VIII

32 1 0
                                    

PERRIE

Le Gala de la mairie de Rustington - où sont invités les personnalités 'prestigieuses' de la ville - réunit chaque année une trentaine de personnes qui sont considérées comme l'élite de la ville, autant culturelle que politique. Mes parents, en tant que maire et son mari, riche homme d'affaires, sont évidemment aux premières loges. Leurs trois enfants - mon frère, ma soeur et moi-même - sont toujours invités, et forcés de se mettre sur leur trente-et-un, histoire de maintenir l'image de prestige de la famille. 

Tandis que j'entre dans la salle, mon frère Jonnie et ma soeur Caitlin chacun d'un côté de moi, je tente de ne pas m'étouffer dans cet air tant chargé en égos surdimensionnés. Jonnie s'empresse d'aller saluer un ami à lui, tandis que Caitlin et moi-même nous dirigeons vers le bar. Je commande un verre de champagne, tandis que ma soeur demande du cidre. 

Après quelques secondes, Caitlin, toujours aussi perspicace (elle est également au Lycée, en dernière année, ce qui lui donne une année de plus que moi), me demande :

"Tu appréhendes de voir Zayn, c'est ça ?"

Je me fige.

"Pourquoi tu dis ç-"

"Les gens parlent, Perrie" Caitlin m'interrompt, ses yeux montrant de la compassion. "Je sais que nous ne sommes pas les soeurs les plus proches au monde, mais j'aurais espéré que tu saches que je serai toujours là, si tu as besoin de parler."

Je soupire.

"Je suis désolée, c'est juste que..."

"... C'est difficile d'en parler, je sais" elle dit, une main sur mon épaule. "Heureusement que ces filles étaient là pour l'empêcher de... Enfin, pour l'en empêcher."

"C'est sûr" j'acquiesce, mal à l'aise. 

Il y a un petit silence malfaisant, avant que Caitlin ne se lève et dise gentiment :

"N'hésite pas à m'en parler si tu en ressens le besoin, d'accord ?"

"Merci."

Elle s'éloigne gentiment pour rejoindre notre mère : cette soirée est l'occasion pour ma soeur aînée de se faire des contacts pour l'université, car connaître des gens puissants qui peuvent la recommander est un plus. Quelque peu contrariée, je finis mon verre cul-sec, avant d'en recommander un autre. 

Puis, soudain, tout le monde se tait. 

Je tourne la tête, pour voir que les Malik sont là - enfin, le père et la mère, mais pas de signe de Zayn. Ils me lancent tous deux un regard désolé, avant de passer leur chemin plus loin, vers mes parents. Une discussion sérieuse commence alors, mais ce n'est pas cela qui a arrêté mon regard. Charlotte Baker est là et, à ses côtés, cette fille

Il faut savoir que, à Rustington, Charlotte Baker est représentative de la voix du peuple : la classe moyenne l'adore, et, en tant que conseillère dans les affaires concernant l'éducation, elle a beaucoup réformé de choses, notamment l'écolage gratuit pour les classes défavorisées, ou encore les bourses pour les plus nécessiteux. 

Tout le monde la regarde, elle, mais mes yeux sont fixés sur la jeune femme qui l'accompagne : alors c'est elle, sa fameuse nièce orpheline. Fronçant les sourcils, je reprends le temps de m'attarder sur ses boucles brunes, ses deux mèches plus blondes que le reste, et ses yeux foncés mystérieux. 

Tandis que Charlotte est immédiatement abordée, je vois cette fille - Jade - s'approcher lentement du bar à son tour. Les yeux rivés sur son téléphone, elle ne me voit pas tout de suite. Elle s'assied à deux chaises de moi, avant de commander du vin blanc. 

"Salut" je fais, calme.

Elle sursaute un peu, avant de tourner les yeux vers moi. 

"Em... Salut ?" elle répond, visiblement pas très douée socialement. 

"Ca te dérange si je me joins à toi ?" je demande sur le même ton.

Elle acquiesce.

Sans attendre, je prends mon verre et me déplace de deux chaises. Elle range son téléphone, visiblement intriguée par le fait que je lui adresse la parole. En réalité, je voulais aussi la remercier.  

Tandis que j'allais parler, Jade prend les devants : 

"Pourquoi est-ce que tu ressens le besoin d'être méchante et hautaine avec les gens ?"

Désarçonnée par sa question, je fronce les sourcils et m'efforce de fermer la bouche. Jade semble amusée par cette réaction. 

"Euh..."

"Quoi que, quand je vois ta famille, je comprends un peu mieux" elle plaisante doucement, avant d'esquisser un sourire. "Tu sais, on dit souvent que les gens qui sont les plus hargneux sont ceux qui ont le plus de choses à cacher..."

"T'es venue pour me psychanalyser ?" je demande, froide. 

Elle sourit.

"C'est toi qui est venue, tu te rappelles ?"

Absolument désarçonnée et perturbée, je décide de me lever, avant de me pencher vers elle, mes yeux braqués dans les siens.

Je dis :

"Merci pour cette superbe conversation, Dr House."

Je fais volte face et marche énergiquement en direction de ma famille, énervée comme jamais : mais pour qui se prend-elle ? 

More Than WordsWhere stories live. Discover now