Chapitre 17 : Insomnies et jardins secrets

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Sentant que Juvia s'appuyait de plus en plus sur lui pour marcher, même si elle se bornait à ne pas se plaindre, par fierté ou peur de le déranger, Grey proposa qu'ils fassent une halte en s'asseyant sur un banc. Cherchant de quoi s'occuper, ne trouvant aucun membre de son groupe disponible pour répéter un de leurs nouveaux arrangements, le jeune homme avait erré un long moment dans les couloirs, le matin même, avant de tomber sur son garde du corps qui semblait aussi ennuyée que lui. Encore en convalescence, et quand on voyait la difficulté de la jeune femme à marcher trop longtemps on comprenait pourquoi, Juvia ne pouvait rejoindre ses collègues aux terrains d'entraînement, et la bibliothèque ne la tentait pas plus que ça. En plus elle avait croisé Levy, qui en revenait, serrant un livre sur sa poitrine d'un air terrifié en marmonnant quelque chose à propos du respect des meubles et du manque de politesse que constituait l'acte de s'embrasser comme ça dans un lieu public. La petite écrivaine semblait si choquée que Juvia n'avait pas voulu pousser plus loin l'enquête, mais elle espérait vraiment que ces deux personnes n'étaient pas ceux à qui elle pensait.

Bref, les deux rescapés de la prise d'otage de Tartaros se baladaient depuis une bonne heure déjà dans l'immense serre intérieure qu'ils avaient découvert par hasard en fuyant le secteur de Kana, ne voulant à aucun prix savoir ce qui se déroulait derrière cette porte au vu des cris qui résonnaient jusque dans les couloirs d'à côté s'en dégageant. Le jardin intérieur situé entre l'aile militaire et l'aile des domestiques leur avait donc semblé une bonne alternative, et surtout un lieu calme. Avec tous ces excités qui les entouraient matin et soir, la compagnie apaisante de l'autre et la douce odeur des fleurs leur paraissait presque paradisiaque.

Se relaxant contre le dossier de pierre du banc en granit, Juvia détailla donc son environnement de ses grands yeux bleus ayant désormais perdu toute trace de fièvre. Ce qui n'empêchait pas occasionnellement Grey de la fixer, "juste pour être sûr". Il n'y avait pas à dire, l'endroit était vraiment magnifique. Deux chemins destinés à la promenade serpentaient entre les immenses fougères en pot et les grands massifs floraux. Evidemment pas d'arbre à l'horizon, mais ce petit cocon de verdure permettait tout de même de profiter d'un bout de nature quand les grêlons au dehors ne laissaient personne sortir sous peine de se retrouver avec quelques bosses. Le temps n'avait fait qu'empirer depuis le matin, et tous leurs amis affirmaient que le changement de température se faisait brutal, entre Fiore et Arvaless. 

Juvia et Grey s'étaient regardés avec un sourire amusé en haussant les épaules. Pour eux qui avaient passé les mois dans les geôles souterraines de la mafia doralmienne, rien ne changeait vraiment.

Le frère adoptif de Lyon s'arracha à sa contemplation silencieuse des pétales d'une jonquille non loin pour se tourner vers sa compagne, qui elle en revanche regardait toujours avec admiration le pteris verdoyant qui ornait un coin du massif floral. Elle possédait une capacité à apprécier le moment qui sidérait Grey, lui même incapable de tant de joie pour les choses du quotidien jugées à la limite de l'ennuyant. Juvia lui faisait parfois porter son attention sur de merveilleuses choses de la vie de tous les jours que son tempérament taciturne, voire désabusé tendait à ne pas remarquer ou à laisser passer trop facilement. La jeune femme avait à sa manière participé à affuter son sens de l'observation, et grâce à ce dernier, il remarqua très bien que ses yeux malgré la vie les animant étaient un peu rouges, et que les cernes sur le haut de ses joues n'allaient vraiment pas en s'améliorant. Il lui posa une main sur l'épaule afin d'attirer son attention.

- Dis Juvia, ça va pour dormir en ce moment ? Les nuits ne sont pas trop difficiles ? demanda t-il, préoccupé par sa santé car personne ne pouvait savoir mieux que lui ce que ces mois de captivité faisaient d'eux lorsque la nuit venait à tomber, les laissant seuls et misérables pour affronter leurs angoisses sous la couverture, fragile bouclier contre leurs démons secrets.

Bodyguards [Tome 3]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant