Chapitre 2 (10-2) : Est victor a Deo electi

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- Accordé.

Comment un seul et unique mot peut faire s'effondrer toutes mes certitudes ? Il a bien sûr été établi au premier procès que Monokuma se fichait totalement de ses propres règles. De ses propres promesses. Le Diable n'est qu'un être de pur chaos qui ne se laisse enchaîner par aucun serment.

Mais par ce simple mot, ces sept lettres, il vient de remettre en cause une règle pourtant capitale...Sans mauvais jeu de mot. Lorsqu'un coupable est révélé, il doit mourir.

Ou alors....Ou alors je me suis trompée. Eugène n'est pas coupable. Pourquoi, sinon, Monokuma lui accorderait-il cette ordalie ? Ces pensées me traversent l'esprit à toute vitesse alors que je vois le Chevalier se lever et descendre tranquillement les marches de l'Amphithéâtre. Son pas est lourd, alors qu'il ajuste tranquillement sa veste et son brassard. Puis il termine sa tranquille marche sur la scène devenue arène. Ses yeux viennent me transpercer, alors qu'il me domine de sa taille colossale. Les autres nous fixent, incertains de la marche à suivre. Heureusement, ou plutôt malheureusement, Monokuma lance en caquetant :

- J'imagine que tout le monde ici sait ce que notre gentil paladin en armure toute blanche vient de demander ?

Évidemment que non...Rare sont les gens de nos jours à connaître cette tradition barbare, cette justice idiote basée sur la force. Pourtant à ma grande surprise, ce sont Raraka et Hikage qui manifestent en première leur incompréhension. Suivies par Senri et Anthony.

- Ohoho ! Mais on a des incultes dans nos rands dites moi ? Wen Xiang, ma puce, voudrais-tu bien expliquer, puisque tu sembles avoir compris ?

Ma puce. Ces mots. Quelle...horreur. Je savais que Monokuma pouvait m'horrifier, me terrifier, me surprendre, mais ces mots...Ces mots...me le font dégoûter. Ils tordent mon estomac et déchirent mes boyaux. Ils me remplissent d'une sourde colère. De haine même. Je n'ai plus seulement peur du Diable. Je le hais.

- Je...

- Peut-être est-ce plutôt ma tâche ? m'interrompt Cheng Hui en se levant.

Je soupire de soulagement, et l'invite à poursuivre. J'ai beau être plus à l'aise qu'avant, je préfère ne pas avoir à parler si je n'y suis pas obligée. Sans doute est-ce l'éternelle malédiction de l'introverti...Je relève mes yeux vers Cheng Hui, et ce dernier commence son explication :

- Les ordalies, dans l'Europe médiévale, étaient un moyen de trancher un jugement trop complexe.  Lorsque deux ,nobles étaient accusés d'un crime, l'un pouvait demander l'ordalie. Le vainqueur était le vainqueur du procès...Puisque Dieu qui était juste et bon ne pouvait qu'avoir favorisé le bon parti.

Sa voix se teinte d'un profond dégoût sur la fin. Une méthode de jugement demandant à Dieu de trancher. Pour un communiste comme lui, sans Dieu, César ou Tribun, ce doit être la pire des offenses que de l'obliger à assister à cela. Sans compter que...Dieu est mort.

- Et qui l'accusé va-t-il affronter alors ? demande Kagari avec un sourire espiègle, loin de la tension ressentie par tous les autres participants du procès.

Je déglutis lentement, en regardant la silhouette massive d'Eugène. Il est de loin le plus fort d'entre nous. Comment pourrions nous espérer le défaire ? C'est sans espoir.....je suis sûre qu'il est coupable. Sa demande d'ordalie le prouve. Mais si aucun de nous ne peut le défaire, alors c'est peine perdue. Je sens un frisson agiter ma nuque. Alors c'est la fin ?

- Moi ça me semble plutôt évident, pouffe Monokuma.

Je tourne mon regard vers lui, l'arrachant du Chevalier qui attend, immobile, le visage neutre et calme, loin de toute la rage qu'il manifestait durant le procès. Et je découvre notre tortionnaire, notre bourreau, souriant de toutes ses dents, fixant doucement la seule autre personne de la carrure d'Eugène dans la salle.

Danganronpa : L'Enfer AquatiqueWhere stories live. Discover now