| Chapitre 16 |

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(Média : musique d'ambiance) 

         Brûlure du Soleil dévisagea sa sœur, les larmes aux yeux. Non... elle ne peut pas faire ça ! Pourquoi ?! Il se précipita à côté d'elle et lui lécha la joue. Tintement Lunaire feula et le repoussa comme si on l'agressait. Tout le monde l'observait ; Petite Immortelle aussi avait ouvert un œil pour voir ce qu'il se passait. La petite chatte était toute frêle et tremblotante. 

 « Tintement Lunaire... Pourquoi tu ferais ça ? » l'interrogea le mâle roux, confus, la gorge serrée. 

    La noiraude le foudroya du regard. Les autres derrière restaient immobiles, ce n'étaient pas leurs affaires, après tout... 

 « J'aime pas qu'on me touche. T'es peut-être mon frère mais t'a rien comprit. Y'a personne qui sait quelque chose de moi et ce sera jamais le cas. Ça fait depuis que j'suis apprentie que je veux mourir. T'a vu quelque chose ? Non. Personne a rien vu. Personne m'a jamais comprit. Je hais le monde, du premier jusqu'au dernier des félins, tout le monde me fait du mal et s'en rend même pas compte. Ce monde n'en vaut pas la peine et je ne vaux pas la peine pour ce monde, j'arrive même pas à élever trois chatons, même le seul qui survit je suis obligée de le laisser à des gens que je connais même pas... » murmura la femelle ébène, les yeux mi-clos pour s'empêcher de pleurer. 

    Elle s'aperçu que ses interlocuteurs semblaient avoir de la peine pour elle. Elle les toisa un par un avec mépris et grommela : 

 « J'en veux pas de votre pitié. Maintenant, laissez-moi partir ! » 

    Elle fonça tête baissée pour se frayer un passage entre ses anciens camarades, qui furent obligés de la laisser passer. Brûlure du Soleil s'empressa de lui barrer la route, cependant sa sœur ne se laissa pas impressionner, elle continuait à charger, comme un bélier, dans une direction hasardeuse. Le guerrier roux s'entêtait à vouloir la rattraper, ne voulant pas qu'elle commette l'irréparable. Il s'accrocha à sa queue et à l'une de ses pattes arrières, et la noiraude trébucha sur le coup. Elle se dégagea et se releva, la tête haute et les yeux emplis de dédain, bien décidée à ce que personne ne se mette en travers de sa route. Elle reprit sa course, or, sans surprise, le mâle flamme la poursuivit. Elle s'arrêta net et fit volte-face, ses grandes pattes fines s'opposant et dominant celles du rouquin, qui en avait des petites et larges. 

 « Va t'en, Brûlure du Soleil. Va t'en. Je vais partir ici et maintenant. Alors va t'en, » gronda t-elle. 

    Il secoua désespérément la tête, les yeux plein de larmes. Il arbora un grand sourire et ravala ses sanglots, et commença à dire tout ce qu'il pensait de si positif... 

 « Ne pars pas, Tintement Lunaire... Tu sais, il y a tellement de personnes dans ce Clan qui se sont inquiétés de ta disparition... Ne t'en va pas, tu nous ferais souffrir. La vie est belle, hein, n'est-ce pas ? Il faut laisser le passé derrière nous et se concentrer sur le présent. Y'a des hauts et des bas, d'accord ? La suite sera pleine de bonnes surprises, je t'assure. Après tout, toi et moi, avons toujours une fratrie soudée, pas vrai ? Tu seras heureuse, d'accord ? Reviens au Clan, Fissure du Sol et Clair-Obscur seront si heureux de te revoir. Vois le bon côté des choses. Rappelle-toi de ces bons souvenirs. Il n'y a rien de plus beau que la vie, tu ne crois pas ? Il y a tant de lumière le jour, et même la nuit il y en a, ça veut tout dire, que rien n'est jamais totalement ténébreux. Je te soutiens, hein, Tintement Lunaire ? Écoute-moi, soit optimiste, sourit, la vie serait ennuyeuse s'il n'y aurait pas quelques petits malheurs, pas vrai ? Alors dis-toi que ce ne fut qu'un mauvais moment à passer, et oublie tout ça, n'est-ce pas ? Tu as tant de choses à découvrir, tant de choses à vivre, tu vas voir tous les bons moments que tu peux passer, hein ? Oublie pas que tu n'es jamais seule, que moi ou d'autres personnes peuvent toujours t'aider et seront toujours là pour toi. Il suffit de te dire que tout va bien ! Tu as beau dire que l'on ne te connaît pas, moi si je te connais ! T'es ma sœur après tout ! La mort ça sert à rien ! La vie c'est plus marrant ! C'est un cadeau, la vie, faut pas le repousser, tout le monde doit en profiter y comprit toi ! Reviens avec nous, tu verras à quel point tu vas t'amuser ! Allez, Tintement Lunaire, tu... » 

