Acte 3 Scène 1

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LE DOCTEUR LINGARD, L'INFIRMIER, LES SPECTATEURS, LES PROCHES DES SPECTATEURS


(La lumière s'allume sur scène. Le Docteur Lingard est au centre de la scène. L'Infirmier, derrière lui, regarde fixement le sol. Le Docteur Lingard consulte des papiers et en lit quelques uns avant de commencer à parler.)

DOCTEUR LINGARD (lisant un papier, en marmonnant) Superbe... (lisant un papier, en parlant doucement) Génial... (lisant un papier, en parlant fort) Splendide ! (lisant un papier, en criant) Époustouflant !! Ahah ! (se retourne vers l'Infirmier) Regardez ça !!

L'INFIRMIER : J'ai vu, Monsieur...

DOCTEUR LINGARD (revient vers l'avant de la scène, et se met à faire les cent pas) : Les trois quarts des blessés ont pu être soignés en à peine quelques nuits !

L'INFIRMIER : C'est enthousiasmant, je l'admets, mais...

DOCTEUR LINGARD : Et dans quelques temps, tous ces gens seront sauvés!

L'INFIRMIER : Oui mais pour ça, il nous faut...

DOCTEUR LINGARD : Il nous faut encore un peu du sang de Jean Ernestin, certes. Mais qu'importe ! Plus qu'un demi litre, et tout sera réglé !

(L'Infirmier ne répond pas, et affiche une mine grise. Le Docteur Lingard se tourne vers lui)

DOCTEUR LINGARD : Pour l'amour de ciel, pourquoi est ce que vous tirez cette tête ?! Je veux dire...tout fonctionne parfaitement et...

SPECTATEUR (le coupant) : Docteur !

(Le Docteur Lingard se retourne vers les coulisses. Le Spectateur se précipite sur lui et l'attrape par les épaules)

SPECTATEUR : Merci infiniment Docteur ! Vous m'avez guéri ! Je peux à nouveau marcher, je...(serre le Docteur dans ses bras) Merci...merci beaucoup.

DOCTEUR LINGARD : Oh, je...um...

PROCHE DE SPECTATEUR : Docteur !

(Le Proche de Spectateur se précipite sur le Docteur et l'embrasse énergiquement sur les deux joues)

PROCHE DE SPECTATEUR : Je vous dois la vie de mon fils ! Je vous en serai éternellement reconnaissant...

DOCTEUR LINGARD : Vous savez, je n'ai fait que mon métier...

PROCHE DE SPECTATEUR : Ne soyez pas si modeste. Dites moi, comment pourrais-je vous rendre la pareille ?

DOCTEUR LINGARD : Comment ? Euh...

PROCHE DE SPECTATEUR : Ah, ce n'est pas grave ! Vous y réfléchirez. Allons y fiston ! (se dirige vers les coulisses opposées) Au revoir Docteur ! Et merci encore !

(Le Docteur Lingard suit leurs traces, comme pour leur dire quelque chose, mais les Spectateurs quittent la scène avant qu'il ne puisse le faire. Il pousse alors un soupir heureux avant de se retourner vers l'Infirmier, qui affiche toujours un air maussade)

DOCTEUR LINGARD : Mais qu'est ce qui vous arrive, bon sang ?!

L'INFIRMIER : Docteur. Nous devons arrêter ça.

(Légère pause)

DOCTEUR LINGARD : Quoi...?

L'INFIRMIER : Vous ne pouvez plus continuer.

DOCTEUR LINGARD : Mais de quoi est ce que vous parlez ?

L'INFIRMIER (prend un papier) : Sur ce rapport, il est stipulé que vous lui avez prélevé plus de deux litres de sang. Si vous continuez, vous allez le tuer.

DOCTEUR LINGARD (lui arrache le papier des mains) : Enfin, c'est absurde ! Il ne mourra pas.

L'INFIRMIER : Docteur, vous savez tout autant que moi que si ! Il ne pourra pas survivre à une nouvelle prise. Nous ne pouvons pas lui en demander d'avantage...

DOCTEUR LINGARD : Est ce que vous vous rendez compte que des dizaines de vies sont en jeu ? 

L'INFIRMIER : Et vous êtes prêt à sacrifier la vie d'un homme pour ça ?!

DOCTEUR LINGARD (légère pause) : Oui. (légère pause, l'Infirmier s'éloigne du Docteur) Oui, j'y suis prêt. Si sacrifier le onzième individu permet de sauver les dix autres, je le ferai. Sans aucune hésitation.

L'INFIRMIER : Vous n'êtes pas un sauveur...vous êtes un meurtrier...un assassin ! Vous ne le faites pas pour sauver des vies...mais pour satisfaire votre propre égo !

DOCTEUR LINGARD : Ça suffit !! Je ne tolérerai pas ce genre d'accusations. De nous deux...qui est l'hypocrite...hein ? La seule personne que vous vouliez voir sauvée, c'était la meilleure amie de votre fille. Et maintenant qu'elle l'est, les autres n'ont plus d'importance, n'est ce pas.

L'INFIRMIER : Quoi qu'il en soit, Docteur. Je ne peux pas vous suivre sur ce coup là.

DOCTEUR LINGARD : Et bien, partez, la porte est grande ouverte.

L'INFIRMIER : Vous garderez cette mort sur votre conscience.

DOCTEUR LINGARD : Et bien qu'il en soit ainsi.

L'INFIRMIER : Et alors, vous regretterez de ne pas être resté sur le rebord du précipice !

(L'Infirmier sort. Légère pause)

DOCTEUR LINGARD : La médecine doit accomplir son devoir.

(Le Docteur Lingard sort. Noir sur scène)


La prise de sangOnde histórias criam vida. Descubra agora