Chapitre 2 : « Love et autres drogues »

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J'aime cette musique. Je la connais. « The Toxic Avengers ». Je pourrais l'écouter toute la journée. Ma révélation musicale de ce mois de novembre. De la pure électro made in France à l'ancienne, un régal pour les oreilles. Les heures passées sur Youtube à rechercher de nouveaux artistes portent souvent leurs fruits et me ravissent. Jamais je ne me déplace si je n'ai pas mon téléphone chargé à bloc de mes récentes découvertes. D'ailleurs, je ne sais pas comment font ces personnes qui parviennent à passer une journée sans écouter de musique. Ils doivent se sentir bien vides.

Je sens tout à coup des vibrations en rythme avec ce délice auditif. J'ai mis du temps à comprendre.
C'est ton téléphone qui sonne.
Machinalement, je tâtonne à proximité de moi et décroche.

-Allô ?

Ma voix est encore plus rauque que d'habitude.

-Max ? Qu'est-ce que tu fais ? Tu devais m'appeler pour me dire que tu étais réveillée. Il est bientôt midi ! Je passe te prendre dans 15 minutes ! Je suis partie depuis un moment.

Quelques secondes s'écoulent avant que je ne réalise que c'est ma sœur. Je fais un bond dans le lit et regarde l'horloge en face de moi. Je commence à bafouiller.

-Oui... D'accord... 30 minutes. Je serai ... Enfin je suis quasiment prête.

-Ce qui signifie que tu viens de te lever. Ok. A tout de suite.

Elle raccroche aussi sec.

Annabelle, 28ans, est de 5 ans mon aînée. Elle est ce genre de fille que je caractérise de « rangée ». Toujours ponctuelle, toujours bien habillée, bien maquillée, coiffée sans qu'une mèche ne dépasse, le même mec depuis qu'elle a 20 piges et un crédit immobilier obtenu à un taux beaucoup trop élevé qu'elle mettra 30 ans à rembourser. Tout cela pour posséder une jolie maison toujours bien ordonnée à une heure de Paris, livrée avec son joli petit jardin toujours bien tondu. Évidemment, il ne faut pas oublier le chien, le chat, et le métier très respectable d'enseignante dans un collège privé très prisé des gens les plus fortunés de la capitale. Elle a toujours voulu tout contrôler afin de s'approcher au plus près de la perfection. De sa perfection.

Je m'assois sur le lit un instant. On est dimanche, et c'est l'anniversaire de mon père. J'ai la tête qui tourne. Je crois que les rails et l'alcool font encore effet.
Ta soirée devait encore être bien mouvementée.

Je n'ai même pas pris la peine de me déshabiller en rentrant. A priori, j'ai simplement eu le courage de retirer mes chaussures et ma veste avant de m'effondrer sur mon lit.
Mes souvenirs sont flous et je ne me rappelle de quasiment rien, sauf de l'happy-hour vers 18 heures. Mais qu'importe. J'ai dormi chez moi, je me réveille seule, alors tout va bien. Il y a eu bien pire.
Mon premier réflexe est de chercher du regard l'endroit où est posé mon sac. Je roule sur le ventre et étire mon bras au maximum pour l'attraper par sa lanière apparente. Check-up des fondamentaux :

    -la Carte Bleue : ok.
    -la carte d'identité : ok
    -Mes cigarettes : ok

J'en sors une du paquet et l'allume en m'allongeant de nouveau, épuisée par l'effort fourni.
Qu'est-ce qu'elle est bonne cette première du matin.
Je sors dans le même temps quelques tickets de carte bancaire : 18h34 au Hasard Ludique :2 Spritz 16 euros. 19H58 : 1 Caipirhina 10euros. 23H28 à la Boissonnerie : 4 mojito 36 euros.
Je stoppe net ma lecture. Mieux vaut ne pas savoir combien j'ai encore dépensé.

J'essaie alors de me relever. J'attends encore quelques instants, puis pose mes pieds nus sur le carrelage froid. Je ne pense qu'à une seule chose désormais. Aller me chercher un soda frais pour empêcher ma bouche de devenir encore plus pâteuse qu'elle ne l'est depuis que j'ai ouvert les yeux.
Le chemin jusqu'au réfrigérateur est semé d'embûches. J'écrase au passage un autre paquet de cigarettes à moitié plein, des feuilles OCB, renverse une assiette de pâtes datant d'il y a quelques jours, puis fais tomber mon cendrier. Des gestes maladroits me rappelant une nouvelle fois que je n'ai pas dû faire beaucoup d'efforts la veille pour espérer être en forme aujourd'hui.

Et puis un jour, tu t'envolas.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant