Arthur.

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Sapée comme une putain de fée malfaisante gothique, avec une robe pourpre à l'ancienne, col rond et longues manches évasées en pointe, ma sœur me toise.

Morgane porte aussi une fine ceinture sertie d'émeraudes. Mais ce qui est vraiment intéressant et dangereux pour moi, c'est le fourreau qui y est accroché et duquel dépasse la garde d'une épée en émeraude également.

Bref, Maléfique coupée de la Méchante Sorcière de l'Ouest.

Est-ce que je vous parle de son maquillage noir qui la fait ressembler à un panda dépressif ? Ou de sa large bague en argent à tête de mort ?

Ouais, vous avez raison, je vais m'abstenir.

— Arthur.

Je suis stupéfait. C'est bien la première fois que ma sœur aînée m'adresse directement la parole. Pour tout vous dire, je suis même étonné de sa voix rauque et profonde, presque hypnotique.

J'entends trotter derrière moi.

— Si tu as besoin de quelqu'un pour lui coller un sabot dans le derche, je suis ton cheval.

Je ferme les paupières et soupire en me pinçant l'arête du nez. Il faut rapidement que j'apprenne à Sleipnir à museler sa grande bouche.

J'ouvre les yeux et toise ma sœur.

— Qu'est-ce que tu me veux, Morgane ?

— Je viens te prévenir.

— Ah oui ? Trop aimable.

Elle sourit.

— Il m'arrive d'être charitable.

Je m'étouffe presque.

— Permets-moi d'en douter.

Ma frangine caresse le pommeau de son épée.

— Tu as peut-être été admis à Petit Camelot, constate-t-elle durement, mais tu n'en deviendras jamais le Seigneur. Ni maintenant, ni jamais. Je ne te laisserai pas agir comme ton père avant toi.

Donc, on en est au stade des menaces pour un truc dont je ne sais rien.

Je me tends.

— Ce que je ferai ou non ne te concerne pas, répliqué-je, froid. S'il te plaît, continue de m'ignorer. Ça me va très bien.

Morgane se met à marcher de long en large, les yeux fixés sur moi.

— Tu es comme lui, arrogant, prétentieux et suffisant. C'était un menteur et un briseur de couple. Il a séduit ma mère pour prendre la place de mon père. Depuis le début, il en était jaloux. Envieux de sa femme et de son fief. Et à la fin, c'est limite s'il n'a pas dansé sur son cercueil, pour fêter son décès. Je le détestais. Tu es comme lui. Un assassin. C'est ta faute si elle est morte. Si tu étais un tant soit peu intelligent, tu partirais et tu laisserais la place à de vrais fils de la Garde.

C'est moi ou la Méchante Maléfique de l'Ouest me cherche?

— S'il te plaît, Arthur, je peux lui mettre un coup de sabot ?

J'ignore Sleipnir pour mieux me concentrer sur ma sœur. Je serre les poings à m'en briser les articulations. Mon pouls s'accélère. Mon sang bat fort à mes tempes.

Dommage qu'Hector m'ait appris à ne jamais frapper les filles.

— Rien qu'un tout petit minuscule coup ? gémit Slei. Je te promets que je taperai pas trop fort. Sabot de bois, sabot de fer, si je mens, je vais en...

— Slei, tais-toi. Quant à toi, Morgane, tu peux penser ce que tu veux, riposté-je, mais tu connais le proverbe ? J'y suis, j'y reste. Que tu en aies envie ou non, je passerai tous mes échelons et je me ferai un plaisir de devenir chevalier puis seigneur et enfin roi. Et à la fin, on verra qui de nous deux est le plus intelligent : celui qui a passé son temps à haïr ou celui qui a avancé vers son destin.

Les mondes perdus de Brocéliande (Terminée, en cours de réécriture )Место, где живут истории. Откройте их для себя