Chapitre 11

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Mon cœur bat à tout rompre. Je ne m'attendais pas à cette question, je pensais même qu'il avait oublié cette histoire de cris, c'était le but en déviant la conversation vers mon mal-être actuel.

Bon sang, que puis-je répondre ? 

Si je lui explique, il dira sans doute que ce vieil homme est un illuminé comme il l'a précédemment dit. De plus, je me vois mal lui dire que son apparition m'a imposé d'aller dans la montagne sous peine de mort... En y réfléchissant bien, personne de censé ne croirait en des paroles comme celles-ci.

— Non, rien. Je pensais avoir aperçu quelque chose et en me sachant toute seule j'ai paniqué, mais au final ce n'était que mon imagination.

Il me dévisage septique. Le silence dans lequel il s'est mué pour analyser mes paroles est clairement mauvais signe. Alors je souris, espérant le rassurer, mais surtout pour crédibiliser mon mensonge. Je n'en suis pas fière, mais une idée me dit de ne rien dire à Peter, en tout cas pas pour le moment.

— Des loups ? demande-t-il en s'amusant de la situation.

Je lève les yeux au ciel. Rigolant à mon tour du ridicule de la chose. S'il croit à mon histoire, c'est un pur soulagement. Au moins je n'ai plus rien à craindre à ce sujet. Autant orienter la conversation vers ce qui m'effraie le plus sur cette île : Les loups.

— Dis-moi la vérité, ces apparitions viennent vraiment de toi ?

— Et si je te disais que non, tu me croirais ?

La phrase parfaite pour semer le doute à n'importe qui.

— Peter... Aller, dis-moi la vérité, s'il te plaît.

— Je pense que j'ai un peu trop dit de vérités aujourd'hui. Si tu veux en apprendre plus, tu devras attendre pour la suite.

Devant son air satisfait je soupire et me lève du lit. En me dirigeant vers la sortie, je le remercie de m'avoir soigné, mais il m'arrête :

— Keira...

— Oui ? dis-je en me retournant pour l'observer toujours assis à sa place.

— Dors bien.

Sur le pas de la porte, je reste interdite, le fixant telle une idiote. Pourquoi cette simple phrase m'a-t-elle autant touchée ? Peut-être parce que sa voix et le sourire qu'il m'affiche ne cesse de respirer la sincérité... Je suis tenté de lui demander pourquoi est-il si gentil avec moi mais je n'ai pas envie de briser ce moment de simplicité.

— Merci, toi aussi Peter.

Je m'empresse de quitter la pièce pour rejoindre la passerelle menant à ma cabane. Le cœur tambourinant au rythme de mes pas hâtifs, je dépasse ma petite maisonnette pour rejoindre celle de Caleb. Cette soirée était un peu trop riche en émotions pour que j'arrive à trouver le sommeil seule dans un lit.

Un soupir de soulagement me vient une fois auprès de mon frère. Celui-ci est paisiblement endormi mais noyé dans une marre de bave. Je grimace en imaginant ce liquide visqueux imbiber mes cheveux. Les deux oreillers sont gluants, et de sa bouche ouverte sortent les chutes du Niagara. 

Ça me dégoûte.

Je lui renvoie son deuxième coussin en plein visage, mais son sommeil étant trop profond, il se retourne comme si je venais de lui offrir une caresse de plume, ignorant royalement mon attaque. Je lève les yeux au ciel, me résignant à m'allonger en silence.

Autant le laisser dormir, il a l'air si vulnérable ainsi. Sa présence à mes côtés m'apaise et m'aide à garder les pieds sur terre. À me dire que nous devons retrouver notre vie et nos parents. C'est notre deuxième nuit ici, mais j'ai l'impression que ça fait plus de deux semaines que nous sommes au Pays Imaginaire...

L'Ombre de Peter (Pause / Réécriture)Where stories live. Discover now