Chapitre 4 : Étrange et dérangeante sensations

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Je souffle fort et j'essaie de faire ralentir les battements de mon cœur. Ce n'est pas évident en entendant des grondements graves et sourds derrière la porte. Et puis d'un seul coup ... plus rien. Je me redresse et je vais discrètement vers la fenêtre qui donne sur le perron, et plus personne n'est en vu.

Bon dieu, je n'en menais pas large. Il faut le dire, ces hommes m'avaient l'air menaçant. Mais je ne peux pas me taire ? Il aurait pu me tuer en deux secondes et moi je ne trouve rien de mieux à faire que de les provoquer. Définitivement, je crois que je suis légèrement folle.

J'avoue ne pas comprendre ce qui vient de se passer. Cette scène me paraît absurde, dérangeante. Ses paroles me reviennent en boucle, et je ne pense pas qu'il bluffait. Mais pourquoi avoir trouvé le besoin de venir me menacer comme cela ? Il y a quelque chose qui ne va pas, je n'en démordrai pas. Surtout après ce qui m'est arrivé hier au village. Je me pose de plus en plus de question sur ce séjour, et comme je me le dis depuis mon arrivé, cette offre était trop belle pour être vraie.

Et puis ... Un maire, la trentaine avec une allure d'homme sauvage, habillé d'un jean et un tee shirt noir froissé ? Les cheveux noirs rasés sur les cotés et long dessus avec une tresse collée au crâne sur son coté droit, vraiment ? Il m'avait plutôt l'air d'un grand seigneur viking, ou à la rigueur un ours mal léché. Son regard pénétrant et intense qui ne reflétait que peu de chose. Grand, très grand même, avec une prestance, une aura écrasante qui n'avait rien à voir avec le fait qu'il soit doté d'une musculature développée et de larges épaules.

Et ses deux acolytes, et bien je les appelle comme cela car c'est l'impression que j'en ai eu. En retrait mais prêts à me sauter à la gorge. Avec la mine vraiment pas aimable, l'un blond plus tôt petit mais très massif, sans cou avec un regard brun sauvage et l'autre châtain foncé,  grand, élancé, nerveux au regard gris. Avaient-ils besoins de venir à quatre pour me souhaiter la bienvenue ? Ou devrais-je dire la malvenue ? Ce mec avait-il besoin de renfort pour me maîtriser ? Franchement, c'est grotesque. Et Louis, Louis qui avais un comportement très étrange. Il a un visage des plus aimables, une aura chaleureuse et sereine pour les fois où je l'ai rencontré. Et pourtant, là, il m'aurait fait penser à un chien battu qui obéit à son maître qui le siffle.

Cette situation me turlupine toute la matinée. Je ne comprends pas cette agression. Qu'est-ce qu'ils veulent que je sois venue faire ici, franchement ? Sans être sexiste, ils pensent que je suis dealeuse de drogue ou braconnière ? Non pas qu'une femme ne pourrait pas l'être, mais ils ont vu ma tête ? Et s'ils se sont un tant soit peu renseignés au près de Louis, ils saurent que je suis une vétérinaire, sans beaucoup d'amis, sans histoires, qui passe le plus clair de son temps entourée de bestioles à poil et à bosser. Et je ne peux même pas faire ma fouine et faire mes petites recherches sur Monsieur Connard puisqu'il n'y a pas de réseau, ici comme en ville. C'est frustrant.

Quand je suis arrivée, je me suis sentie tout de suite à ma place dans cet endroit, une bouffée d'oxygène que je n'avais pas ressentie depuis longtemps. L'avais-je déjà ressentie si intensément ? Avec cette absolue sérénité, je n'en suis pas sûre. Mais il a fallu que je croise le genre humain par deux fois pour qu'on me bousille cet apaisement, ce sont mes vacances, merde ... du balai. Ce n'est pas comme si j'en prenais souvent qui plus est. Ce sont mes premières, depuis que j'ai commencé à travailler. En fait pour être plus précise depuis mes dix-huit ans. Je ne le réalise que maintenant, cela fait 10 ans déjà. Alors que l'on me fiche la paix et qu'on me laisse vivre, bon sang !

Après un petit déjeuner, je prépare mes affaires pour aller faire une petite randonnée dans les bois et oublier mes mauvaises aventures. C'est plus ou moins ce que j'avais prévu en venant ici. Oublier ma vie, refaire le point sur moi même, rechercher et comprendre ce qui me manque tant pour être comblée et heureuse. J'y aspire tellement que cela me sert le cœur.

