Leila

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Que nous le voulions ou non, chaque être humain n'est au fond qu'un être banal parmi tant d'autre. Nous avons beau vivre dans une société mettant en valeur le fait d'être populaire et particulier, si nous prenons un peu de recul nous nous rendons compte qu'en réalité ces hommes et ces femmes que nous voyons comme des êtres à part entière à cause de leur célébrité ou de leur puissance ne sont que de simples humains pas plus différents que vous et moi. Ils ont les mêmes besoins que nous, le même organisme, des rêves, des objectifs, etc... Mais nous avons tellement besoin de spectacle et d'un certain idéal à suivre que nous nous complaisons à considérer presque comme des êtres divins des personnes qui n'en sont rien. Un besoin parfois si fort que nous en sommes parfois réduit à mettre sur un piédestal des personnes sans talent particulier et aux valeurs discutables que nous prenons plaisir à soit glorifier, soit à critiquer et à moquer d'une façon malsaine. Pourtant, bien que toute ceci soit soit à débattre, nous n'avons pas tord sur une chose: chaque être humain, aussi banal soit-il, est pourtant unique de par son histoire.
Chaque vie est différente. Nous avons tous un destin différent que nous choisissons plus ou moins. Nous faisons chacun des choix qui auront une incidence sur notre avenir si ce n'est ce dernier qui décidera via les différents aléas et bonheur de cet étrange voyage qu'est la vie et qui la rend si intéressante. Et c'est précisément l'une d'entre elle que je vais vous conter. Celle d'une petite fille parmi tant d'autre dont l'histoire prête des allures de conte moderne...

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Leila était une petite fille de tout juste quatre ans que rien ne la différenciait des autres enfants de son âge. Elle avait un joli minois avec ses deux petites joues rondes, sa peau de couleur, ses deux billes noir de jais en guise d'yeux et sa chevelure crépue arrivant péniblement au dessus de ses frêles petites épaules quand elle n'était pas attaché et relevée en arrière par plusieurs élastiques. Comme tout les enfants de son âge elle aimait jouait à toute sorte de jeux, des plus calmes au plus énergétiques et bruyants. Malgré sa certaine vivacité, Leila savait être calme et elle délaissait volontiers les courses et autres jeux dynamiques pour le cerceau, les billes ou ses deux poupées Barbie. Elle était en somme une bonne enfant, sage et obéissante. Toujours pleine d'énergie, elle aimait les aventures et faisait preuve de cette grande curiosité naturelle qu'ont les enfants, son plus grand défaut après la gourmandise. Quand elle n'essayait pas de se goinfrer d'une quelconque douceur, Leila aimait explorer le monde qui l'entourait, quitte à parfois fouiller ou se mêler d'affaires qui ne la regardaient pas. Farfouiller dans les affaires d'autrui était une sorte de chasse au trésor pour elle ou une enquête, chaque élément trouvé pouvant lui apprendre d'avantage sur son propriétaire dont elle aimait imaginer la vie via des histoires tout droit sortie de son imagination débordante. Elle avait toujours des idées, bonnes ou mauvaises, que ce soit des jeux ou toute sorte d'aventures imaginaires qu'elle prenait plaisir à rêver.

Leila vivait à Rio avec ses parents: Monsieur et Madame Laranjeira. Son père travaillait dans un entrepôt, sa mère enchaînait les petits boulots, tantôt virée, tantôt démissionnant pour des raisons parfois farfelues. C'était une jeune et belle femme de vingt-six ans dont Leila avait hérité de ses yeux sombres et de sa magnifique chevelure bien que compliquée à coiffer. Madame Laranjeira avait cet air de beauté glacée, le regard froid mais terriblement enjôleur qui avait jadis fait chavirer quelques coeur avant sa rencontre avec son mari. Mais sa beauté ne suffisait pas à pallier sa grande fainéantise et son ego quelque peu surdimensionné. C'était une femme qui détestait avoir tord et encore moins le reconnaitre, hautaine et assez immature, préférant l'oisiveté et le plaisir égoïste et futile à ses responsabilités d'épouse et de mère. Son apparente froideur n'était pas que dans son visage, elle était de même dans sa façon d'être, l'air sévère et insensible. Seul ses amies et sa famille avait droit à ses airs plus enjoués et souriants et encore! Leila n'avait guère souvenir de quelconques gestes ou moments de tendresse qu'échangeait Madame Laranjeira avec son mari, ces derniers paraissaient plutôt rare. Il en était de même pour sa fille dont elle semblait désintéressée, n'ayant jamais réellement réussi à assumer son rôle de mère. Encore aurait-il qu'elle le veuille...

