Chapitre 2 : Adam

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- Juan, on a un problème !

Je me retourne vers Ricardo, détachant mon attention de la compteuse à billets.

Comme d'habitude, son regard est fuyant. Je sais pertinemment que je lui fais peur. Je ne cherche cependant pas à le rassurer. Ici, il faut se faire respecter sinon on se fait bouffer. Pour cela il faut s'imposer par la force, montrer qui est le plus fort.

Mon expérience dans le combat m'a permis de me démarquer auprès des gangs qui règnent sur certains villages du Mexique. J'ai fait partit de la Santa Calle, « Rue Sainte » en français, pendant plusieurs mois avant de prendre la place de leur chef, tué pendant un règlement de compte.

Il s'appelait Stan. Il m'a pris sous son aile après m'avoir surpris en train de me défendre auprès d'un cartel ennemi au sien qui me cherchait des noises. J'ai réussi à mettre au tapis un groupuscule de trois gars. Stan a été impressionné et m'a offert l'opportunité de faire partit de sa « famille », comme il aimait l'appeler.

Ma mère et moi avons eu beaucoup d'emmerdes depuis que nous étions arrivés. Les étrangers ne sont pas bien vus dans les quartiers mal famés du Mexique. Nous étions victimes de beaucoup de raquettes et de menaces de la part d'habitants, obéissant aux règles de plusieurs clans. Entrer dans la Santa Calle m'a ouvert beaucoup de portes dont celle de la sécurité physique et financière. Je me suis tout de suite bien entendu avec tout le monde, moi qui ne suis pas censé être sociable. Les cours d'espagnol de Carmen m'ont bien servi pour communiquer avec eux. Ma mère a été moins ravie que moi. Elle avait l'impression de revivre le même mode de vie qu'à Paris. J'avais beau lui dire qu'elle exagérait et que nous n'étions plus dans la précarité grâce à lui, elle n'a rien voulu savoir. Après une énième dispute, elle a décidé de mettre les voiles, ne supportant pas de me voir je cite « replonger dans ce monde de violence ». Je n'ai plus eu de nouvelles d'elle depuis.

Stan a été comme un frère pour moi. Sa mort m'a beaucoup touché. J'avais beau être arrivé que depuis six mois, j'étais devenu son meilleur ami. A sa mort, l'un des membres de la Santa Calle est venu me voir pour me l'annoncer. J'avais l'impression que mon monde s'écroulait de nouveau depuis que je me suis enfui de France. Nous nous étions réunis avec l'ensemble des membres pour rendre hommage à Stan. C'est à ce moment-là que tout le monde s'est mis d'accord pour me nommer à la tête du cartel, à la place de mon défunt ami. Juan Sanchez, chef du cartel Santa Calle. Ça claque non ? L'ancien Adam n'existe plus et j'en suis heureux.

Le petit blondinet qui me fait face, dont ses tatouages sont les seuls attraits physiques qui lui donnent un air dur, me scrute du regard, attendant une réaction de ma part.

- Qu'est-ce que tu veux ? lui répondais-je fermement, irrité d'avoir été interrompu dans ma comptabilité.

- Les Nueva Ley s'en sont encore pris à nous. Ils ont buté Carlos et Kiara ce matin. Il faut qu'on fasse quelque chose, on est en train de se faire bouffer !

La colère s'empara de moi. A l'annonce de cette terrible nouvelle, je tape du poing sur la table en bois devant laquelle j'étais assis. Ricardo sursauta face à ce geste.

- Regroupe les autres, j'arrive, finissais-je par répondre.

Ricardo s'exécute. J'aime bien ce mec, il est loyal. Je sais que je peux compter sur lui. Bon d'accord, il est obligé de m'obéir quand je lui donne des ordres mais je suis presque sûr qu'il ne me trahira jamais, contrairement à d'autres que je suspecte de vouloir prendre ma place. Je ne peux pas vraiment leur en vouloir. Je suis le dernier arrivé dans leur cercle et pourtant c'est moi que le clan a choisi à la majorité, pas à l'unanimité.

Between you two [Tome 2]Where stories live. Discover now