Les Rapides

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Wyndt se coucha très tard car il dû se plier au (bien légitime mais désagréable) remontage de bretelles de la part de Marie. Il n'arriva pas à s'endormir car son esprit bouillonnait trop et, alors qu'il commençait enfin à se calmer, un bruit suspect le tira hors de sa torpeur. Le frottement de pas assourdis résonnait dans l'escalier ; la porte s'ouvrit maladroitement, ramenant vers le lit l'air de la cuisine parfumée de tourte poireaux-bœuf-poivrons.

« Qu'est-ce que tu fais là ? » soupira Wyndt en se redressant pour allumer la lumière de sa lampe de chevet en se frottant un œil.

Sael plissa les yeux en faisant la grimace puis désigna Dolce, couchée au pied de la porte qui menait à l'étage.

« Dolce veut me rejoindre » prétendit l'adolescent en se baissant pour soulever à moitié une chienne à demi ravie. « Je crois qu'elle a envie de dormir avec moi. »

« Tu sais bien qu'elle a du mal à monter l'escalier » soupira Wyndt en se grattant les cheveux.

Sael fit mine d'y réfléchir, puis haussa les épaules et parvint à soulever Dolce jusque sur le matelas. La chienne battit de la queue et donna à Wyndt trois bons coups de langue avant de regarder autour d'elle d'un air de demander ce qu'elle faisait là.

Sael s'était déjà glissé sous la couverture de l'autre côté.

« Tu n'es pas un peu grand pour dormir ici ? » ajouta Wyndt alors que Sael s'enfouissait sous la couverture jusqu'à ce que ne dépasse que le sourire de ses yeux bridés.

« N'importe quoi, je suis tout petit. »

Et de se ratatiner encore plus.

Wyndt sourit puis se pencha par-dessus la chienne pour embrasser Sael sur le front. « Va pour cette fois. Mais tu as intérêt à ne pas prendre toute la place ! »

Sael plissa les yeux alors que ses lèvres s'étiraient de contentement. « Chez ma mère, on dormait ensembles parce qu'on n'avait qu'un lit » déclara-t-iel d'un ton ensommeillé. Iel bailla largement puis se pelotonna contre Dolce en l'entourant d'un bras.

Wyndt adorait sa chienne mais n'était pas féru de son haleine fétide, qu'il fit de son mieux pour éviter sans avoir à leur tourner le dos. Il éteignit la lumière et se mit à chercher un sommeil qui le fuyait désormais pour de nouvelles raisons : la joie de s'être rapproché de Sael et une panique vague à l'idée que les services de l'enfance surgissent soudain pour demander ce que ledit enfant fichait dans son lit.

Il se réveilla quelques heures plus tard lorsque son téléphone professionnel sonna et il décrocha machinalement, une épaule immobilisée par la tête de Sael et les jambes compressées par le poids de Dolce.

Il passa une main réconfortante dans le dos de l'enfant en répondant à l'appel, parce que Sael s'était à demi réveillé et marmonnait quelque chose.

« Allô ? J'espère que c'est urgent parce que j'ai passée une journée un petit peu fatigante... »

« Le couvent des voloviennes de Hwaels vient d'être notifié de la présence de Sael » déclara Marie au bout du fil.

Wyndt se sentit aussitôt beaucoup plus réveillé.

« Notre informatrice a apprit la nouvelle par hasard de la part d'une pratiquante ravie. L'information leur serait parvenu durant l'escapade de notre vilain petit canard, mais ne semble pas venir de l'Institut Mayer. On espère que ça bougera quand même de ce côté, histoire qu'on parvienne enfin à débusquer la taupe que nous cherchons. En attendant, fais ses bagages : on délocalise. »

L'Eau viveWhere stories live. Discover now