(Cette scène ne doit être représentée que si le vote du public s'est conclue par une majorité en faveur de la Prise de Sang)
LES SPECTATEURS, LE PRÊTRE, LE CHŒUR, LA PART ALTRUISTE, LA PART ÉGOÏSTE, (JEAN ERNESTIN)
(La scène est noire. Des cloches sonnent. Un chœur commence à entonner un chant funèbre. La lumière s'allume sur scène. Les chanteurs sont situés sur les extrémités, à l'avant de la scène. A l'arrière, la Part Altruiste et la Part Égoïste sont situés de part et d'autre du curé, la tête baissée. Au milieu de la scène, les Spectateurs rentrent. Ils sont 8, et portent un corps inerte, vêtu de rouge avant de les déposer au centre de la scène, et de s'écarter vers les extrémités de la scène. Le chœur s'arrête. Le prêtre sort alors un livre de sa soutane, et prend la parole)
LE PRÊTRE : Nous sommes réunis ici en ce jour, pour nous recueillir sur la tombe de notre confrère, et sauveur, Jean Ernestin. Il serait impossible de décrire la tristesse que ton départ a provoqué en nos cœurs mais...sans ton geste héroïque, ce serait nous qui serions à ta place et que les vivants pleureraient. Tu as choisi de donner les dernières ressources de ton cœur, pour permettre aux nôtres de continuer à battre. Ta bonté et ton altruisme ne seront pas vains, ton geste ne sera jamais oublié et persistera, sur terre, et au ciel. Puisses tu jouir de la vie éternelle que tu mérites, entre les mains de Dieu. Que ton âme repose en paix. Amen.
TOUS : Amen.
(Le Prêtre range son livre et commence à sortir, suivi des Chanteurs. Plusieurs Spectateurs se mettent à pleurer, soutenus par les autres. Puis ils partent les uns après les autres en disant adieu à Jean Ernestin. Ne reste que la Part Altruiste et la Part Égoïste sur scène. La Part Altruiste s'agenouille auprès de Jean Ernestin, lui attrape la tête entre les mains, et ne dit rien. La Part Égoïste, elle, retire sa tunique bleue, la plie, et la dépose à côté de la tête de Jean Ernestin. Il se dirige alors vers les coulisses, y jette un coup d'œil, et se retourne vers la Part Altruiste)
LA PART ÉGOÏSTE : Il faut qu'on y aille. Viens.
LA PART ALTRUISTE : Je ne peux pas...
LA PART ÉGOÏSTE : Mais si tu peux, nous sommes détachés de lui maintenant. Allez, viens.
LA PART ALTRUISTE : Comment peux tu être aussi...froid, aussi insensible dans un moment comme ça...?
LA PART ÉGOÏSTE : Je n'y suis pas insensible. Seulement, que veux tu qu'on y fasse ? Il est mort, on n'y peut plus rien. Maintenant, nous devons partir avant qu'il ne soit trop tard.
LA PART ALTRUISTE : Tu n'agis donc jamais que pour toi...?!
LA PART ÉGOÏSTE (se rapproche de la Part Altruiste et s'agenouille près d'elle) : Cesse donc de dire ça ! C'est vraiment ce que tu crois ? Que j'ai agi pour mon seul intérêt ? Tu te trompes. Tout ce que j'ai fait, je l'ai fait pour Jean Ernestin. Du moins, ce que je pensais être prioritaire pour lui. Tu as choisi d'œuvrer pour son bonheur, moi pour sa survie, parce que je pars du principe qu'il est difficile d'être heureux sans être vivant.
Au final, le destin a estimé que tu avais raison. Peut être était ce le cas. Peut être aurais je dû me concentrer d'avantage sur ce qu'il voulait plutôt que sur ce qu'il devait faire. Après tout, ton action a sauvé des dizaines des personnes et Jean Ernestin est devenu un héros à titre post-mortem ! Peut être était ce ce qu'il voulait, après tout. Mourir en héros. Donner sa vie pour une noble cause. Si c'était le cas, tu as peut être eu raison de le faire.
Seulement, (se relève) on ne fait pas toujours ce qu'on souhaite dans la vie, et en l'occurrence, ça l'a conduit à la mort. J'ai fait ce que j'ai pu pour Jean Ernestin, mais maintenant qu'il n'est plus, je n'ai plus à me soucier que de moi. Or, l'un des effets de ta décision, minime certes mais tout de même, est que nous nous retrouvons au chômage technique et que si nous ne bougeons pas tout de suite, nous risquons de nous retrouver à errer pour l'éternité. Donc, moi, je rends mon tablier, et je te conseille de faire de même. Par contre, dépêche toi, on a plus beaucoup de temps.
(La Part Altruiste ne répond pas. Elle se relève lentement et commence à retirer sa tunique. Mais elle finit par se raviser)
LA PART ALTRUISTE : Je refuse.
LA PART ÉGOÏSTE : ...comment ?
LA PART ALTRUISTE : Je ne partirai pas. Je reste.
LA PART ÉGOÏSTE : ...Attends. Tu as conscience que l'éternité, c'est quand même très très long...!
LA PART ALTRUISTE : Peu importe. Je resterai ici.
LA PART ÉGOÏSTE : Mais enfin, tu ne vas quand même pas regarder le cadavre de Jean Ernestin se décomposer pendant des décennies ! C'est absurde ! Et puis, c'est toi qui a choisi de le faire mourir, et maintenant, tu regrettes trop ton geste pour te détacher de lui ? C'est complètement incohérent !
LA PART ALTRUISTE : C'est justement parce que je l'ai fait que je ne peux pas simplement partir et faire comme si rien ne s'était passé ! Oui, je regrette mon geste, et c'est justement pour ça que je tiens à rester. Et tant pis si ça me prend l'éternité pour me pardonner, je refuse de simplement l'oublier !
(Un silence s'installe)
LA PART ALTRUISTE : Tu n'es en rien responsable de sa mort. Tu n'as pas à avoir de regrets. Je ne te retiens pas, tu peux partir.
(Légère pause)
LA PART ÉGOÏSTE : Tu es complètement inconscient...Pff. Fais comme tu voudras.
(La Part Égoïste sort. La Part Altruiste lève les yeux vers elle et tend légèrement la main vers l'avant, puis la rabaisse une fois qu'elle est sortie avant de regarder fixement Jean Ernestin pendant un moment)
LA PART ÉGOÏSTE (dans les coulisses) : (soupir)...Fais chier.
(La Part Égoïste revient. La Part Altruiste lève les yeux vers elle, abasourdie. La Part Égoïste s'assied près d'elle et commence à remettre sa tunique)
LA PART ALTRUISTE : Mais, qu'est ce que tu...?
LA PART ÉGOÏSTE : L'éternité, c'est déjà bien chiant de base. Alors quand on est tout seul...
LA PART ALTRUISTE : Mais alors...ça veut dire que...
LA PART ÉGOÏSTE : Ben oui. Je reste avec toi.
(Un sourire se dessine sur le visage de la Part Altruiste, tandis que la Part Égoïste détourne le regard, agacé)
LA PART ALTRUISTE : ...Merci.
(Légère pause)
LA PART ÉGOÏSTE : Y a pas de quoi.
(Noir progressif sur scène)
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La prise de sang
Ficción GeneralCette pièce de théâtre raconte l'histoire d'un chanteur célèbre, qui se produit une énième fois sur scène devant une foule surexcitée. Mis à part le fait d'être mal à l'aise face à tous ces gens, ce dernier vit une vie paisible. Jusqu'à ce que quelq...
