Je m'attendais à un serpent

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Va-t-elle se la fermer ?

Gabriel écoutait depuis une heure la jeune femme jacasser.

Il était arrivé plus tôt dans l'après-midi au terrain hippique qui se trouvait à l'extérieur de la capitale et avait eu la désagréable surprise de trouver mademoiselle de Lero.

L'heureuse gagnante du petit concours organisé par sa mère s'était jointe à lui dès qu'il eut posé pied à terre. Il était venu suffisamment tôt pour saluer quelques connaissances et voir les chevaux en liste, mais la jeune femme semblait avoir un autre plan. Celui de lui gâcher la journée.

Ne supportant pas les odeurs et craignant de salir sa robe, la tionienne refusait de s'approcher des écuries. Ainsi, ils étaient tous deux assis au premier rang sur les bancs du stade avec un verre de punch à la main.

Gabriel avait trouvé la discussion plaisante au début puisqu'ils s'étaient posés mutuellement des questions sur qui ils étaient. Dès qu'il eut évoqué son goût pour la chasse, une grimace de dégoût avait barré le visage de sa compagne.

Elle ne s'attarda pas sur ses autres pratiques sportives puisqu'elle changea du sujet en complimentant le stade. Par la suite, il n'avait pu parler puisqu'elle restreignait la conversation à sa personne et à sa vie qu'elle qualifia de mouvementée. À cela s'ajoutait qu'il avait eu le malheur de la complimenter, par politesse, sur sa robe verte et elle s'était empressée de mener une argumentation sur les robes qu'il ne pouvait que subir.

Il pensa même créer une diversion pour se soustraire à elle malgré les menaces de sa mère, mais le destin le devança.

La marquise de Herelna.

Accompagnée, d'une femme à la peau dorée, la nordienne passa devant eux sans leur accorder le moindre regard.

Coupant la rouquine dans sa tirade, il s'excusa poliment et rejoint la blonde qui se servait un verre.

Un peu en retrait, il la contempla rire aux éclats avec sa compagne. Ses cheveux blonds étaient retenus par un ruban bleu pastel assorti à sa robe. Son regard joueur ne se détournait pas de jeune femme qui l'accompagnait elle aussi en proie aux larmes.

Aucune ne faisait attention aux autres femmes aux cheveux moutonnés qui choquées de leur façon les critiquaient ouvertement tandis que leurs maris les lorgnaient comme de la viande fraîche.

L'une des femmes passa à côté des deux demoiselles et se servit un verre de jus de raisin. En se retournant, elle frappa de plein fouet la blonde. Le verre éclaboussa la robe claire de la marquise d'une grosse tache sombre.

Gabriel sut qu'elle l'avait bousculée à dessein. Cela n'était pas compliqué à saisir au vu des sourires mauvais des amies de la comtesse.

— Je ne vous avais pas vu ! s'exclama-t-elle.

La jeune femme souffla bruyamment en constatant les dégâts sur sa robe.

— Ce n'est rien, tempéra-t-elle. J'avais un peu chaud.

Gabriel fut surpris qu'elle laisse passer cet affront. Peut-être n'avait-elle pas compris la moquerie.

— Dommage, pour votre robe, mademoiselle, continua la brune, je peux vous prêter un châle pour vous couvrir en guise de dédommagement.

— Marquise, grogna la blonde.

— Je vous demande pardon ? feint la comtesse du Depaïs.

— Je suis marquise, non mademoiselle et mon statut d'étrangère n'enlève rien à mon titre. J'imagine que la maladresse fait partie de vos défauts ainsi, je ne vous en tiendrais pas rigueur, mais veillez à respecter mon titre sinon je pourrais prendre cela pour un affront.

Le destin d'AnnaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant