Les vivants et les morts

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Je ne sais pas trop quoi écrire,
Depuis des heures, dans ma tête,
Tourne la roue, coule la cire,
Des cierges brûlants, dans ma tête,
Je vois les étincelles blanches,
Les étincelles au goût de plâtre,
Je vois les dents qui se déhanchent,
La muse qui se noie dans l'âtre,
J'entends le feu et sa fureur,
Je sens le souffle des années,
Je l'entends crépiter, mon cœur,
Mais je reste là, las, caché,
Dans la nuit froide, ensommeillée,
Dans un grand calme, emmitouflé,
Je reste là, à regarder,
À mentir et à respirer,
Quand tout ce que j'espère s'endort,
Quand même l'amour me fait tort,
Hélas ! Hélas ! J'espère encore,
Voir les vivants serrer les morts.

Et toi, tu es là, tu souris,
Tu me tends cette main câline,
Bouée dans mes pleurs et mes cris,
Cette douce main de platine,
Je ne suis pas illuminé,
Mais je sais que je suis fâché,
Contre le ciel, et contre moi,
Mais, s'il te plaît, ne t'en vas pas.

Je peux chanter, je peux compter,
Les étoiles au bout de mes doigts,
Je peux faire fondre le cristal,
Je peux danser, je peux couper,
Les arbres qui pleurent sans toi,
Dans le cimetière matinal,
Je peux écrire et raconter,
La rage des princes et des rois,
Qui se battent sur leur cheval,
Mais je suis incapable, moi,
De faire reculer la vague,
Déferlante qui vient sur toi,
Goutte de sang sur une dague.

Mais moi, hélas ! Que puis-je faire ?
Je n'ai que mots pour bouclier,
Et plume pour lame de fer,
Je ne peux vraiment pas lutter.

Alors je ne peux que prier,
Et je clos mes yeux sur ces gens,
Qui ne me voient, recroquevillé,
Alerte, car j'espère tant,
Voir les morts serrer les vivants.

Mots de têteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant