4- Stylo bleu

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S E P T E M B R E

ADRIEL

Plus les jours passent et plus j'ai l'impression de ressentir une énorme pression au cœur. Voir Kenora au loin et me rappeler de notre querelle qui date de deux mois me fait de plus en plus mal.

Les cours ont repris depuis quelques semaines. Ken' m'évite comme la peste tous les jours. Le matin, elle marche ou part avec son père.

Mes parents me demandent pourquoi on ne part et ne rentre jamais ensemble. À chaque fois, je ne sais pas quoi leur dire.
J'en ai parlé à Dimitri, mais je ne me sens pas plus léger. C'est de ma faute et je devrais réparer tout ça. Mais, Kenora reste tout de même en tort. C'est elle qui s'est approché, c'est elle qui m'a... C'est sa faute.

Lillian a vu le scandale, mais n'a rien dit depuis à ce sujet. Elle discute à propos de choses banales avec moi comme si il ne s'était rien passer.

J'ai peur qu'elle me balance à sa famille. On est tellement proche des Yang que je les vois presque comme des tantes, oncles et cousins. Je les connais depuis tellement longtemps que je sais qu'ils n'aiment pas quand quelqu'un vient faire souffrir un des membres de leur famille. La peur et surtout la honte me prendrait les tripes le restant de ma vie s'ils étaient au courant.

Il y a Tom aussi. Il est le grand frère de Kenora et il est parti à l'université depuis presque un an. Je n'ai pas spécialement envie que nos retrouvailles se débutent par plusieurs coups dans ma gueule.

Kenora n'est pas la seule à remplir mes pensées. Il y a Ursula.

Cette curiosité dérangeante me pique l'esprit. J'ai l'impression que si je savais au moins qui s'était installer dans sa maison cela me soulagerait. Que le coup de cœur Ursula aurait passé et aurait pu finalement être oublié.

C'est pourquoi aujourd'hui, ce mardi en plein soirée, j'y suis devant la grande bâtisse. La pancarte avait disparu. La boite aux lettres repeinte et la clôture en fer de nouveau entretenue. La maison ne paraissait plus autant effrayante qu'avant.

Dimitri a refusé de m'accompagner loin d'avoir envie d'être coupable d'infraction de propriété privé. Nerveux, je regarde les alentours avant d'ouvrir la barrière et de traverser l'allé d'asphalte menant vers le jardin. Le lieu me parait désert : aucune voiture, aucun bruit et aucune lumières d'allumé.

Je fais le tour du jardin avant de me mettre à regarder par les fenêtres.
Ma conscience me dit que j'aurais du tout simplement sonné à la porte comme tout le monde. Mais, je continue à inspecté encore un moment. Je jette un œil au salon jusqu'à ce que je croise le regard d'un mec en train de manger.
Mon cœur rate un battement.

Il a à peine le temps d'ouvrir la bouche que je me mets à courir.

J'arrive hors de la propriété et embarque dans mon véhicule. On m'interpelle lorsque le moteur se met en marche. Je roule très vite loin de la maison.

Je me sens stupide. Tellement con. Je suis obsédé. Je panique.

J'ai envie d'en parler de vive voix avec quelqu'un.
J'ai envie d'appeler Dimitri, mais pour lui dire quoi? Qu'il avait raison et que j'avais tort? Ensuite, il essaiera de me faire promettre de ne pas y retourné. Et si, il ne répondait pas?
En ce moment, il doit dormir ou terminer son devoir d'histoire. 

Il fait froid quand j'arrive chez moi. Une voiture attire mon attention. La voiture de Marc. Ce dernier me salue avant d'ouvrir le coffre du véhicule et d'en sortir des sacs remplis de nourriture. Kenora vient l'aider.
Je les regarde renter leurs sacs à l'intérieur. Je la regarde. Elle ferme les portes du véhicule, mais prend un instant pour se retourner vers moi.
J'agite mollement ma main essayant de la saluer. Elle rentre chez elle avec son père sans rien dire.
Elle m'a mis un vent. Ça fait mal.
Je suis con.

Le lendemain, courant pour ne pas être en retard, je rentre en classe et m'assoie à la première chaise que je voie. Celle à côté d'un gars au milieu de la classe. La cloche sonne à peine mon fessier est sur la chaise dur et grinçante. M. Darris ouvre son powerpoint et commence son cours. Je suis soulagé, mais plus très longtemps quand je vois que j'ai oublié mon étui. Avant quand on avait notre amie qui te rappelait tous les jours de prendre sa trousse, la matinée était moins intense. Tout le monde commence à annoter ce qui s'affiche sur le tableau.

De la génétique. Génial.

Je me penche vers mon voisin de table et lui demande un stylo noir.

-J'ai pas de stylo noir, mec. J'en n'ai que des bleus, me prévient-t-il me montrant son étui rempli de crayons bleus.

Je serre des dents quand je vois ce connard en possession du seul stylo noir dans sa main droite entrain décrire avec. Le beau hasard... Finalement, il me donne un stylo à bille bleu.

Je prends le stylo, mais le type ne lâche pas sa prise sur l'objet. Il m'inspecte le regard suspicieux J'allais lui demander le problème quand il prend cette fois-ci mon poignet.

-Tu me dis quelqu'un. Ce n'était pas toi devant ma maison hier soir? Il me pose la question en s'approchant de mon visage.
-Non...

Mes mains devenues moites essaient de retirer sa main, mais n'y arrivent pas. Le type me fait peur.

-T'es sûr?
-Oui. Certain. MAINTENANT, LÂCHE-MOI!

-Y-a-t' il un problème, Adriel? Intervient notre prof nous fixant derrière ses lunettes tout comme le reste de la classe.

Tous les deux restons immobiles avant que j'essaie d'assurer la situation.

-Non. Tout va bien.

Mon voisin lâche mon bras peu convaincu par ma réponse. Moi, j'essaie d'agir normalement et d'écrire ce que j'ai manqué.


Il sait que c'est moi. C'est pourquoi je me dépêche de ranger mes affaires et de sortir de la pièce.

-T'as oublié de me rendre quelque chose. Mon stylo. M'arrête trop tard le type m'arrêtant dans ma course.

-Ouais, t'as raison. Tiens.

Je lui redonne le stylo tout en essayant de rester calme. Il reprend son bien, mais son regard reste toujours sur ma personne.

-Tu es vraiment le pire menteur que j'ai connu de ma vie, m'insulte-t-il m'empêchant de développer une excuse crédible.

-Je sais... Désolé.

-Pourquoi t'étais là?
-Tu connais Ursula?

-Non. C'est qui? Je vois son nom partout. C'est flippant.
-Tu habite dans sa ancienne maison. J'étais venu pour voir si elle était toujours... là.

Le gars perplexe me demande si nous étions proches.
-C'est pas de tes oignons!

Il hoche de la tête me fixant d'un air songeur. Puis, en esquissant un sourire, le type sort sa trousse et me donne un crayon.

-Je sais que tu n'as rien pour écrire. Alors, garde le.

Je ne refuse pas le cadeau enfaite j'apprécie bien le geste.

-Merci.

Il me salue et part. Je l'entends rire.

Je ne comprends qu'après avoir jeté un œil sur le stylo.

-Connard... marmonnais-je.

Le stylo était encore bleu. 

y s u d aWhere stories live. Discover now