ESPRIT CHASSEUR

Chapitre 2

Backstreet Boys - Chances

Lundi 15 Janvier – O2h21 ; Washington DC

      La lumière des réverbères témoignait de la nuit tombée depuis de nombreuses heures sur Washington. Certains quartiers de la capitale continuaient d’abriter des réjouissances relativement attardées. D’autres privilégiaient un silence de cimetière. Particulièrement, la journée suivante en était pour quelque chose.

En effet, plus de la moitié de la population de Washington travaillent pour le gouvernement ou pour des entreprises privées. Autrement dit, Los Angeles et la capitale fédérale sont deux villes diamétralement opposés. Si les habitants de la première pensent à jouir et à faire la fête, ceux de la seconde ont plutôt la tête dans les papiers.

Paradoxalement, celui-là, avait choisi d’inverser les rôles des deux villes. Notre homme entra nonchalamment dans la buvette, et s’assis au comptoir, non sans une difficulté à se frayer un chemin. Les nombreuses tables installées et les personnes qui se dandinaient autour de lui n’étaient pas sans le déplaire. Dans quelques minutes pourtant, le bar allait fermer : Le nouveau jour levé comptait bientôt trois heures à son actif. Il avait longtemps hésité avant de garer sa voiture. Mais, qu’avait-il réellement à perdre ? Non seulement, le goût de la boisson lui semblait tellement lointain, mais quelque kilomètres seulement le séparer de son domicile. Aucune inquiétude à avoir donc.

D’une traite, il finit son premier verre, le regard tourné vers le podium, où, au loin un groupe de jeunes jouait de la musique. Du country. Chose très inhabituelle dans une telle région. Il reconnut au micro un jeune adolescent qui devait être le leader du groupe. La jeunesse qui émanait en lui était frappante. Il ne devait pas atteindre la vingtaine, mais son talent se faisait savoir quand par son charisme et sa voix.

    Michael ne devait pas avoir son âge, lorsqu’il débutait sa carrière. Dix ans plus tard, le voilà prit dans une spirale infernale. A le voir, l’on aurait jamais pensé qu’un métier aussi passionnant aurait produit en lui un dégoût immense. Car oui, aujourd’hui il regrettait amèrement tous ses choix de carrière.

- Vous en voulez encore ?

    Il se retourna immédiatement, interpellé. En face de lui, de l’autre côté du comptoir, la serveuse le regardait, d’un œil intrigué. Elle avait sûrement dû remarquer que quelque chose n’allait pas chez lui. Oh God, elle devait déjà le prendre pour un soulard ou un SDF !

- Je… Non, merci, Bredouilla-t-il, rapidement.

    C’est sûr qu’il méritait réellement de la compassion, avec son apparence de chômeur. Evidemment, il n’en était pas un, et il n'envisageait certainement pas une telle reconversion. La serveuse lui fit un gentil sourire avant de s’éloigner rapidement. Toutefois, il ne détourna pas son regard. La serveuse était jeune, et ne devait pas être Américaine, à part entière, tout comme lui : Ses longs cheveux bruns d’une couleur beaucoup plus foncée et sombre et ses yeux noisette le prouvaient. La faible lumière jaune l’empêchait de bien distinguer son visage qui lui paraissait singulier. Pour lui, elle ne devait pas excéder la trentaine, mais son attitude de sérieuse pouvait en tromper plus d’un.

    Ce qui attarda son attention, fut ses tatouages sur son bras gauche. Elle portait un tee-shirt des Beatles qui s’arrêtait avant son coude et qui laissait donc une vue sur ses outils de manœuvre. Des longues inscriptions et des physionomies tatoués en noir portant des traits de l’esthétique étaient gravées sur sa peau. L’on aurait pu croire qu’elle ait elle-même prit la machine pour se faire ses marques.

- Eh beauté ! Une bière pour nous deux !

    La chaise grinça à côté de lui et un bruit sourd se fit entendre malgré le bruit de la musique persistante. Un homme venait de s’asseoir. L’autre n’eut pas besoin de l’analyser pour comprendre qu’il était déjà saoul. A sa vue, la serveuse passa une main dans ses longs cheveux dévoilant ses mains imbibée d’encre noire et répondit sèchement :