H5 - P3

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Power-Danger

Partie 3 (dernière partie) :

J'avoue avoir un instant songé à partir avec ma fille, mais je ne suis pas un monstre. Je le sais maintenant.  Certes il ne doit pas comprendre mais je n'ai pas le droit de l'empêcher de voir sa fille. D'autant plus qu'il serait inhumain de priver Anna de son propre père. Ça fait déjà plusieurs semaines que je m'occupe d'elle un maximum. De toute façon, Simon ne s'aperçoit de rien. Au contraire, il est soulagé. Il peut dormir en paix la nuit, travailler sur ses dossiers jusque tard et regarder les matchs de foot à la télé quand ça lui chante. Mais plus le temps passe, plus les choses changent. Ma santé en prend un coup chaque jour et Anna manque beaucoup à son père. Il me demande de plus en plus à la garder pour que je puisse me détendre et qu'il puisse profiter d'elle. Pourtant, chaque fois qu'il la tient dans ses bras pour calmer ses pleurs je n'arrive pas à faire autrement qu'imaginer le pire. Au final, je ne sais même pas ce que serait le pire : qu'il découvre la vérité, qu'il soit blessé ou qu'il blesse involontairement Anna sous l'effet de la douleur ?

Puis l'inévitable se produit. Le bruit de l'eau couvre les cris. Je ne les perçois qu'en sortant de la douche. Simon hurle mon prénom. J'enroule une serviette autour de moi et me précipite hors de la salle de bain. Je parcours toutes les pièces avant de trouver mon mari dans la chambre d'Anna. Il est assis par terre, la tête blottie dans le creux de ses mains.

Moi - Chéri ?

Simon - Elle... il y a un problème Julia. Cette gosse n'est pas normale.

Moi - Je sais.

Simon - Comment ça ?

Moi - Je...

Suis incapable de lui dire que moi non plus, je ne suis pas normale. L'expression sur son visage en dit long. Je ne supporterais pas de le voir me regarder comme ça.

Moi - J'ai subi la même chose.

Simon - Elle t'a fait mal ?

Moi - Oui, en quelque sorte.

La peur que j'observais à travers ses yeux a tout d'un coup fait place à de la colère. Je me dois de défendre ma fille.

Moi - Ce n'est pas de sa faute. Elle n'a même pas un an, elle ne sait pas ce qu'elle fait. Tu ne peux pas lui en vouloir.

Simon - Pourquoi tu ne m'en as pas parlé ? Je suis en droit de savoir ce genre de choses il me semble.

Moi - J'avais peur de ta réaction. Elle reste notre fille !

Simon - Justement ! Tu comptais faire quoi ? M'empêcher de passer du temps avec elle pour garder le secret indéfiniment ? On doit gérer ça ensemble. On est une famille, non ?

Il prononce cette dernière phrase avec une telle douceur. Il n'est pas en colère contre Anna. C'est à moi qu'il en veut à cause de ce mensonge. Qu'est-ce que ce serait s'il savait que je lui mens sur moi-même depuis le tout premier jour ?

Simon - On va apprendre à s'occuper d'elle et de ce problème tous les deux.

« Ce problème ». C'est donc comme ça qu'il voit notre pouvoir. Je ne peux pas lui en vouloir. J'ai longtemps pensé comme lui après tout.

S'occuper de ce problème. C'est ce que nous avons fait. Pendant 8 années, nous avons élevé Anna en considérant ses capacités. Bien sûr, c'était plus facile pour moi à comprendre. Même s'il prétendait le contraire, Simon n'était pas du tout à l'aise avec la situation. Plusieurs fois, nous avons failli nous séparer. D'ailleurs, si nous sommes encore ensemble aujourd'hui, c'est très probablement parce qu'il n'ose pas me laisser seule avec notre fille.

