Chapitre XIII - En ce jour si particulier

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Ma mère, pointée devant moi, lève sa main. Nous sommes dans la cuisine et l'atmosphère est tout sauf banale. Il y a des lueurs de bleus ce matin. Rick descend les escaliers pour déjeuner avec nous. Ma mère a les yeux rouges, gonflés. Elle a encore dû pleurer toute la nuit. Son visage glacial me rappelle l'accident d'il y a cinq ans. Nous faisons un saut en arrière de cinq années ce matin. Et alors que je tartine de beurre le morceau de mon pain, alors que j'ai eu le temps de faire qu'un seul clin d'oeil, j'entends mon frère hurler de détresse. A peine ai-je eu le temps de redresser ma tête que je vois le sang couler comme un léger fleuve sur la table à manger. Ma mère...

Que puis-je faire à part pleurer ? Hier, j'aurais dû parler avec elle, même si sa réponse était fermée, peut-être aurais-je annulé son désir de planter ce couteau dans son pauvre cœur ? Rick attrape ma mère par la taille et la dégage de la cuisine. Il la dépose sur le pauvre canapé. Le désarroi est un trouble que l'on ressent rarement dans une vie. Mais lorsqu'il est là, on le voit et on l'entend. Rick crie. Ce hurlement alerte Bill qui descend les escaliers en vitesse. De la cuisine, nous avons la vue sur le salon. Je n'ai pas bougé, je suis toujours sur ma chaise, je fixe toujours le sang de ma mère sur la table. Celui-ci submerge mon pain. Les deux hommes pleurent. Bill dit des choses totalement spéculatives, abstraites. Des choses impensées. Des choses que je ne comprends pas. Sa voix est tellement robotisée. Comme si la mort de ma mère, il l'a prévu, et qu'il récite son discours.

Olivia : Je suis devant chez toi, j'ai une surprise avec moi... ça va te plaire.

Ma meilleure amie m'emmène au lycée tous les matins en voiture. Olivia conduit la voiture de sa mère. Une belle Chevrolet Spark. Je pense à ma mère. Elle est entre de bonnes mains. Je sais qu'elle mourra. Mais je ne peux rien faire, si ? Je n'ai pas le pouvoir de guérir les morts incurables. Je me dirige vers la sortie de la maison, rejoindre Olivia qui m'attend avec sa "surprise". Je veux que sa surprise soit Jim. Je prie de toutes mes force pour voir le visage de Jim dans la voiture de ma meilleure amie. En poussant la porte... je vois les pompiers devant ma maison. Rick a appelé les secours pour ma mère. J'ai envie de leur dire, qu'il est trop tard. Mais je suis déjà, moi-même, en retard pour aller au lycée. Plus je m'approche de la jolie voiture blanche de mon amie. Je constate que les pompiers ne sont pas venus pour ma mère, mais pour mes deux amis.

Ce matin doit être un cauchemar. Ma mère est morte. Et mes amis sur la voie de la mort. Un des sapeurs-pompiers m'interpelle. Je ne le regarde pas. Ce que je veux savoir, c'est qui est la "surprise". Il m'appelle un peu plus fort. Je ne m'en occupe pas. Son bras touche le mien. Il me tourne.

- Jeune fille, tu as vu ce qu'il s'est passé ?

L'homme a la voix de mon père, c'est dérangeant.

- Je les connais... soufflé-je

- Ce n'est pas la question... dit-il en inspectant mon regard.

Il reprend immédiatement :

- Est-ce que tu vas bien ?

"Est-ce que tu vas bien" est la question que j'ai posé à ma mère hier. Ma mère est morte. Je ne veux pas retourner vivre chez mon oncle Teddy. J'ai retrouvé ma vie ici ! Je ne veux pas partir ! Je veux revoir Jim ! Le pompier m'apporte les corps morts de ma meilleure amie et de Jim.

- Sais-tu comment ils sont morts ? As-tu vu l'accident ?

- Non, prononcé-je.

- Nous avons besoin de connaître leur identité. Comment s'appelle t-elle ?

- Olivia Houston.

Sans hésitation, mes mots sortent de ma bouche. Je fixe la voiture, je ne regarde pas l'homme qui griffonne des choses sur un papier. Je pense à ce que Katie, la mère d'Olivia pensera.

- Qui est le garçon ?

Je regarde pour être sûre de son visage. Jim est bien mort aussi. Ses yeux qui étaient joliment bleutés sont désormais fermés, pour toujours. Il a du sang qui coule sur sa joue. Je crois que la plaie vient du sommet de son crâne. Ma meilleure amie a le bras en sang mais je ne vois pas très bien.

- Qui est le garçon ? me répète le pompier impatient de connaître ma réponse.

- Jim. Il s'appelle Jim.

- Il y a beaucoup de Jim sur Terre, quel est son nom ?

Je regarde l'homme dans les yeux. Ses yeux pétilles.

- Il n'y a pas deux Jim comme lui sur Terre. Vous pouvez cherché...

Je ne connais pas le nom de Jim. J'aimerai pouvoir lui dire, là maintenant, ou demander à Jim qui il est. Mais il est mort. Ma vie est devenue un enfer. A cause de moi.

FIN

Merci d'avoir lu !

C'est un petit chapitre en effet, mais je l'ai séparé en deux.

La suite demain !

A bientôt !

Au rythme de mon cœurDove le storie prendono vita. Scoprilo ora