Chapitre 14

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14 décembre

Cheryl

   J'observai Julie en silence depuis quelques minutes, allongée près d'elle dans mon lit double.

   Après avoir été la chercher, complètement ivre dans une rue sombre, je l'avais réveillée et ramenée jusque chez moi, où elle s'était rendormie brutalement.

   Cependant, même en la sachant en sécurité chez moi, l'inquiétude que je ressentais pour elle ne tarissait pas.

   Car pour Julie, le danger ne venait pas de l'extérieur mais de l'intérieur.

   Et je savais que je ne pourrais rien faire pour l'aider.

   Je jetai un coup d'œil à l'horloge face à moi, sortant de mes pensées.

   Il était deux heures du matin.

   Pourtant, je n'arrivais plus à dormir. Un instinct étrange me poussait à rester éveillée pour veiller sur Julie, qui semblait si vulnérable, maintenant endormie.

   J'en étais à ce stade de mes réflexions quand Julie m'attrapa soudainement le poignet, remuant dans son sommeil.

"Cheryl... Tu vas brûler toi aussi ?

- Julie ? Non, je...

- Ne pars pas, s'il-te-plaît. Ne brûle pas comme elle, s'il-te-plaît.

- Elle ?

- Maman..."

   Une larme solitaire roula sur la joue de Julie, tandis que je me figeai d'horreur.

"C'est de ma faute, Cheryl. Tout ce que je touche finir par se briser. Par brûler. Et ceux que j'aime s'envolent. Comme la cendre emportée par le vent. Comme les souvenirs heureux. C'est ma punition. Tu comprends ?

   Avant que je ne pus essayer de démentir ses propos, Julie enchaîna :

- Ne t'approche pas de moi ou tu te brûleras. Ou tu brûleras.

   Julie poussa un soupir tremblant et sa prise se resserra sur mon poignet :

- Je veux pas te voir brûler."

    Je battis plusieurs fois des paupières pour réprimer les larmes qui montaient et chassai celles qui glissaient sur les joues de Julie.

"Je suis là, Julie. Je ne sais pas ce que tu as vécu, mais je suis là, moi. Je ne partirais pas, je te promet. Je ne brûlerais pas."

   Je n'étais pas sûre que Julie puisse m'entendre dans l'état de demi-sommeil dans lequel elle se trouvait, mais je continuai tout de même à chuchoter à son oreille. De ma main libre, je traçai de petits cercles sur sa peau nue, tentant comme je pouvais de détendre ses muscles crispés.

    Petit à petit, Julie se détendit avant de replonger dans un profond sommeil, quelques larmes blotties au coin de ses yeux.

   Epuisée, je fermai les yeux à mon tour, ma main toujours dans la sienne, et m'endormis à mon tour.

TempêtesWhere stories live. Discover now