Chapitre Dix-Neuf

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Le directeur écoutait attentivement ses dires, sans jamais détourner ses pupilles félines et dilatées par l'obscurité de son interlocuteur. Cette dernière ne cessant plus l'élocution brillante et détaillée du portrait physique et moral de son frère jumeau. Il enregistrait et analysait minutieusement chacun de ses mots, chacune de ses paroles.

Il mesurait au compte-gouttes la cohérence de ses phrases, les liens qu'il faisait entre elles, les éléments, les tournures, le ton, la voix, le regard, la gestuelle. Tout, son pouvoir d'écoute n'avait selon lui jamais été aussi alerte, son œil absolu, charismatique et naturel, son regard perçant désarmait le jeune homme maquillé. Il faisait virevolter ses pupilles ébène dans toute la pièce pour ne jamais avoir à affronter trop longtemps ces ferventes dagues de diamant noir qui le perçaient.

Qui harponnent mon cœur. pensa Baekhyun 

Il fit mine de ne rien avoir relevé mais, quelque chose lui avait sauté aux yeux, un illogisme si aberrant qu'il s'étonnait. Elle qui d'habitude mesurait tant ses paroles, filtrait tant ses mots, ne laissait jamais échapper la moindre trace d'information personnelle, acharnée et aussi méticuleuse qu'un policier dans une affaire criminelle, menait le sujet à sa guise quand il la laissait faire pour se distraire, pourquoi ne semblait-elle plus rien maîtriser à présent?

Pourquoi lui donner autant de détails si précis, si pointilleux, comme s'ils étaient plus connus et d'actualité qu'il ne le pensait? Pourquoi connaissait-elle autant le ressenti le plus profond de Baekhyun alors qu'elle a clairement stipulé n'avoir quasiment jamais conversé avec lui?

Comment pouvait-elle en savoir autant sur quelqu'un qui ne lui a jamais rien confié ?

Y aurait-il des événements passés aux oubliettes à cause de son amnésie?

Ce qui ravit en revanche le cœur fatigué du directeur, était le visage radieux de la personne qui lui faisait face, qui semblait maintenant si à l'aise et détendue. Comme si elle avait jeté l'éponge au visage de l'inquiétude et de la méfiance pour laisser place à une personne sereine et ouverte, et bon sang, qu'il aimait cela.

Bientôt, Baekhyun termina son histoire, et Chanyeol ne lui montra aucun signe de doute ou d'incrédulité, travailla même sur son regard pour lui témoigner de la douceur, sa chaleur.

-Pourquoi vous m'écoutez, Monsieur Park? dit le jeune homme, un peu plus tard, stupéfait d'avoir toujours autant l'attention du directeur.

Ses mots le surprirent, le clouèrent sur place, ses yeux exorbités épiaient les iris que le soleil faisait miroiter de nuances dorées. Il refoulait plusieurs émotions à l'intérieur de lui, il luttait contre sa personne, contre ce regard qui a dévasté si aisément tout son self-control, tout son jeu d'acteur pour ne pas paraître surpris s'était désintégré. La voix fluette sortant de ces lèvres rosées, fines et pulpeuses, ne trahissait aucune once de méchanceté, de mépris ou de méfiance et pourtant, avait résonné comme une détonation dans le cœur sonné du pauvre Chanyeol pas si implacable, finalement.

La perdition se lisait sur ses traits aussi facilement que dans un livre pour enfant, les rares qu'il pouvait lire dans la petite école près de son minuscule village dans le fin fond du Wisconsin, avec des images colorées.

La prétendue Taeyeon ne regardait pas avidement la visible vulnérabilité émotive de son supérieur genou à terre près d'elle. Elle ne s'en délectait pas non plus, elle n'en jubilait aucunement. Son regard était au contraire d'une douceur incomparable, une caresse qui frôlait le visage de Chanyeol avec une délicatesse infinie.

Yes, Mr. Park || chanbaek Où les histoires vivent. Découvrez maintenant