Chapitre 123 : La forêt des Sapins-Rois

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Peut-être aurait-elle dû attendre Keiji.

Il était clair qu'avoir à ses côtés un Fils des Cendres et pas n'importe lequel, était des plus rassurants lorsqu'on s'aventurait dans ce genre d'endroit. Son aérocar s'arrêta à la lisière de la Forêt aux Lucioles. Elle était souvent venue mais jamais toute seule. Toujours accompagnée d'un groupe d'alumni armés. Toutes les fois, elle n'avait jamais eu de problème avec les loups blancs géants qui y pullulaient. Mais aujourd'hui, elle était toute seule. Elle prit une profonde inspiration et sortit du véhicule. Elle ne pouvait pas prendre son aérocar car les sentiers étaient trop étroits. Charlaine portait une grosse doudoune blanche, un pantalon rose clair et des bottes aux semelles épaisses grises. Elle mit ses caches-oreilles et prit sur le siège avant côté passager, un sac à dos où elle avait mis des barres énergisantes, un thermos remplit de café et deux gamelles pour le repas de midi. Elle espérait réellement le trouver. Elle était déterminée à le retrouver. Et s'il était parti sur un coup de tête, il était possible qu'il n'ait rien pris avec lui.

Néanmoins, cela ne suffirait pas pour qu'il meure de faim, vu qu'il était un ignemshir sans compter qu'Evan était un très bon chasseur. Tout comme Keiji et Alejandro. Jahandar lors de leur escapade en forêt lui avait appris pas mal de chose, Princeton également. Quant aux deux autres, ils l'avaient appris soit avec leurs grands-parents, soit leurs parents. La portière côté conducteur pivota vers le bas et se verrouilla.

Charlaine se sentit observée.

Elle se retourna mais ne vit personne.

Juste une forêt de troncs sombres et épais qui se succédaient.

— Keiji avait peut-être raison, murmura-t-elle à voix basse en essayant de calmer son cœur qui battait à la chamade. Mais je ne peux plus reculer.

Résolue, elle pénétra dans la forêt de sapins-rois.

Les sapins-rois. Deux fois plus grands que des sapins normaux, ils étaient apparus une centaine d'année après l'Effondrement des Cieux. L'extrémité de leurs épines étaient argentées et quand venait la nuit, elles luisaient comme une myriade de lucioles. Lorsqu'elle venait camper dans la forêt avec les garçons, Charlaine ne se lassait jamais du magnifique ballet des épines de lumière qui dansaient sous le vent nocturne. Pour le moment, les larges branches enneigées étaient semblables à celles de n'importe quel sapin. Une épaisse couche de neige recouvrait le sol et le vent glacial annulait les bienfaits des rayons de soleil. Elle marcha pendant une vingtaine de minutes sans cesser d'appeler son nom. Elle était convaincue qu'il était là, quelque part. Sa jeep était toujours garée devant chez lui, donc il était parti à pied. Et l'itinéraire qu'il avait emprunté menait tout droit à ici.

— Evan !

Il allait bien finir par répondre. La forêt s'étendait sur plusieurs centaines hectares mais elle ne marchait pas à l'aveugle. Il y avait plus à l'ouest, une clairière où ils avaient l'habitude de camper. En général le Karan et la Niera se formait très rarement au cœur même de la Forêt aux Lucioles, toujours dans sa périphérie. C'était pour cela qu'ils se permettaient de venir camper même si une fois, ils avaient bien failli y rester. Ils avaient échappé à la mort grâce à l'Icare civile que louait Keiji et qu'ils prenaient en général pour venir ici. Ce dernier profitait de l'autorisation dont bénéficiaient ses parents de survoler Paris-la-Nouvelle, ce qui était interdit en temps normal. À sa connaissance, sa mère n'en savait rien.

Charlaine entra dans une zone où les branches et les troncs des sapin-rois étaient noirs comme du charbon. Les effets du Karan. Ces arbres étaient morts. Charlaine se sentit de nouveau observée. Elle se retourna et vit quelque chose disparaître derrière les branches noires des sapins morts. Elle ramena son sac à dos contre elle et en sortie un incapaciteur, il s'agissait d'une arme de poing qui tirait des décharges électriques dont les effets allaient de la paralysie à l'évanouissement en fonction de son intensité. Elle l'avait pris dans l'armurerie de son père. Elle referma le sac à dos et l'enfila. Si jamais elle croisait un loup géant, elle pourrait le mettre K.O avec ça. Normalement. Elle était douée à l'entraînement mais tirer sur une cible mobile mais inoffensive n'étaient pas la même chose que tirer sur un monstre assoiffé de son sang. Elle s'avisa que la main qui serrait la crosse du pistolet tremblait. Elle respira profondément puis continua d'avancer. Il ne lui restait normalement encore qu'une quinzaine de minutes de marche avant d'atteindre la clairière. La forêt s'avéra silencieuse. A part le bruit de ses pas s'enfonçant dans l'épais tapis de neige et quelques hululements, elle n'entendait que le bruissement des branches sous le vent glaçant.

Ignemshirs - Tome 1 :  Fils des Cendres (ANCIENNE VERSION)Where stories live. Discover now