8 - WAR CASUALTIES

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CE N'ÉTAIT DÉFINITIVEMENT PAS LA PREMIÈRE FOIS QUE JE ME RÉVEILLAIS SUR LE TORSE DE BUCKY. Quelques fois j'aurais préféré ne pas me souvenir de certaines occurrences. Notamment la fois où j'avais bavé sur son torse en dormant à son chevet -- mais peu importe. Cette fois-ci, avec le soleil se reflétant sur le torse pâle de Bucky, son cœur battant régulièrement contre mon oreille et son souffle chatouillant le haut de mon crâne, je ne voulais pas l'oublier. Pour rien au monde.

Je sentis son cœur s'emballer avant de se calmer, son souffle devenir légèrement moins régulier. Je fermai les yeux par réflexe et prétendis de dormir, voulant profiter encore un peu, avant qu'il ne me soit retirée à nouveau. Ses doigts, chaud contre la peau fraîche de mon dos nu, remontèrent du creux de mes hanches jusqu'entre mes omoplates. Malgré ma volonté, je ne pus restée immobile et frissonnais. Je le sentis rire sous moi.

— Chatouilleuse ?

Je me tortillai entre les draps et enfonçai ma tête dans son torse pour me dissimuler. Ça ne le fit rire que d'autant plus, et je souris.

— Tais-toi, laisse-moi dormir encore un peu.

Son rire chanta une nouvelle fois au creux de mes oreilles, et nous restâmes encore un peu dans cette position. Je ne savais pas exactement combien de temps, mais lorsque je roulais sur le ventre, tirant la couverture avec moi, le soleil était plus haut dans le ciel et Bucky était déjà à moitié rendormi. Il grogna en se retrouvant torse nu, et m'attira à lui.

— J'ai froid, se plaignit-il.

Je ricanai et me pressai contre lui. Il n'avait pas tort, il faisait effectivement plus froid lorsqu'on était séparés.

Mon rire se tarit dans ma gorge à cette pensée, et je ne pus empêcher une question traîtresse de s'insinuer dans mon esprit. Bucky remarqua mon trouble, et baissa ses yeux bleus vers moi.

— Ça va ?

Je levais les yeux vers lui, ignorant ses orbes bleues et me concentrant sur ses lèvres. Le rouge me monta aux joues. Tout compte fait, ce n'était pas exactement une bonne idée.

— Oui, oui.

Je tentais d'échapper à son regard en baissant mon visage vers son torse, mes doigts traçant des motifs inconnus sur son pectoral. Il saisit ma main dans la sienne, et je finis par croiser son regard. Sa main lâcha la mienne et vint se poser sur ma joue en voyant des larmes emplirent mes yeux.

Je détestais pleurer. C'était stupide de le préciser ; qui aimait pleurer ? Le simple fait de pleurer était ridicule, et inutile. Ça n'avançait à rien. A part si on voulait avoir les yeux rouges bordeaux et gonflés, sans oublier les reniflements disgracieux qui venaient avec.

Mais bien sûr, avec les temps dans lequel ils vivaient, pleurer finissait par faire parti du quotidien de tout un chacun. On ne pouvait pas y échapper. Certaines choses devenaient simplement plus sensibles que d'autres.

Je m'étais retenue de pleurer depuis deux semaines. Depuis que j'étais rentrée, en somme. Une femme était venue me parler, lorsque j'étais sortie de la gare bondée. Elle m'avait approchée en lisant le nom sur mon uniforme d'infirmière. Elle m'avait remerciée, sans que je ne comprenne trop pourquoi.

Et puis, elle m'avait expliqué que j'avais tenté de sauver son mari, en Afrique. Elle avait fondu en larmes et était partie quelques moments après, disant juste qu'elle ne voulait pas que je me sente coupable de ne pas avoir réussi à le sauver. Je ne savais toujours pas quelle était le pire dans cette histoire. Que son désespoir ait été aussi grand, ou que j'eusse été incapable de savoir de quel homme elle parlait. Je détestais cet aspect de la guerre, mais y contribuait malgré moi. Quand un soldat mourrait, ce n'était plus qu'un numéro, qu'un dommage collatéral de plus. Un de plus. Une veuve de plus. C'était tout ce qu'on était dans cette boucherie, au final.

timeless ── bucky barnes¹Where stories live. Discover now