Evidemment, Anna ne comprend pas pourquoi les autres n'étaient pas comme elle, ni pourquoi elle n'était pas comme les autres. C'est pourquoi je me dois de lui révéler qui je suis.

Moi - Tu as compris, ma puce ? Tu ne dois en parler à personne.

Anna - Pourquoi ? Papa est déjà au courant.

Moi - Papa ne sait pas tout trésor. Il y a certaines choses qu'il ne comprendrait pas.

Anna - Pourquoi est-ce qu'il ne comprendrait pas ?

Moi - Il n'est pas comme nous. Il n'a pas ce don. Il n'y a que nous deux qui pouvons savoir ce que ça fait de devoir vivre avec.

Simon - A quoi tu joues ? Arrête de lui embrouiller les idées ! C'est déjà assez compliqué comme ça, tu ne penses pas ?

J'étais tellement absorbée par ma discussion avec Anna que je n'avais pas entendu Simon entrer dans la pièce.

Moi - Tu n'étais pas parti travailler ?

Simon - J'ai oublié mes clés. Tu attendais que je sois parti pour lui retourner le cerveau ?

Moi - Tu es à côté de la plaque.

Simon - Oh vraiment ? Alors dis-moi. Tu ne jouais pas les super-héros il y a deux minutes ?

Anna - On est des super-héros maman ?

Simon - Non. Ton pouvoir n'a rien de héroïque, Anna. C'est pour ça que tu ne dois pas t'en servir. Et ta mère n'est pas comme toi.

Anna - Maman aussi a des super-pouvoirs. C'est elle qui m'apprend à contrôler les miens.

Simon - Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? Tu rêves d'avoir le même problème que ta fille maintenant ?

Moi - Ce n'est pas un problème. Et je n'ai jamais rêvé de l'avoir. Il nous est tombé dessus...

Simon - Tu... alors c'est vrai ? C'est à cause de toi que notre fille est ce qu'elle est ?

Moi - Si par-là tu veux dire une petite fille heureuse, drôle et gentille alors oui, je suis en partie responsable.

Simon - Pendant des années, tu as fait semblant d'être quelqu'un que tu n'es pas. Tu te rends compte que toute notre relation repose sur un mensonge ?

Moi - Tu aurais peut-être su la vérité si tu ne nous considérais pas comme des monstres.

Simon - Tu n'es vraiment qu'une sale...

Je vous passe le reste de la discussion suite à laquelle il fait sa valise et claque la porte sans jamais revenir. Je suis triste même si le sentiment qui domine en moi reste le soulagement. Ce qui me fait le plus mal au cœur, c'est Anna.

Je pourrais m'arrêter là et vous dire « ne mentez jamais ». Même si vous pensez qu'être honnête peut tout détruire ou qu'il est impossible de faire autrement, on peut toujours choisir de dire la vérité. La plupart du temps, elle ne détruit pas autant que le mensonge.

Mais je n'ai pas fini. Parce que tout ce que je viens de dire est faux. Parfois, la vérité tue. Au sens propre comme au sens figuré... alors je n'ai pas de message pour vous, simplement une histoire.

J'ai tenté de la dissuader de lui révéler la vérité à notre sujet. La dernière chose dont elle m'a parlé était son père. Pour elle, c'était la référence parfaite. Une raison suffisante pour ne pas cacher des détails aussi importants aux personnes qu'on aime. Mais lui, il n'était pas d'accord. Il l'a vite vue comme une menace et a décidé qu'il pouvait y remédier. Il voulait « l'empêcher de nuire ». Ma petite fille, si innocente. Anna est morte assassinée par son petit-ami à l'âge de 19 ans. Je n'ai rien pu faire pour éviter ça. Aujourd'hui, c'est mon tour. Après une vie remplie de secrets, de douleur et de chagrin, il est temps que je retrouve ma fille. 

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Dernier chapitre du mois de mai ! Il est un peu plus long mais un peu plus intéressant j'espère.
Donnez moi votre avis !

-Elo

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