A l'extérieur des murs [Livaï x OC] [Reiner x OC]

25 ~ Le nouveau continent

Le soleil est déjà bien haut dans le ciel lorsque j'aperçois enfin la terre ferme. Mon cœur palpite dans ma poitrine à mesure que j'approche du continent et je ne peux m'empêcher d'esquisser un sourire niais. Je ne m'attendais pas à ce que cette traversée se déroule aussi facilement, ni même à pouvoir m'échapper si facilement de Paradis. Pour une fois, il faut croire que la chance est de mon côté, et espérons que ça dure car le plus dur reste à venir. Je dois à présent infiltrer l'armée et je pense que ce ne sera pas une mince affaire.

Mes talents cachés de navigatrice m'impressionnent moi-même puisque je parviens à accoster au port sans trop de difficulté. Lorsque mon voilier est fermement arrimé au ponton en bois, je ne peux m'empêcher de sautiller de joie sur place. Si Livaï voyait ça ! Je sens soudain un fossé se creuser en moi en pensant à lui. Il doit probablement être réveillé à l'heure qu'il est et a sans doute déjà appris mon départ. Je me demande comment il l'a pris d'ailleurs ... Mal, sans aucun doute. Après tout, Livaï est un petit être colérique qui s'énerve à la moindre contrariété, et on peut dire que je l'ai fameusement contrarié avec cette décision insensée.

– Eh, toi là-bas ! m'interpelle un homme dans mon dos.

Mon sang se glace dans mes veines tandis que chaque muscle de mon corps est paralysé. A tous les coups, c'est un membre des forces de l'ordre venu me réprimander parce que je n'ai pas le droit d'amarrer mon bateau ici. Je rentre ma tête dans mes épaules, angoissée à l'idée de me faire prendre, et me tourne lentement vers mon interlocuteur. Il s'agit visiblement d'un vieux pêcheur au crâne dégarni et à qui il manque quelques dents.

Ben dis donc, on dirait qu'il sort tout droit des bas-fonds celui-là ...

Rassurée de constater qu'il ne s'agit pas d'un soldat, je reprends confiance en moi et me redresse.

– Oui ? demandé-je poliment.

– Il est à vous ce bateau ? questionne-t-il en désignant mon embarcation.

Je jette un regard soupçonneux à mon voilier avant de reporter mon attention sur le vieux pêcheur. Pourquoi veut-il savoir ça celui-là ? Oh non, j'espère qu'il n'a pas deviné que ce bateau ne vient pas d'ici, pire encore, qu'il n'a pas deviné qu'il vient de Paradis et moi avec. Est-ce que ma couverture bancale est déjà grillée ? Non, ce n'est pas possible, mon plan ne peut quand même pas tomber à l'eau aussi vite ...

Je lance quelques regards méfiants et apeurés tout autour de moi pour m'assurer que je n'ai pas été repérée. Fort heureusement, tous les passants autour de nous semblent vivre leur vie sans se préoccuper de nous. Un raclement de gorge impatient du pêcheur me ramène à la réalité et je reporte mon attention sur ce dernier. J'hésite un instant avant de hocher lentement la tête, ma gorge étant tellement nouée que je suis incapable de prononcer le moindre mot. L'homme observe mon bateau un long moment avant de poser son regard sur moi.

– Pour combien le vendriez-vous ?

Je ne peux m'empêcher d'écarquiller les yeux tellement je suis sidérée par sa question. J'ouvre la bouche, m'apprêtant à lui répondre que ce bateau n'est pas à vendre, avant de me raviser. Après tout, maintenant que je suis ici, il ne m'est plus d'aucune utilité. J'ignore combien de temps je compte rester ici, et les gens risquent de se poser des questions si ce bateau reste là indéfiniment. Autant m'en débarrasser sur le champ.

Je m'apprête à faire une offre que j'estime correcte au vieux pêcheur mais me retiens au dernier moment. Les mots s'étranglent dans ma gorge en un gargouillis inintelligible qui fait froncer les sourcils au pêcheur. J'étais sur le point de faire une énorme boulette en proposant au pêcheur un prix en monnaie eldienne. Les Mahrs n'utilisent pas la même devise que nous, je le sais, en revanche j'ignore ce que vaut leur argent. Merde, comment faire pour proposer une offre crédible au pêcheur ? Son regard inquisiteur devient de plus en plus méfiant tandis que mes neurones s'activent à toute vitesse pour trouver une solution. Mon regard s'illumine alors lorsqu'une idée brillante jaillit dans mon esprit.