1. ou "Comment correctement préparer un mojito"

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"- Un mojito s'il vous plait", fit-il avec un sourire enjôleur sur les lèvres.

Il était bien trop tard pour qu'il lui demande son âge, bien qu'il ne semblait pas beaucoup plus jeune que les 18 ans requis pour un cocktail de ce genre. Le barman décida tout de même de diminuer la dose de rhum afin d'éviter d'aggraver l'état d'ébriété du client. Tout en écrasant les feuilles de menthe mouillées d'un peu de Schwepps, il remarqua les talents de danse du garçon à la peau tannée. Après avoir ajouté le citron vert, le rhum -en quantité moindre- et la glace pilée, il fit glisser le mojito sur le comptoir. Quelques secondes plus tard, un palais affuté fut outré :

"- Dis-moi... Ça fait combien de temps que tu travaille ici ?, un regard suspicieux sur son visage.

- Environ deux mois...

- Et bien mon cher...

Il s'arrêta pour déchiffrer le nom inscrit sur sa blouse de travail.

-... Keef.

- C'est Keith, l'interrompit-il.

- Et moi Lance. Bref, arrête de t'éloigner du sujet, je te vois venir. Keith, tu vois, ça, dit-il en pointant du doigt sa boisson, c'est pas un mojito. Et je sais de quoi je parle. J'en bois depuis que je suis en âge de marcher. Cubain jusqu'a la racine des os... euh non. Merde, c'est quoi l'expression déjà ?

- La racine des cheveux, déclara Keith du ton calme de celui habitué aux gens soûls.

- Oui voilà merci. Tu sais que je meurs d'envie de toucher tes cheveux depuis tout à l'heure?

Il ne laissa pas le temps de répondre à un Keith rougissant et continua à déblatérer sur l'authenticité de son mojito.

- Il manque au moins 1/3 de la dose normale de rhum c'est scandaleux vraiment comment quelqu'un de sensé peut réussir à produire un cocktail aussi insipide et décider de le vendre parce que en plus c'est cher et c'est ça qui fait mal ! Si seulement ma mamá était là...

Plus il parlait, et moins ses paroles n'avait de sens. Il finit par s'endormir, raide mort, sur le comptoir du bar. C'était bientôt la fin du service du serveur et il restait encore du monde sur la plage. Il décida cependant de partir plus tôt malgré les menaces d'Iverson -son patron- et prit l'initiative de ramener ce Lance chez lui.

Arrivé sur le trottoir du bar, il essaya d'attraper un taxi, sans succès. Il essaya aussi de porter l'homme soul, sans plus de chance (qu'est-ce qu'il est lourd !). Un banc éloigné de l'agitation du petit boulot de Keith s'offrait alors à eux. Il installa tant bien que mal Lance et s'assit rapidement avant qu'il ne tombe. Juste à temps, puisque sa tête tomba sur son épaule en même temps que son fessier sur l'assise, accompagnée d'une délicieuse odeur de crème solaire, de shampoing et de... pain à l'ail ? Il ne savait pas vraiment, mais ça sentait foutrement bon. 

Un laps de temps plus tard, Keith entendit Lance grogner. C'était difficilement déchiffrable, mais il lui semblait capter des bribes de paroles comme "pan de ajo", "mamá" et son prénom. 

Son prénom?

Souvenirs flous - klanceWhere stories live. Discover now