Chapitre 4 (12) : Corvi ullis eiulatibus

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Je me réveille assise par terre. Une main tapote sans trop de violence ma joue. Je grogne doucement en tentant d'ouvrir mes yeux. Les évènements précédant mon évanouissement me reviennent, mais atténués. Ce que j'ai vu paraît lointain, à présent.

Mes paupières se soulèvent. Kagari est agenouillé à quelques centimètres en face de moi. C'est à lui qu'appartient la main. Il sourit. Et est beaucoup trop près. Je déglutis. Il se recule en souriant davantage.

- Réveillée ? C'est bon ?

Nous nous trouvons dans le couloir en face de la morgue. Les vestiges de la porte défoncés par l'escabeau reposent à ma droite, et derrière Kagari, je distingue la silhouette de Sukina, bras croisés. L'Ornithologue m'adresse aussi un sourire, mais qui n'a rien de rassurant.

L'Architecte se relève et me tend une main. J'apprécie l'intention, bien sûr, mais je doute qu'il soit réellement en mesure de m'aider à me relever....Dans le doute, je m'appuie au mur pour reprendre de l'altitude. C'est assez inhabituel d'avoir les yeux de Kagari pratiquement à la même hauteur que les siens, si je dois dire....

Un léger silence plane. Un de ces silences gênants. Que l'effet se soit atténué ne signifie pas qu'il est estompé. Plus précisément...je suis encore sous le choc de ce que j'ai vu dans cette morgue.

- Tu n'as donc...aucun respect pour les morts ?

Il incline la tête comme s'il...ne comprenait pas. Je détourne le regard, et ferme les yeux. Calme Wen Xiang. Tu t'énerves beaucoup trop à cause de ce meurtre, mais il faut que tu gardes la tête froide et sur les épaules.  L'Architecte continue de réfléchir, avant....d'éclater de rire. Même Sukina semble surprise.

- Nan ! Nan j'en ai pas! Un mort, c'est mort, c'est un corps, ça bouge plus. La mort c'est la fin du voyage, Wen Xiang. Y'a rien après, et moi je dois rester en vie. Pour Kezelyu, pour Neia.

- Alors elles sont tout ce qui t'importe ?

Il acquiesce lentement. Encore le silence. J'entends...j'entends la voix au fond de moi. Pas de manière intelligible, juste...Une demande. Une interrogation. Un besoin d'en savoir plus, de la curiosité tout simplement, même si effroyablement mal placée. Au point où on en est.

- Et ta mère ?

Il tressaille. Qu'importe. J'ai besoin d'en savoir plus sur lui, pour savoir si je peux vraiment lui faire confiance. Son affection pour ceux qu'il aime est tout aussi attendrissante que son indifférence des autres est effrayante. Un vrai petit psychopathe d'un mètre trente et quelques. Et je refuse de laisser l'enquête entre les mains d'une personne au moins aussi suspecte que Kezelyu. Lui non plus n'a pas d'alibi, après tout.

Il se retourne lentement vers moi. Son expression est indéchiffrable. J'aimerai reculer, mais je suis acculée contre le mur.

- Tu poses pas mal de questions.

- C'est...C'est mon rôle....je crois...

- Tu es bien zélée pour quelqu'un qui en veut pas, de ce rôle. Mais soit. Jvais t'en parler.

Il jette un œil à Sukina. Elle hausse les épaules, et s'éloigne de quelques pas en se bouchant les oreilles, tout en sifflotant une chanson à voix basse. Peut-elle seulement s'entendre elle-même ?

- Alors. Tu veux savoir quoi ?

- Tout. J'ai besoin de toutes les pistes possibles.

- Je te raconterai pas tout, tu t'en doutes bien, jpense. Ça attendra qu'on soit sortis de cet espèce de bordel sous marin.

Il croise les bras, et me regarde d'en bas. Puis il détache son escabeau, le déploie, et monte dessus. Le voilà à mon niveau. Mais ces singeries ne me font plus rire. Je dois découvrir la vérité.

Danganronpa : L'Enfer AquatiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant