Le début du voyage

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Jace

Je contemple les photos que maman m'a données dans la cabane, il y a quelque jours. Je ne fais que les fixer, toujours captif d'une émotion différente. Chagrin, admiration, colère, amour. Au final, je ne sais quelle émotion triomphe.

- Elle est belle hein ?

Je hoche la tête, les yeux collés au visage d'une femme qui m'est à la fois familière et étrangère.

- Mira, tu peux me passer la confiture de fraise ?

Ma manager, encore éberluée par sa présence, met un certain temps à réagir à sa demande. Il y a deux jours, l'une des fenêtres de la cuisine a éclaté en milles morceaux. Si nous pensions que les paparazzis avaient dépassé les bornes en tentant de s'introduire chez nous, nous avons eu la surprise de découvrir une belle femme noire, habillée comme à son habitude avec élégance, atterrissant sur le parquet de notre cuisine avec la classe d'une agent secrète. Elle a battu tous les rôles de flics ou voleurs que j'ai obtenus dans mes meilleurs films d'action.

- Tu ne m'as pas laissé le choix, Jace Alexander.

- Oh, salut Mira ! Ça fait si longtemps !

Elle n'a pas pu répondre. Depuis ce petit incident, elle est restée dans un état végétatif. Nous l'avons invitée à rester au chalet quelques jours, le temps qu'elle reprenne ses esprits.

- Oh Mira, tu vas rester comme ça encore longtemps ?

Dans un geste lent, elle donne le pot de confiture à maman, avant de croquer dans sa tartine beurrée.

- Laisse lui temps, Jace. Au fait, il paraît que Jonathan s'est réveillé.

Je baisse les yeux sur mon croissant.

- Tu vas rester comme ça encore longtemps ?

- Laisse moi du temps, maman.

Elle hausse les épaules. Et si du temps, tu n'en as pas ? semble t-elle me dire. Je me remémore le goût de ses lèvres, les fragrances de son corps, la beauté de ses yeux. Tout me manque. Je prends mon portable avec détermination, l'ouvre avec maladresse, cherche son numéro dans mes contacts avec hésitation, et finis par reposer pitoyablement le petit engin électronique sur la table. Lorsque, quelques secondes plus tard, il vibre, mon cœur bondit hors de ma poitrine. Il y a un message.

De lui.

«Rejoins-moi à la cabane à 18 heures. Je t'attendrai. »

. . .

Je me sens comme le mec qui va se prendre un râteau par son premier amour. Maman et Mira m'ont... aidé à choisir une tenue. Pas de chemise blanche pour ne pas paraître trop sérieux, ni de chemise à carreaux pour ne pas avoir l'air trop négligé. Bien que j'ai insisté pour porter mes vêtements habituels, Mira m'a obligé à mettre un pull fin couleur crème au col roulé qui d'après elle, se marie très bien avec mon teint. Un pantalon noir, les bottes les plus propres que j'ai et un blouson non usé. Il aura fallu lui parler de mode pour qu'elle sorte de son mutisme.

Il aura fallu un message pour que je me décide à le revoir. Je suis terrorisé. Le chemin jusqu'à la cabane est bien trop rapide et je sens que je ne suis pas prêt. J'aurais presque aimé qu'il y ait plus de paparazzis devant chez nous pour qu'il me soit plus difficile de sortir. Je grimpe en silence, le plus lentement possible, avec un chaos de pensées contradictoires qui explose dans ma tête. Mais je finis bel et bien par arriver au sommet, devant cet homme blond qui observe l'un de mes tableaux décrépit. Une plage orange sous la lueur d'un soleil couchant. Il se tourne et dessine sur ses lèvres un sourire qui me fait tomber à nouveau. Il hausse les sourcils, perd son sourire et pointe du doigt ma tête.

Le Jeu [B&B]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant