort et qu'un seul en ressortira vivant...  

On me bouscule tout à coup et je réalise avec surprise que les francs sont à présent entièrement sur le drakkar et vois l'un d'eux venir me faire face

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On me bouscule tout à coup et je réalise avec surprise que les francs sont à présent entièrement sur le drakkar et vois l'un d'eux venir me faire face. J'ai peur, je tremble et pourtant, l'instinct du combat reprend vite le dessus.

Je riposte à ses attaques en grognant, luttant pour ne pas céder sous la force de ses coups tout en maudissant cette fichue robe qui me gêne dans mes mouvements. En reculant, je me prends soudain les pieds dans les plis du tissu et tombe au sol en levant ma hache devant mes yeux au moment où le franc abat son épée sur moi. Je pousse un hurlement rauque en tentant de résister tant bien que mal alors que sa lame descend lentement vers mon visage, quand soudain, les yeux du soldat s'agrandissent d'un coup. Il s'effondre au sol juste à côté de moi au bout de quelques secondes et ahurie, je regarde Björn qui me tend la main pour m'aider à me relever. En me faisant un sourire en coin, il vérifie d'un coup d'œil que je n'ai rien, avant de vivement se retourner pour parer l'attaque d'un autre assaillant, me faisant un rempart de son corps.

En entendant un hurlement tout proche, je me tourne à mon tour et vois un autre soldat fondre sur moi, l'épée levée. Je pare ses attaques, donne à mon tour de violents coups qui finissent par avoir raison de sa défense et souris furtivement en le voyant basculer par-dessus bord.

Un instant, j'observe son corps qui flotte sur la Seine avant de lever les yeux vers un autre drakkar à seulement quelques dizaines de mètres du nôtre, où les combats font rage également. Soudain, j'avise Erlendur qui une arbalète dans les mains, avance le long du bastingage d'un air décidé avant de s'arrêter et de tranquillement, recharger son arme. Il lève alors les yeux dans ma direction en se mettant en position de tir, son arme pointée dans ma direction et je me sens frémir voyant son regard froid et déterminé. Un regard de tueur...

Il prend tout son temps, visant un point sur ma gauche et je tourne la tête pour voir sa cible, constatant qu'avec horreur que c'est Björn qu'il vise ! Sans réfléchir, alors que le trait d'arbalète part, je me décale en courant et me mets sur la trajectoire du tir pour protéger Björn, regardant Erlendur droit dans les yeux.

Comme au ralenti, l'épaisse flèche me percute juste au-dessus du sein gauche, me donnant l'impression de m'ouvrir en deux. La bouche entrouverte, je m'accroche au bastingage en baissant les yeux vers le carreau d'arbalète, sentant la douleur irradier dans tout mon corps. Je porte une main tremblante vers la flèche qui vibre encore et relève les yeux vers Erlendur qui abaisse lentement son arbalète, un petit sourire ravi étirant ses lèvres.

Mon propre sang commence à maculer ma robe et je sens les battements de mon cœur s'accélérer douloureusement alors que ma respiration se fait plus difficile... J'ai la tête qui tourne et soudain, plus aucune sensation dans le corps...

Je n'ai même plus la force de me retenir au bastingage et bascule dans l'eau sans même réaliser ce qui m'arrive.

Plus rien ne semble m'atteindre, j'ai l'impression de rêver... Je ne ressens même pas la morsure de l'eau froide et encore moins le puissant courant de la Seine qui commence déjà à m'éloigner du drakkar.

Je vois juste Björn se pencher par-dessus la rambarde en hurlant mon nom, s'avançant le long du bastingage pour suivre ma progression en tendant sa main vers moi. Je ne comprends pas pourquoi son si beau visage est décomposé par la souffrance et pourquoi ses joues sont inondées de larmes. Je ne sais même pas pourquoi, j'ai moi aussi des larmes qui perlent de mes yeux et qui vont se perdre dans la Seine.

La bouche entrouverte sur un souffle douloureux, je fixe le ciel bleu au-dessus de moi durant quelques instants avant de lentement fermer les yeux...

La bouche entrouverte sur un souffle douloureux, je fixe le ciel bleu au-dessus de moi durant quelques instants avant de lentement fermer les yeux

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Elsker Nord (l'amour du nord)              livre 1Where stories live. Discover now