Au départ, j'ai fait des études pour être médecin. Plutôt à l'aise en sciences et plus exactement en génétique, ce qui en a surpris quelques uns dont moi-même. Ça plaisait à ma mère qui a cru pendant des années avoir donné la vie à une imbécile. Vous comprenez, je suis rentrée dans ses petits papiers en allant en fac de médecine, cela faisait bien devant ses amis. Mais soigner des humains ??? Nan ... trop pour moi. J'ai toujours été une amoureuse de la nature et je me suis toujours sentie à l'aise avec les animaux. Ils sont fidèles, ils ne cachent pas de mauvaises intentions, quand ils vous aiment et vous font confiance, c'est inconditionnel. Et quand ils ne peuvent pas vous piffrer, ils vous le font savoir. C'est simple et honnête comme relation. Et j'aime cela. Alors quand j'ai bifurqué dans des études vétérinaires cela n'a pas été au goût de tout le monde. Je me suis spécialisée en génétique et comportements animaliers pour les grands prédateurs et plus exactement les félins. Les zoo ou les réserves m'appellent et je me déplace souvent. C'est un métier que j'aime profondément même si il me fend le cœur parfois. L'espèce humaine fait vraiment de grand malheur.

Donc me voilà ici, pour explorer cette forêt qui m'appelle depuis mon arrivé et qui elle, n'est pas récalcitrante à ma personne. Je prends un sac, je chausse mes chaussures de marche et je m'en vais pour ma petite escapade. Je ne suis pas une grande sportive, regardez mes fesses, elles vous le diront. Mais marcher dans des espaces tels que celui-ci, c'est dans mes cordes et c'est le paradis. J'espère avoir la chance d'observer des espèces animales et voir leurs comportements dans leurs milieux naturels. Même si les grands prédateurs ont disparu des forêts depuis longtemps, le règne animal est très riche malgré tout et cela me met en joie de pouvoir les observer, ils sont fascinants.

Au bout de plusieurs heures, je repère une clairière absolument magnifique. Tellement fleurie, odorante, chaleureuse que je m'assois contre un arbre pour m'en imprégner. Je sors mon carnet et mon crayon et je commence à écrire. Une habitude que je fais de temps en temps, mise en place par une psy que je n'ai vue que trois fois. Elle me disait de coucher sur le papier ce que je ressentais même si je ne le comprenais pas, de détailler les évènements qui m'ont mise en difficulté de compréhension émotionnelle et qui m'ont perturbée. Elle me certifiait que cela pouvait m'aider à m'apaiser et à comprendre. Et j'avoue que parfois quand je suis confrontée à une trop grande quantité d'émotions, à des circonstances stressantes et qu'elles me font cogiter encore et encore, je me prête à cet exercice.

Alors j'écris, j'écris tellement que je ne vois pas le temps passer. Que j'oublie même où je suis, qui je suis. Au bout de quelques minutes, je ressens une énergie grondante, menaçante, écrasante. Je remarque, alors l'absence de bruit, un silence total.
Ceux qui disent qu'une forêt est silencieuse, c'est qu'ils n'écoutent pas et ne font pas attention. Alors quand le temps semble s'être arrêté en cet instant, j'éprouve un moment de panique et de stress écrasant.

Quand soudainement un nuage, une ombre place la clairière dans une pénombre inquiétante. Quand je relève doucement la tête, le soleil se fait éclatant et l'ombre a disparu. J'expire enfin, je n'avais pas conscience d'avoir retenu mon souffle. Je deviens dingue ? Mais ce silence persiste encore, alors suivant mon instinct, le cœur battant, je me remets à fonctionner. Je range vite mes affaires, prends mon sac et me retourne pour repartir au chalet. Mais je me stop net. Mon cœur bat à toute allure et je suis figée, les muscles contractés par l'effort. Là au fond, de l'autre coté de la clairière, à travers les arbres, un mouvement m'interpelle, furtif et rapide. Je reste là paralysée par une peur que je ne comprends pas, je me sens observée. Je respire un grand coup, et regarde frénétiquement autour de moi ... mais rien, il n'y a rien. Et tout d'un coup dans un sursaut, la forêt se remet à vivre. Ni une ni deux, je me précipite sur les pas empruntés  à l'aller et je me rends vite dans la chaleur accueillante de mon chalet.

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Pour vous chères lectrices :

Je prends mon temps pour bien mettre en place l'histoire, et j'essaie de garder une part de mystère pour vous laissez imaginer les choses, pour vous faire réfléchir et j'espère pour rendre votre curiosité trop grande pour que vous ne lâchiez pas mon histoire en cours de route^^. Je prends énormément de temps à lire et relire mes lignes pour enlever le plus de fautes possible, je ne suis pas très forte en orthographe mais je fais beaucoup d'effort pour que mon récit soit agréable au mieux pour vous.
Donnez moi vos impressions, à bientôt pour la suite ^^.

THE FORGOTTEN - Tome 1 : La forêt des oubliésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant