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Quelques temps plus tard, tous les survivants se trouvèrent sur une île abandonnée. Sur une pierre qui était près de la mer, on avait gravé le nom de tout ceux qui étaient partis. Souvent, lorsque j'étais prise d'insomnie, en revoyant encore et encore son corps étendu mort, en rêvant de ses bras qui devraient me serrer fort, fort, pour m'étouffer, pour que le douleur s'abrège, en étant obsédée par ses yeux, ses lèvres, qui me rendaient folles, je me levais et allais m'asseoir près de cette pierre, en touchant du bout des doigts son prénom gravé, les creux, les ondulations du "w". Puis, je posais le front sur la gravure en espérant que cette pierre froide devienne l'être empli de chaleur, de bienveillance, que je désirais.

Le soir où Thomas se réveilla, Vince fit un discours. On leva nos verres pour porter honneur aux morts. Je le fis, les yeux baissés au sol, mais je me mis à pleurer, encore une fois.

Le chagrin ne guérissait pas, bien au contraire. Plus le temps passait plus je devais faire face au futur, car je devais avancer. Mais c'était si dur. C'était une plaie sur laquelle, chaque matin, on versait du sel. Oh, Dieu, j'aurais tant voulu me réveiller avec lui, croiser son regard, embrasser ses lèvres, trembler sous ses caresses.

Les jours passaient, sans aucune distinction. Je passais mon temps assise, à regarder les nuages, les vagues, les brins d'herbe. Ma vie n'a plus de sens. Il était ma boussole, il me guidait dans la nuit sombre, involontairement. J'ai besoin de lui, de ses sourires.

Je fixe le sable quand Gally s'assoit à côté de moi.

« Salut, me fait-il »

Je le regarde.

« Je te demande pas comment ça va.

- Ce serait idiot.

-Ouais. Juliette, tu sais que tu me plais, n'est-ce pas ?

- Oui, je sais.

- Ecoute, je...j'ai une proposition à te faire. »

Je lève mon regard vers lui.

«  Je t'écoute.

- Premièrement, je suis terriblement désolé que tu ais perdu Newt. Deuxièmement, je pense que tu resteras toute ta vie triste si tu ne te changes pas les idées.

- Qu'est-ce que tu me proposes ? De baiser pour oublier ? fis-je, sourcils en l'air

- Eh bien oui.

- Je ne sais pas. J'aurais l'impression de tromper Newt.

- Il est mort. »

Biiip. Piqure de rappel. Je détourne le regard, larmes aux yeux : lui m'observe, sans rien dire.

« Gally, je suis fragile. Je pleure sans arrêt quand j'ai mal. Ça ne tient pas qu'à Newt, il y a moi, aussi. J'ai peur de me briser en me mentant. J'ai peur de tomber amoureuse de toi, alors que je ne veux pas tourner la page. Je veux oublier la douleur, pas l'amour. Et, plus que moi, il y a toi. Je ne peux te permettre ce dont tu as besoin et envie. Je ne peux pas non plus te dire que je serai tout à toi, et c'est ce que tu veux. Tout deux, nous avons des besoins différents et je ne suis pas sûre que nous pourrions nous satisfaire mutuellement. Pardonne-moi de ne pas avoir de réponse concrète à te donner, même si, pour l'instant, tu dois bien te douter que c'est plus qu'un non qu'un oui. »

Après un dîner, je fis face à Minho et Thomas. Je ne leur avais parlé depuis le jour où nous sommes arrivés sur cette île. Je ne pouvais assumer mon chagrin devant eux, en particulier devant Minho, qui le connaissait depuis trois ans. Tout trois étaient meilleurs amis et moi, fraîche arrivante d'environ deux mois, je pleurais sans arrêt, alors qu'eux ne laissaient rien paraître de leur douleur. Je me sentais coupable d'être brisée. Pourquoi ne pouvais-je pas être forte comme tout le monde, comme eux ?

« Salut, me dit Thomas

- Salut, répondis-je »

Minho m'examina, entre la perplexité et l'inquiétude.

« Est-ce qu'il t'a écrit quelque chose, à toi ? me demanda le brun

- Ecrit ? fis-je, sourcils froncés

- New...il t'a pas écrit de lettre ? me fait-il en me montrant une lettre chiffonnée »

Je regarde la lettre puis retiens un sanglot.

« Non...mais, celle-là, je l'ai aidé à l'écrire, ou du moins à structurer.

- D'accord...il ne t'en a pas écrite une ?

- Non. Il voulait, mais j'ai refusé.

- Pourquoi ?

- Je ne veux pas avoir à lire et relire une lettre. Ma tête revoit déjà toute seule, elle n'a pas besoin d'avoir une trace écrite avec laquelle se torturer. »

«Mon Ange» | Newt X oc - le LabyrintheWhere stories live. Discover now