Bien que Monsieur Laranjeira était plus débrouillard et sérieux au niveau du travail que sa femme, il était bien loin d'être un modèle. Tout aussi froid en apparence que sa femme, Monsieur Laranjeira était un homme coléreux, borné et violent. Âgé d'à peine vingt-sept ans, il aimait lui aussi profiter de sa jeunesse, préférant les virées au bar avec ses amis et les soirées plutôt que celles avec sa famille. Il faut dire qu'à la maison le couple Laranjeira passait une grande partie de leur temps à se disputer sous le regard impuissant et effrayée de leur fille qui les voyait souvent en venir aux mains. Dans ces moments-là la fillette trouvait refuge dans sa chambre mais cela n'empêchait pas leurs cris de raisonner jusqu'à dehors... Malgré sa grande irritabilité, Monsieur Laranjeira était un peu plus calme que son épouse, ou du moins moins exubérant. Il n'était pas capricieux comme cette dernière et prenait un minimum ses responsabilité afin de faire vivre sa famille, surtout depuis la naissance de leur fille dont il semblait se préoccuper un peu plus.

C'était à se demander comment ces deux-là avaient pu s'aimer tant ils semblaient opposés et passaient la plupart de leurs journées à se disputer! Mais si il ils avaient bien une chose en commun c'était leur grande sévérité à laquelle devait se plier sans rechigner Leila. Monsieur et Madame Laranjeira étaient très stricts concernant l'éducation de leur enfant mais pas pour les raisons que l'on croirait. Si pour beaucoup de parents la sévérité sert à ce que leur enfant se comporte bien et réussisse, pour les Laranjeira c'était seulement pour que leur fille ne les dérange pas, qu'elle ne soit pas un poids encombrant. Tant qu'elle ne leur causait pas d'ennuis ils ne faisaient guère attention à ce qu'elle fabriquait, la laissant souvent jouer dehors avec ses amis afin d'avoir la paix. Mais le soir, une fois rentrée chez elle, la petite fille devait se faire plutôt discrète et éviter toute bêtise afin de ne pas s'attirer les foudres de Monsieur et Madame Laranjeira qui n'hésitaient pas à user de méthodes particulièrement cruelles et injustes pour la punir. Il n'était pas rare que la pauvre enfant apparaissait avec un ou plusieurs bleus ou le corps bariolé de rouge par une ceinture. D'ailleurs, quand ce n'était pas les Lanjeira qu'on entendait crier, c'était les cris de leur fille que l'on pouvait entendre certains mauvais jours quand on s'approchait de leur maison. Si ces horribles traitements en répugnaient certains, beaucoup n'y prêtaient guère attention. De toute façon que pouvaient-ils faire? Personne ne pouvait vraiment aider et, malheureusement, les ennuis de la fillette leur paraissaient moins importants face aux autres graves problèmes auxquels devaient faire face les habitants du favéla malfamé où vivait la pauvre enfant et ses parents. De toute façon si ils s'en mêlaient on leur aurait surement dit de se mêler de ce qu'ils les regardaient, sans compter que devoir se battre avec eux était la dernière chose dont ils avaient besoin...

Pourtant malgré tout cela Leila restait bonne et relativement sage. Elle savait de toute façon qu'une fois dehors de chez elle elle était libre et pouvait s'amuser, crier, rire et faire des bêtises sans risquer la colère de ses parents, tant que cela ne leur causait pas d'ennuis. D'ailleurs, bien que ne comprenant pas leur cruelle attitude envers elle, elle essayait de se faire aimer d'eux en faisant de son mieux pour être sage à leurs yeux et ainsi peut-être les adoucir. Elle recherchait naturellement et comme n'importe quel autre enfant leur attention et surtout leur amour qui, bien que très peu démonstratif, était néanmoins sincère quand Monsieur ou Madame Laranjeira avait un geste tendre envers elle. Elle trouvait sinon cette certaine affection auprès des enfants de son âge et amis, même si cela ne remplaçait pas l'amour unique d'un parent envers son enfant qu'elle cherchait tant. Malgré les disputes et les bagarres, les enfants s'adoraient et ne restaient jamais bien longtemps fâchés, s'ennuyant vite sans leurs compagnons de jeu. Tant que ce petit bonheur ne lui était pas retiré, Leila resterait souriante malgré sa vie familiale bien compliquée, gardant espoir que les choses s'arrangeront d'elles-même un jour. C'était ce qu'elle aimait penser à la fin de chaque mauvaise journée, priant avec ferveur sa bonne étoile de lui venir en aide, si ce n'est que de juste lui faire tenir bon encore un peu. Un jour ou l'autre son souhait finirait bien par se réaliser...

With a child's heart (Michael Jackson fanfiction)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant