4ème arrêt : Sourire

718 136 52
                                    

Février. Un peu de gel sur les vitres, des grosses écharpes enroulées autour du cou mais l'espoir que le printemps ne tarde pas cette année.

J'avais miraculeusement réussi mes partiels, ma relation avec mon copain se passait bien, mes acolytes me faisaient rire chaque jour mais surtout... Je le voyais chaque matin. Le type du bus devenait régulier dans ses horaires, comme moi. J'avais opté pour mon 2ème horaire, celui où il y avait un peu de monde dans le bus mais pas trop, celui qu'« il » prenait le plus souvent.

On ne s'était jamais parlé, on savait juste qu'on avait un cours en commun et je savais qu'à chaque fois qu'il arrivait dans l'amphi pendant ce cours, il croisait parfois mon regard avant d'aller s'asseoir avec ses amis.


Le jour où j'ai arrêté de m'intéresser à lui est lorsque j'ai appris son prénom.

Nous étions en amphi, cours commun, j'étais en train de prendre miraculeusement les notes du cours quand j'ai entendu quelqu'un devant moi poser une question : c'était lui. Une question banale mais qui a fait rire ses amis, dont l'un d'eux qui a utilisé le diminutif de son prénom.

Sur le coup j'étais toute excité : un nouvel indice ! Son diminutif étant peu commun, il me suffisait de regarder la feuille de présence, de noter son prénom et nom et d'aller jouer ma stalkeuse sur les réseaux sociaux pour en savoir plus.

Une semaine plus tard, la feuille d'émargement passa devant mes yeux. Mon ami et moi, captivés par cette histoire de « type du bus », regardions la feuille attentivement jusqu'à tomber sur un prénom que je n'avais pas imaginé une seule seconde. Mon ami rigola doucement en me murmurant « Ça, ce n'est pas un Eliott ou Christian ! » avant de passer la feuille aux autres élèves.

Je n'aimais pas son prénom. Il me faisait penser à un personnage de dessin animé. C'était tellement loin de ce que j'avais imaginé... J'ai quand même cherché sa présence sur Facebook, mais rien de satisfaisant : une photo random et rien de récent pouvant être vu en « public ».

Ma curiosité satisfaite mais déçue, je l'ai rangée au fond de moi et ai arrêté de m'intéresser au type du bus.


Jusqu'à ce fameux matin de mars.

Mon réveil n'avait pas sonné mais j'avais pu me lever à temps pour avoir le bus de mon 3ème horaire, le dernier avant une attente de plus d'une heure. J'avais couru, mes cheveux lâchés au vent vers le bus et l'arrêt déjà vide. Il commença à fermer la porte mais ma course porta ses fruits et interpella le chauffeur qui m'ouvrit la porte.

La respiration haletante, je validais ma carte et me dirigeais vers les places de libre mais mon regard fut automatiquement attiré vers le fond du bus : le type du bus était là, la tête tournée vers la fenêtre, un sourire franc sur le visage. Il baissa sa tête, toujours en train de sourire, puis cacha sa bouche de sa main.

Je m'assis bien avant le fond du bus et tenta de reprendre ma respiration mais surtout de ralentir les battements de mon cœur. Mon rythme cardiaque était élevé à cause de la course mais aussi à cause de lui et d'une idée qui avait germé dans mon esprit :

Est-ce que c'était moi qu'il regardait par la fenêtre ? Est-ce que le fait de me voir débouler dans le bus alors qu'il ne s'y attendait pas l'a fait sourire ? Comme si le destin me mettait sur sa route ?

Vu comme ça, c'était un peu comique et je comprenais pourquoi il avait rigolé mais peut-être que je me faisais des films... Peut-être avait-il seulement reçu un sms marrant ou... autre chose ?

Et pourtant, même si je n'étais pas amoureuse de lui, je désirais ardemment que son sourire me soit destiné, que ce rire m'appartienne.

Le Type du BusWhere stories live. Discover now