    Une lueur vermeille l'éblouit, de la même façon que s'il était éclaboussé. Il cilla plusieurs fois, peu à peu, une vision d'horreur apparaissait. Elle l'avait fait. Elle s'en fichait de ce qu'il lui racontait. Elle avait tranché son œil de glace, brisant ainsi tout éclat de ce dernier. Il n'en restait à présent que des bulles de sang pourpres qui traînaient sur le sol. Le sang coulait si vite que l'hémorragie créait dans l'herbe un fleuve carmin. Le matou au pelage embrasé avait l'impression que sa tête s'était retournée tant l'émotion était intense. 

 « Non... ! s'écria t-il, incrédule. Elle n'a pas pu... Tintement Lunaire... C'est... c'est pas possible, hein... ?! C'est une très bonne blague... C-c'est bon... J'ai compris... Tintement Lunaire... R-réveille-toi... T-t'es pas morte, hein ? C'est pas possible, que tu le sois, pas vrai... ? Tintement Lunaire... T'es ma sœur... Tu peux pas mourir... Surtout pas comme ça... Pourquoi tu ferais ça, hein ? C'est totalement stupide... La vie est... forcément belle... C'est pas bien de mourir... Alors ce n'est pas possible... Qu'elle le fasse... C'est impossible... » 

    Tornade Spiralée se glissa à côté de lui, chagrinée en voyant le cadavre ensanglanté d'une guerrière qu'ils avaient tant cherchés pour au final qu'elle finisse comme tel... Elle a dû subir des choses horribles durant sa disparition... songea la rouquine, déprimée. 

 « Je suis désolée, Brûlure du Soleil, » murmura t-elle. 

    Elle n'osait pas le regarder dans les yeux. Ces derniers étaient fous, emplis de chagrin et d'incompréhension... Perdre sa sœur de cette façon était une chose que le guerrier roux, si naïf et si optimiste, n'aurait jamais pu concevoir. C'était pour cela qu'il n'y croyait pas et ne voulait pas y croire. Parce que pour lui, ni la mort, ni la souffrance, ni le chagrin n'existaient. Leur clan avait beau être en pleine dépression, lui y était aveugle. Il ne voyait que leur part de bonheur, qui était, pour beaucoup de membres, maigre voire inexistante. Là où des personnes verraient en tout le monde de l'amertume et de lourds souvenirs, lui, verrait à la place un doux passé et de la joie de vivre. La vie n'était pas un long fleuve tranquille, et ce n'était qu'aujourd'hui que Brûlure du Soleil commençait à en prendre conscience, bien qu'il soit obnubilé par sa façon trop positive de penser.
  Celui-ci répétait en boucle les mots : « C'est impossible, elle ne peut pas avoir fait ça ». La femelle aurait aimé lui crier que Tintement Lunaire venait bel et bien de se suicider pour lui faire enfin comprendre, nonobstant elle jugea cela trop brusque et violent. Alors elle se tut et préféra le laisser seul. 

    La patrouille resta longtemps dans les alentours avec leur camarade, ne voulant pas l'abandonner. Ainsi, ils pouvaient examiner Petite Immortelle pour oublier un peu ce qu'il venait de se passer. La petite avait les deux pattes avants brûlantes et noircies, les poils à cet endroit étaient devenus raides et la chatonne gémissait au moindre frôlement. Il était évident qu'elle avait effleuré des flammes, probablement celui que Tornade Spiralée avait vu tout à l'heure, éteint... 

    Comment allaient-ils rentrer au camp en annonçant deux drames pareils ? Entre Tintement Lunaire qui s'était mutilé l'œil et Petite Immortelle qui possédait les deux pattes avants sans doute invalides, ils auraient aimé ne pas faire partie de ce groupe pour ne pas avoir à ramener de si mauvaises nouvelles... 

NDA 

Voilà pour ce chapitre ! Vous a-t-il plu ? (Je sais, il est dramatique...) 


LGDC Tragédies ~ Cycle 3 : Renouveau ~ Tome 1 ○ Malédiction ○Où les histoires vivent. Découvrez maintenant