bleue est persane

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Tes mèches blondes s'envolent derrière nous, tu avances et tes hanches épousées par ton jean se balancent de droite à gauche, de gauche à droite. Monoï ou coco, tu es exotique jusque dans tes odeurs corporelles, comme une orchidée bleue. Tu ne sais pas où on va vraiment, j'ai pas voulu te dire. J'aimerais commencer notre portrait en noir et bleu par une surprise, un truc qui te reste en tête quand tu me vois. Je serais Samuel, mais le Samuel qui t'a fait une surprise au premier rencard. Même si c'est pas un rencard à tes yeux.

Tu sais, ça fait un an que je t'aime en silence. J'ai observé et j'ai appris des tas de choses. Je veux pas te faire peur, mais je sais que t'aimes les glaces rhum raisin et que tu prends le bus 09 pour rentrer chez toi. J'ai pas espionné, c'était juste par hasard que je t'ai vu savourer ta glace les yeux fermés, et c'était aussi par hasard que je t'ai aperçu monter dans le bus 09. Donc tu t'en doutes que je sais que t'aimes tout ce qui est vintage.

– Ferme les yeux.

Tu prends du temps à baisser tes paupières, tu rigoles. Tu veux savoir la surprise, mais il faut d'abord fermer les yeux. Je te guide vers un magasin, mon préféré depuis toujours, et je croise les doigts pour qu'il te plaise aussi. On rentre, et tu ouvres enfin les yeux. Tes yeux bleus, tes océans, ils ont l'air ébahi. Tu avances de trois pas, me regarde.

– Ouah.

Tes mains parcourent les vinyles de tes doigts, il y en a partout, des très vieux, d'occasion. Ce tableau de toi qui touche ce que j'aime, ça me rend fou. Je veux te peindre en bleu persan aujourd'hui, comme ton débardeur. Ton débardeur qui laisse entrevoir ton soutien-gorge noir, celui que je rêverais de caresser, mais surtout d'enlever. C'est pas pour ce que tu penses, c'est juste que j'aimerais peindre la forme de tes seins pour mon portrait en noir et bleu.

– Je savais pas qu'on avait un magasin de vinyles dans la ville.

– C'est pas étonnant.

Tu remarques jamais rien, Miria. Sauf quand on te place tout sur un plateau d'argent, pile sous ton nez. Là, tu finis par voir.

– J'ai pas le lecteur, c'est dommage.

J'en ai un chez moi, si seulement tu voudrais bien venir. C'est pas pour ce que tu crois, je veux juste te voir danser dans mon salon, animer mon appartement avec un verre de vin et des sourires à la pelle.

– Ils en vendent, par là.

Je veux pas que tu en achètes un, je veux que tu te serves du mien. Je veux que tu utilises le fait que t'en as pas comme prétexte pour venir chez moi et danser contre moi. Mais il faut aller doucement avec les filles pour ne pas les briser.

Ils coûtent pas cher, donc t'en prends un. La boîte dans les bras, on sort. Mais t'as oublié d'acheter des disques. J'ai rien dit parce que je vais l'utiliser comme prétexte pour te passer les miens. Peu importe si tu les abîmes ou si tu me les rends jamais, tant qu'ils sont quelque part chez toi, qu'ils ont touché ta peau et que tu les as écoutés.

Portrait en noir et bleuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant